La bataille pour les élections législatives, le "troisième tour", a commencé lundi au lendemain de la réélection d'Emmanuel Macron, la majorité sortante s'engageant à "rassembler" et à répondre aux attentes d'un pays "fatigué", tandis que les extrêmes appellent à un contre-pouvoir fort à l'Assemblée.
Les membres du gouvernement sortant saluent un "vote d'adhésion" tout en assurant prendre la mesure des "fractures" françaises, du "message de colère" et de l'"insatisfaction démocratique" exprimés par des millions d'électeurs lors d'un second tour marqué par une abstention record de 28%.
Le président sortant l'a emporté avec 58,54% des voix face à la candidate du Rassemblement national Marine Le Pen (41,4%).
"Il y a eu un vote d'adhésion, des millions de Français se sont reconnus dans la politique d’Emmanuel Macron", a estimé le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, sur franceinfo.
"Notre devoir, notre responsabilité absolue, c'est de répondre aussi à ces millions de nos compatriotes qui sont dans l'inquiétude", a-t-il ajouté. "Ce n'est pas un quitus, ça ne veut pas dire que nous pouvons faire n'importe quoi."
Sur BFMTV et RMC, le porte-parole du gouvernement sortant, Gabriel Attal, a assuré de la détermination de l'exécutif d'"inventer une méthode nouvelle qui permet d'associer plus largement et beaucoup plus directement les Français dans les décisions qui sont prises".
Le chef de file des députés de La République en Marche, Christophe Castaner, a appelé sur France 2 "tous les républicains" qui le souhaitent à former une coalition de projet autour d'Emmanuel Macron, "mais pas à leurs conditions".
"Fractures"
"Ce vote oblige dans le sens que le pays (...) est fatigué, (...) et le premier travail c'est de rassembler, de réunir", a souligné le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, sur France Inter.
La ministre du Travail a déclaré sur RTL mesurer les "fractures auxquelles il faut répondre".
"Je pense qu'il (Emmanuel Macron) est parfaitement conscient qu'il y a besoin d'apaiser, de rassembler dans le pays", a poursuivi Elisabeth Borne, dont le nom circule pour le poste de Premier ministre.
Le chef du gouvernement sortant, Jean Castex, avait déclaré mardi dernier qu'il remettrait sans délai sa démission et celle de son gouvernement au chef de l'Etat afin qu'"une nouvelle phase" s'ouvre.
Emmanuel Macron, dont le mandat présent s'achève le 13 mai, avait indiqué dans l'entre-deux-tours qu'il prendrait "quelques pas de recul" en cas de réélection. Un conseil des ministres est prévu mercredi.
"Il y aura certainement du renouvellement", a dit sur BFMTV le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Clément Beaune, confirmant que le président avait le "souhait" d'une "nomination féminine" à Matignon.
"Ce n'est pas la question", a éludé Elisabeth Borne alors qu'on l'interrogeait à ce sujet.
Le camp adverse, porté par la "victoire éclatante" du bloc national selon les mots de Marine Le Pen, a réaffirmé lundi sa détermination à "incarner" l'opposition pour "faire parler une autre voix que celle d'une majorité écrasante".
"Moi, ce que je souhaite (...), c'est qu'il y ait un groupe suffisamment important à l'Assemblée pour s'opposer à la politique d'Emmanuel Macron qui va être brutale", a dit sur France 2 le député RN Sébastien Chenu, porte-parole de la candidate.
"On peut finir premiers"
"On a fait 16 points de moins, mais quand on regarde d'où on vient, c'est une victoire. Et surtout, contre tout le monde : les milieux journalistique, économique, syndical, associatif, religieux. 42%, c'est pas rien, 13 millions et demi de voix", a relevé le maire RN de Perpignan, Louis Aliot, sur France Inter.
Le Rassemblement national, dont Marine Le Pen ne reprendra pas forcément la présidence selon Sébastien Chenu, devait réunir ce lundi ses bureaux exécutif et politique.
L'appel à l'"union des droites" lancé dimanche soir par Eric Zemmour, en vue des législatives des 12 et 19 juin, a de nouveau été sèchement balayé.
"Je pense qu'il faut qu'il dégonfle sa tête, qui est énorme, et qu'il arrête d'insulter les gens (...) parce que pour une première, lui, on ne peut pas dire qu'il ait brillé (7,07% au premier tour de la présidentielle-NDLR)", a répliqué Louis Aliot, flétrissant "un homme du système".
"Je ne vois pas comment il pourrait y avoir une alliance en bonne et due forme avec 'Reconquête!' aujourd'hui", a-t-il jugé.
"On peut bien avoir quelques accords mais on ne va pas se lancer dans des alliances qui ne sont pas notre théorie", a renchéri Sébastien Chenu sur BFMTV.
A l'extrême gauche, La France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon, troisième du premier tour de la présidentielle avec près de 22%, cultive le scénario d'une cohabitation avec un président "minoritaire", selon le terme du député LFI de Seine-Saint-Denis, Alexis Corbière, sur BFMTV.
"Je propose qu'on batte tranquillement Emmanuel Macron. Tous ceux qui sont d'accord avec le tronc de notre programme, on peut arriver à se mettre d'accord", a-t-il dit, renouvelant l'appel au rassemblement autour de l'Union populaire.
"La bataille n'est pas finie, a martelé Manuel Bompard sur France Inter, il y a un troisième tour, ce sont les élections législatives".
"On a fini troisièmes au premier tour, on peut finir premiers au troisième tour", a estimé le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon sur France Inter.
David Guiraud, porte-parole de LFI, a précisé sur Europe 1 que des "discussions tactiques" avaient été engagées à gauche "en s'assurant que le programme de l’Union populaire qui a été très largement porté par les Français, soit respecté".