Le président français Emmanuel Macron a décidé mercredi de "déclarer l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie" après des émeutes au cours desquelles trois personnes ont été tuées et un gendarme "très grièvement blessé", ont annoncé ses services dans un communiqué.
"Toutes les violences sont intolérables et feront l'objet d'une réponse implacable pour assurer le retour de l'ordre républicain", a ajouté la présidence française à l'issue d'une réunion de crise du Conseil de défense et de sécurité nationale consacrée à la situation de cet archipel français du Pacifique Sud.
"Le président de la République a rappelé la nécessité d'une reprise du dialogue politique", a-t-elle précisé.
Pillages, incendies, affrontements avec la police. L’île n’avait pas connu pareil scénario depuis les années 80. On compte les entreprises incendiées, les supermarchés pillés après une nouvelle nuit de violence, les maisons attaquées. 140 personnes ont été interpellées.
Au moins trois personnes ont été tuées par balle. On compte également des centaines de blessés. Elles n’ont pas été blessées par des munitions des forces de l’ordre, soulignent les autorités. Comprenez, un habitant a sans doute voulu se défendre. Des milices d’habitants se sont organisées pour protéger maisons et commerces. Car on assiste à des violences raciales, entre peuple kanak et calédoniens blancs. Le Haut-commissaire de la République, Louis Le Franc parle de situation “insurrectionnelle”. Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin a déclaré sur RTL ce mercredi: “Il faut que le calme revienne absolument.” Le ministre a annoncé le maintien du couvre-feu.
Une violence que tout le monde craignait. La réforme constitutionnelle présentée par Gérald Darmanin était critiquée depuis des mois. Elle ouvre le corps électoral aux personnes installées depuis 10 ans minimum dans l’île. Le corps électoral était gelé depuis les accords de Nouméa entre Paris et les indépendantistes. Ces derniers sont contre cette réforme, ils y voient une manœuvre pour minorer leur poids dans les institutions de l’île. Les accords de Nouméa (1998) reconnaissaient l’existence du peuple Kanak en Nouvelle-Calédonie et son droit à l’indépendance mais les trois référendums qui ont permis aux Calédoniens de voter pour ou contre cette indépendance, ont tous penché pour le non. Ces accords figeaient également le corps électoral.
L’assemblée nationale française n’a pas changé son calendrier malgré les émeutes. La réforme constitutionnelle a été votée par 351 voix contre 153 mardi soir à Paris. Elle ne sera entérinée que lorsque le Congrès (assemblée et sénat) la votera à une majorité des trois cinquièmes. Les indépendantistes ont immédiatement réagi. Le FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste) dit regretter les violences et demande le retrait du texte. Dans un communiqué, le MDES (le mouvement de décolonisation et d’émancipation sociale) dénonce un “passage en force”, “ce texte est dans la droite ligne de la doctrine colonialiste de la France qui refuse le droit à l’autodétermination des peuples.”
Emmanuel Macron a annoncé que le Congrès ne sera pas convoqué avant fin juin afin de laisser le temps aux indépendantistes et autres partis calédoniens de trouver un accord. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre Mer a invité tous les partis concernés à venir à Paris conclure un accord de paix.