"Il s'agit de la plus importante refonte de la politique américaine à l'égard de Taïwan" depuis 1979, lorsque Washington a reconnu Pékin tout en acceptant de maintenir la capacité d'autodéfense de l'île, assurent les sénateurs Bob Menendez et Lindsey Graham, à la tête de cette initiative.
Leur projet de loi, adopté par la commission des Affaires étrangères du Sénat, prévoit une aide militaire directe à Taïwan de près de 4,5 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années.
Il exige aussi du président américain qu'il impose des sanctions aux principales institutions financières chinoises en réponse à toute "escalade dans les actes hostiles envers Taïwan".
Le "Taiwan Policy Act of 2022", tel qu'il est baptisé, prévoit par ailleurs d'accorder à l'île le statut d'"allié majeur hors Otan".
Le cabinet de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen a fait part jeudi de sa "sincère gratitude" envers les États-Unis qui, "une fois de plus, ont démontré leur amitié bipartisane et leur soutien à Taïwan".
Rapprochement significatif
Ce vote en commission n'est que la première étape d'un long processus législatif: le texte doit désormais être adopté en séance plénière au Sénat, puis à la Chambre, avant d'être promulgué par le président Joe Biden.
Mais il marque malgré tout un rapprochement significatif entre les États-Unis et Taïwan, à l'heure où les relations entre Pékin et Washington sont à leur plus bas depuis des décennies.
La Chine a fermement réagi jeudi. Une porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mao Ning, a dénoncé "un mauvais signal" qui soutient "les forces séparatistes militant pour l'indépendance" de l'île.
"S'il continue à être discuté, d'avancer ou s'il est au final adopté, ce projet de loi fera considérablement vaciller les fondements politiques des relations sino-américaines", ainsi que la sécurité régionale, a-t-elle prévenu devant la presse.
La Maison Blanche navigue sur ce dossier avec beaucoup de prudence.
"Nous continuerons à communiquer directement avec le Congrès sur ce texte", a indiqué mercredi, évasive, la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre.
Avant d'assurer que l'administration Biden "continuerait à approfondir son partenariat avec Taïwan avec un soutien diplomatique, économique et militaire fort".
Visite de Pelosi
Ce vote au Congrès intervient quelques jours seulement après la vente par Washington pour 1,1 milliard de dollars d'armes à Taipei, et un peu plus d'un mois après une visite à Taïwan de la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi, qui avait provoqué la fureur de Pékin.
La Chine avait alors lancé les plus importantes manœuvres militaires de son histoire autour de l'île.
Avant la visite de Mme Pelosi, numéro trois des États-Unis et plus haute responsable américaine à se rendre sur l'île depuis des décennies, l'entourage de Joe Biden avait déjà discrètement fait valoir à la Chine qu'elle ne représentait pas la politique de l'administration, le Congrès étant un pouvoir distinct du gouvernement.
La Chine estime que Taïwan, peuplé de quelque 23 millions d'habitants, est l'une de ses provinces, qu'elle n'a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise (1949).
En sept décennies, l'armée communiste n'a jamais pu conquérir l'île, laquelle est restée sous le contrôle de la République de Chine - le régime qui gouvernait jadis la Chine continentale et ne gouverne plus aujourd'hui que Taïwan.