"A 05H00 de Moscou (02H00 GMT), le redéploiement des unités de soldats russes sur la rive gauche du fleuve Dniepr a été achevé", a annoncé le ministère russe de la Défense, assurant n'avoir subi aucune perte, ni abandonné de matériel militaire.
Ce repli a tout du camouflet, Vladimir Poutine ayant revendiqué fin septembre, lors d'une cérémonie en grande pompe au Kremlin puis d'une fête sur la Place Rouge, l'annexion de quatre régions ukrainiennes, dont celle de Kherson.
Le président russe avait aussi prévenu qu'il défendrait "par tous les moyens" ce qu'il considère comme des territoires russes, brandissant ainsi à demi-mot la menace d'un recours à l'arme nucléaire.
Mais confrontée à une contre-offensive ukrainienne lancée à la fin de l'été, l'armée russe avait annoncé mercredi qu'elle abandonnait la partie nord de la région de Kherson, dont sa capitale éponyme, située sur rive droite du Dniepr, pour consolider des positions de l'autre côté de ce fleuve, une barrière naturelle.
En dépit de cette retraite, la zone reste "un sujet de la Fédération de Russie", a estimé vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Aucun "regret" russe
"Il ne peut y avoir aucun changement", a-t-il ajouté dans le premier commentaire de la présidence russe sur ce repli.
M. Peskov a ajouté que le Kremlin "ne regrette pas" sa cérémonie d'annexion de septembre, se refusant à tout autre commentaire sur cette retraite, la deuxième d'ampleur après le repli en septembre de la région de Kharkiv (nord-est).
La décision de se retirer dans le sud ukrainien est d'autant plus remarquable que Vladimir Poutine avait ordonné le 21 septembre la mobilisation de quelque 300.000 réservistes pour consolider justement les lignes russes en difficulté.
L'agence de presse d'Etat Ria Novosti a diffusé des images filmées de nuit de véhicules militaires russes quittant Kherson, indiquant qu'ils empruntaient le pont Antonovski enjambant le fleuve Dniepr.
Plusieurs correspondants russes ont indiqué que le viaduc a ensuite été détruit, sans dire si l'armée russe l'avait dynamité où s'il s'agissait du résultat de frappes ukrainiennes. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent cette infrastructure routière détruite.
L'Ukraine a pilonné des semaines durant ce pont, le seul de la cité de Kherson, sans pour autant le détruire, pour le rendre difficile à emprunter par les forces russes, coupant ainsi les lignes d’approvisionnements russes et forçant Moscou à décider du repli.
Une douzaine de localités du nord de la région de Kherson, sur la rive droite du Dniepr, ont déjà été reprises par l'armée ukrainienne, a annoncé Kiev jeudi.
L'état-major ukrainien s'est borné à dire vendredi matin que son offensive dans la journée "continuait" et que ses résultats seront communiqués "ultérieurement".
L'Ukraine s'est montrée ces deux derniers jours très prudente quant au repli russe de Kherson, craignant une feinte, où que l'armée russe ne mine toute la zone pour rendre le plus difficile possible le retour des forces ukrainiennes.
Réponse cynique
La Russie a en outre continué de mener des frappes à travers l'Ukraine, dont une partie de l'infrastructure énergétique a été détruite ces dernières semaines, entraînant des coupures d’électricité dans une large partie du pays, notamment à Kiev, la capitale.
Une frappe a encore visé, dans la nuit de jeudi à vendredi, Mykolaïv, cité du sud ukrainien à une centaine de kilomètres de Kherson.
Un immeuble d'habitation de cinq étages y a été entièrement détruit, faisant au moins sept morts, selon le chef de l'administration régionale, Vitaliï Kim, qui a dénoncé sur Telegram "une réponse cynique de l'Etat terroriste à nos succès sur le front".
Une journaliste de l'AFP sur place a pu voir un immeuble éventré et les secours avancer dans les décombres. Une pelleteuse déblayait les nombreux débris.
Sur le front de l'est, les combats continuent aussi de faire rage, en particulier à Bakhmout, une ville que Moscou tente de conquérir depuis l'été et principal champ de bataille où l'armée russe, appuyée par les hommes du groupe paramilitaire Wagner, reste à l'offensive.
Selon la présidence ukrainienne, quatorze civils ont été tués jeudi, huit dans la région de Donetsk (est) et six dans celle de Mykolaïv.