Affirmant vouloir "restructurer la démocratie", le général Juan José Zuniga, chef de l'armée de terre, et ses hommes ont avancé, mercredi, en rangs serrés dans les rues de La Paz jusque devant le palais présidentiel où ils ont positionné huit véhicules blindés et lancé des gaz lacrymogènes sur toute personne tentant de s'en approcher.
Après plusieurs heures d'occupation et une tentative d'entrer dans le bâtiment où se trouvait le président Luis Arce, le général s'est retiré avec ses troupes vers une caserne de la capitale où il a été arrêté.
Tentative de coup d’Etat
Au palais présidentiel, Luis Arce a destitué les rebelles et fait prêter serment à un nouveau commandement des forces armées, selon les images retransmises en direct par la télévision nationale.
"Nous sommes face à une tentative de coup d'Etat par des militaires qui salissent l'uniforme", a dénoncé le président durant la cérémonie.
Les militaires se sont retirés en début de soirée. M. Arce est alors apparu au balcon de son palais pour saluer ses partisans rassemblés par centaines sur la place, lançant : "personne ne peut nous enlever la démocratie que nous avons gagnée".
Le ministre du Gouvernement, Eduardo Del Castillo, a annoncé l'arrestation d'un deuxième responsable militaire, Juan Arnez Salvador, chef de la Marine, fustigeant, lors d'une conférence de presse, "deux militaires putschistes qui voulaient détruire la démocratie".
Les deux hauts gradés font l'objet de poursuites pour "soulèvement armé et terrorisme".
Avant son arrestation, le général Zuniga avait affirmé devant des journalistes avoir agi sur ordre du chef de l'Etat qui lui aurait demandé, dimanche, de "préparer quelque chose" pour rehausser sa cote de popularité.
Condamnation et préoccupation internationale
Les condamnations de l'action du général Zuniga, mercredi, ont afflué.
Le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'est dit "profondément inquiet" et l'Organisation des Etats américains (OEA) a averti qu'"aucune violation de l'ordre constitutionnel" en Bolivie ne serait tolérée.
Les Etats-Unis ont dit suivre "de près" la situation et appelé au calme. La Russie a condamné "fermement" la tentative de coup d'Etat. L'Espagne a appelé à 'respecter la démocratie et l'Etat de droit" en Bolivie.
La Turquie s'est déclarée très préoccupée par la situation et a espéré l'ordre démocratique, rapidement rétabli dans le pays. "Nous sommes profondément préoccupés par les informations faisant état d'une tentative de coup d'État contre le gouvernement bolivien élu", a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué.
Les dirigeants du Chili, de l'Equateur, du Pérou, du Mexique, de la Colombie ont appelé au respect de la démocratie. Le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, a écrit sur X : "Je suis un amoureux de la démocratie et je souhaite qu'elle prévale dans toute l'Amérique latine".
Le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a dénoncé une tentative de "coup d'Etat en Bolivie" orchestrée par "l'extrême droite avec un traître militaire".
Tensions avant les élections
En amont des élections de l'an prochain, les tensions n'ont cessé de croître en Bolivie, où l'ancien président Evo Morales entend se porter candidat face à Luis Arce, son ancien allié, avec pour conséquences une fracture au sein du Parti socialiste au pouvoir et une incertitude politique accrue.
Un grand nombre de Boliviens ne veulent pas d'un retour d'Evo Morales, qui était à la tête du pays entre 2006 et 2019, année pendant laquelle un vaste mouvement de contestation l'a forcé à quitter le pouvoir, laissant place à un gouvernement conservateur intérimaire. Luis Arce a ensuite remporté l'élection présidentielle en 2020.
Juan José Zuniga a, récemment, dit ne pas vouloir d'un retour d'Evo Morales et menacé d'empêcher toute démarche en ce sens de l'ancien dirigeant.