Le distributeur Auchan et le géant du pneu Michelin ont annoncé à eux deux plus de 3.600 suppressions d'emplois en France / Photo: AFP (AFP)

Auchan, qui emploie plus de 150.000 personnes dans 12 pays, prévoit de supprimer 2.389 emplois sur 53.000 en France, via notamment la fermeture d'une dizaine de magasins. Michelin a lui annoncé la fermeture en 2026 de deux usines dans l'ouest, à Cholet et Vannes, où travaillent 1.254 salariés.

"C'est catastrophique. Ça va laisser beaucoup, beaucoup de salariés dans la difficulté, de familles. C'est choquant, scandaleux", s'est indigné Franck Martineau, délégué syndical FO chez Auchan Retail.

Dans l'usine Michelin de Cholet, "ils ont mis les 900 salariés dans une salle comme des vaches à l'abattoir et annoncé que c'était fini", a réagi Morgane Royer, depuis "bientôt 10 ans" chez Michelin et déléguée du syndicat SUD.

"Version voyou du capitalisme"

"C'est la version voyou du capitalisme", a condamné devant les salariés le maire de droite de la ville, Gilles Bourdouleix.

"Aujourd'hui, on ferme deux sites et on met plus de 1.200 salariés au chômage pour que Michelin fasse plus de bénéfices et donne plus de dividendes à ses actionnaires", a protesté le délégué syndical central CGT, Romain Baciak.

Michelin avait déjà fortement réduit son empreinte en France, son premier pays. Il aura fermé six usines en vingt ans.

Le géant des pneumatiques, qui conteste à Bridgestone le titre de premier constructeur mondial, prépare aussi la fermeture d'ici 2025 de deux usines en Allemagne.

Malgré les justifications par les deux groupes français des difficultés économiques qu'ils traversent, et leurs promesses de reclassements des salariés concernés, le gouvernement français est rapidement monté au créneau.

Ces suppressions d'emplois sont "évidemment éminemment préoccupantes", a déclaré le ministre de l'Economie et de l'Industrie, Antoine Armand.

"Echec de Macron"

Pour Auchan, l'Etat s'assurera "que la priorité de cette transformation est bien l'emploi", et pour Michelin il "aura une vigilance extraordinairement forte" quant au reclassement de "l'ensemble des salariés" affectés, a dit M. Armand.

"J'ai le souci de savoir ce qu'on a fait dans ces groupes de l'argent public qu'on leur a donné", a déclaré peu après, devant l'Assemblée nationale, le Premier ministre Michel Barnier.

"Je veux le savoir. Et donc nous allons poser des questions et nous verrons si cet argent a été bien ou mal utilisé pour en tirer les leçons", a-t-il développé.

Il a notamment dit être "en désaccord" avec la décision de Michelin, dont il avait rencontré le PDG "il y a quelques jours", de fermer ses deux usines.

Ces annonces interviennent dans une conjoncture déjà dégradée pour l'emploi en France, notamment dans l'industrie, avec une multiplication des plans de licenciements.

Le syndicat CGT a recensé "180 plans de licenciements", carte du pays à l'appui, qui concernent "en termes d'emploi direct et indirect autour de 100.000 salariés", avait déclaré le 18 octobre sa numéro un, Sophie Binet.

La deuxième centrale syndicale française avait notamment pointé les difficultés des filières automobile, chimie, verre et céramique.

C'est le résultat de "l'échec total de la politique de l'offre" du président Emmanuel Macron, avait estimé Mme Binet.

"Nous devons créer ou recréer de l'emploi industriel, comme maintenir l'emploi agricole dans notre pays", a affirmé pour sa part mardi le chef du gouvernement.

M. Barnier a évoqué pour cela la création début 2025 d'un "livret d'épargne industriel", ainsi que des "réponses européennes" avec "moins de naïveté" face à la concurrence étrangère "pas toujours loyale".

En Europe, c'est l'ensemble du secteur automobile qui souffre d'un marché en berne et de la forte concurrence de marques asiatiques.

AFP