Après les écologistes et les communistes, le Parti socialiste (PS) a annoncé, malgré des tiraillements internes, rejoindre la "nouvelle union populaire écologique et sociale" emmenée par La France insoumise (LFI), le parti de gauche radicale de Jean-Luc Mélenchon, arrivé troisième au premier tour de la présidentielle avec près de 22% des voix.
La gauche espère ainsi obtenir une majorité parmi les 577 députés de l'Assemblée nationale et mettre un coup d'arrêt à la politique menée par le président centriste libéral, réélu le 24 avril pour un second mandat de cinq ans face à la candidate d'extrême droite Marine Le Pen.
"Nous voulons faire élire des députés dans une majorité de circonscriptions, pour empêcher Emmanuel Macron de poursuivre sa politique injuste et brutale et battre l'extrême droite", ont indiqué LFI et le PS dans un communiqué.
Assumant "des histoires différentes avec la construction européenne", les deux formations insistent sur leur objectif commun: "mettre fin au cours libéral et productiviste de l'Union européenne" en appelant à "ne pas respecter certaines règles" qui empêcheraient l'application du programme de la coalition.
Jean-Luc Mélenchon, qui veut transformer les élections législatives des 12 et 19 juin en "troisième tour" de la présidentielle, a demandé aux Français de "l'élire Premier ministre" "pour appliquer (son) programme".
L'instauration d'une cohabitation serait une première depuis l'entrée en vigueur du quinquennat en 2002, qui fait désormais coïncider l'année de la présidentielle et des législatives.
La gauche considère cette hypothèse, jugée peu plausible par les politologues, comme possible, estimant, contrairement à plusieurs études d'opinion, que M. Macron a été majoritairement réélu non par un vote de conviction mais pour faire barrage à l'extrême droite.
Risque de dissidence
Pour Gilles Candar, historien spécialiste des gauches françaises, l'union de la gauche "est un événement inédit et important" dans le sens où "les actuels accords reposent sur l'unicité de candidature dès le premier tour" des législatives.
Mais cet évènement ne "deviendra historique" que "s'il se concrétise", par "l'affirmation d'une nouvelle gauche unie et son arrivée au pouvoir, ou au moins son ancrage durable et profond dans la vie politique française", dit-il à l'AFP.
Sur le terrain, la base pourrait ne pas suivre. Comme à Vénissieux, près de Lyon (centre), où la maire communiste n'entend pas céder sa place au candidat LFI parachuté.
"Les communistes vont faire des efforts importants", a reconnu le dirigeant du Parti communiste français (PCF) Fabien Roussel. Mais "nous ne sommes pas du genre à remettre en cause un accord que nous signons et donc j'appellerai à le faire respecter", a-t-il assuré.
Au sein du PS, la situation s'annonce particulièrement épineuse pour le premier secrétaire Olivier Faure. Le maire du Mans (ouest) et ancien ministre Stéphane Le Foll s'est en effet dit prêt à "conduire la campagne" des dissidents du parti.
La réunion du Conseil national du parti prévue jeudi soir, qui doit approuver l'accord d'union, s'annonce tendue, notamment sur la question des 70 circonscriptions obtenues ou de l'UE.
Ce nombre est inférieur à celui obtenu par les écologistes d'Europe-Ecologie Les Verts (EELV) - une centaine dont une trentaine jugées gagnables - mais supérieur aux communistes - 50 dont 16 potentiellement gagnables.
L'ancien président socialiste François Hollande a de son côté indiqué mercredi au quotidien régional La Montagne, qu'il "récusait l'accord sur le fond et même sur les circonscriptions". Quant à l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, il a annoncé mercredi avoir mis à exécution sa menace de quitter le PS en cas d'accord avec LFI.
Pour le parti présidentiel, qui dispose actuellement d'une confortable majorité de 346 sièges, avec ses alliés centristes, l'onde de choc de cet accord parmi l'électorat et les figures de la social-démocratie pourrait lui permettre de gagner encore du terrain sur sa gauche, selon des analystes.