Le CCIE a publié son rapport annuel sur l’islamophobie en France. Les chiffres déjà alarmants en 2022, n’ont cessé d’augmenter en 2023, notamment après l’interdiction du port de l’abaya à l’école et les attaques transfrontalières du Hamas en date du 7 octobre 2023 sur le sol israélien.
En 2023, 828 actes islamophobes ont été signalés selon le rapport du CCIE, tandis que ce chiffre était de 527 en 2022, ce qui révèle une augmentation de 57% d’une année à l’autre.
Or ces chiffres concernent exclusivement les signalements qui ont été établis comme relevant juridiquement de l’islamophobie par le CCIE, mais ne comptabilisent pas toutes les demandes formulées auprès de l’association.
En 2023, 1.303 personnes ont contacté le CCIE, contre 787 en 2022, tantôt pour exprimer leur temoignage, tantôt pour des prises de contact ou demander des renseignements.
Les femmes, principales victimes
Comme observé l'année précédente, ces incidents touchent principalement les femmes. Sur 828 incidents signalés, 675 impliquent des femmes, ce qui représente 81,5% du taux global, tandis que 153 impliquent des hommes, soit 18,5%.
Bien que les proportions entre les sexes restent quasiment inchangées par rapport à 2022 (81% des incidents impliquaient des femmes et 19% des hommes), le nombre de signalements a augmenté de façon significative. En effet, le nombre de signalements pour incidents islamophobes impliquant des femmes est passé de 427 en 2022 à 675 en 2023, ce qui représente une augmentation de 58,1%.
De même, les signalements pour des incidents islamophobes impliquant des hommes sont passés de 100 en 2022 à 153 en 2023, soit une augmentation de 53%.
Harcèlement moral
Les 828 signalements pour l’année 2023 concernent des actes de discrimination (779), de provocation et d’incitation à la haine (188), de dégradation ou de profanation (11), d’injures (64), de harcèlement moral (237), de diffamation (97), d’agressions physiques (23) et d’autres liés à la lutte contre la radicalisation et le séparatisme (72).
Les dénonciations relatives à la diffamation, à la discrimination et à l'incitation à la haine ont enregistré une forte hausse. Toutefois, la progression la plus remarquable concerne le harcèlement moral, qui a augmenté de manière spectaculaire de 301,7% sur la même période. Il convient de noter spécifiquement que sur les 237 incidents signalés, 151 ont eu lieu au sein d'établissements scolaires tels que les collèges et les lycées.
Recrudescence après l’interdiction de l’abaya
En août de l’année dernière, le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, avait déclaré que les robes amples seraient désormais interdites dans les écoles, arguant ainsi de répondre aux demandes des directeurs d'établissement pour des directives plus claires. Il a justifié cette interdiction en affirmant que le port des abayas représente une menace pour la laïcité et le bon fonctionnement de l'école.
Le président français, Emmanuel Macron, avait pour sa part établi un rapprochement dangereux entre l’assassinat de l’enseignant Samuel Paty et le port des abayas pour justifier cette mesure controversée.
Cette mesure d'interdiction a naturellement entraîné une forte hausse des demandes adressées au CCIE en septembre, avec 182 enregistrées ce mois-là, comparativement à une moyenne mensuelle de 96.
En 2023, le CCIE a enregistré 234 plaintes en rapport avec l'interdiction des vêtements longs et amples à l'école, la grande majorité émanant de jeunes femmes fréquentant des lycées (159) et des collèges (33).
Mais les établissements secondaires ne sont pas les seuls concernés ; des femmes ont également été victimes de discrimination pour avoir porté des vêtements amples dans des centres de formation, à l'université, lors de missions de service civique et sur leur lieu de travail.
Bien qu'il s'agisse uniquement de robes, de jupes longues, de tuniques amples et de pantalons larges (et non de foulards), ces élèves ont été confrontées à des interrogations et à des humiliations de la part du personnel, selon le rapport.
Ainsi le CCIE ne manque pas de souligner dans son rapport que “l’islamophobie subie par les individus musulmans a été puissamment renforcée voire encouragée par l’État français”.