Les personnes sans abris après le cyclone ont été autorisées à s'abriter dans les écoles le temps qu'elles puissent reconstruire leur habitation / Photo: AFP (AFP)

La rentrée va se faire de manière progressive à Mayotte. Les classes qui ont des examens en fin d’année vont rentrer en priorité, et en fonction des locaux disponibles. Il va y avoir des rotations entre les classes, donc les élèves n’auront pas forcément cours à l’école tous les jours.

Sur 220 établissements scolaires que compte l’île, une quarantaine ont été complètement ravagés, mais tous les centres scolaires ont eu des dégâts ou des pillages. Deux tiers des salles peuvent fonctionner dans le premier degré (école primaire) mais pour les collèges et lycées, cinq établissements sont sérieusement endommagés.

Les enseignants ont fait leur rentrée administrative ce lundi 20 janvier et pendant toute la semaine, ils contactent leurs élèves pour savoir qui sera présent lors de la rentrée. Ils vont également collecter des informations pour savoir si leurs élèves ont besoin d’aide, de livres ou autres.

Anoura, professeur d’anglais au collège de Tsimkoura, est claire: “je ne suis pas prête à refaire cours, on ne sait pas où on va sur l’île et psychologiquement, je suis sûre que des professeurs vont craquer dans les semaines à venir.”

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Une quarantaine d’écoles ravagées à Mayotte

Malgré cet état d’esprit, elle s’active pour préparer sa rentrée. Avec trois autres collègues, elle a mis en place un protocole d’accueil des élèves. “Notre école n’a pas été vraiment endommagée. Le personnel d’entretien a remis en place la clôture qui avait été arrachée mais on se demandait tous comment accueillir les élèves lundi prochain.”

Elle a suivi une formation d’une journée pour préparer les professeurs à retrouver leurs élèves après un événement traumatique mais la formation était théorique, alors avec trois autres collègues, ils créent un protocole d’accueil. “En collectant des kits d’accueil post-Covid et confinement, on a choisi les mots clés, écoute, empathie, connexion. On va travailler sur la libération des émotions, leur verbalisation. On va faire des dessins, ou des exercices pour les aider à exprimer ce qu’ils ressentent.”

Une grève illimitée et des professeurs un peu perdus

“Personne n’est prêt à rentrer”, affirme Anoura. Certains professeurs sont encore fragiles, ajoute l’enseignante, mais “on a envie d’attendre pour accueillir les élèves dans de meilleures conditions et en même temps; on a besoin d’un retour à la normale.” Dans son établissement, certains professeurs ne sont pas encore rentrés de métropole et cela complique aussi l’organisation de la journée du 27 janvier.

Plusieurs syndicats enseignants appellent à une grève illimitée car, selon eux, les établissements ne sont pas encore assez sûrs. 40% des écoles et bâtiments scolaires ont été endommagés lors du cyclone Chido.

Bruno Dezile est secrétaire général du syndicat CGT educ’action, son organisme est le seul à ne pas appeler à la grève. “On laisse le choix à nos adhérents, il y a des professeurs qui n'étaient pas présents lors du cyclone et sont prêts à travailler mais d’autres ont tout perdu. Et il y a un effet en décalé de ce cyclone, certains réalisent juste aujourd’hui qu’ils n’ont plus rien. Des élèves par exemple appellent en disant je n’ai plus de manuels, plus de sacs.”

Bruno Dezile estime que cette rentrée sera la pire qu’il a connue. “C’était déjà des conditions difficiles avant le cyclone mais maintenant, il faut carrément reconstruire des classes.”

Cette rentrée scolaire, c’est aussi une mauvaise nouvelle pour les sans-abris. Après les destructions occasionnées par le cyclone, les écoles mahoraises ont servi d’abri pour ceux qui n’avaient plus de toit. Depuis deux semaines, la préfecture a indiqué qu’ils devaient quitter les écoles pour permettre le retour en classe des élèves mais aucune solution alternative ne leur a été proposée. “Les Mahorais qui avaient perdu leur toit ou dont le banga (abri en tôle) avait été emporté sont rentrés petit à petit chez eux. Les sans-abris eux ont été remis à la rue,” déplore Bruno Dezile.

La rentrée va offrir un retour à la normale pour les élèves, mais rien n’est encore normal à Mayotte. L’électricité n’est pas rétablie partout, l’eau en bouteille est difficile à trouver, l’aide envoyée depuis la métropole n’atteint pas tout le monde. C’est donc une rentrée scolaire anormale dans un département complètement détruit par le cyclone du 14 décembre 2024.

TRT Francais