La semaine dernière, des athlètes du monde entier se sont rendus à Paris, capitale d'un pays que l'on pourrait prendre pour un phare de la démocratie. Mais personne n’est dupe. Nous savons que la France est une ancienne superpuissance coloniale qui a mal vieilli. Un pays qui croit en l'élitisme de la "francité" qui n'est qu’une illusion.
Mais c'est précisément cette folie des grandeurs qui est à l'origine des politiques racistes et xénophobes que le pays impose à ses citoyens. Les athlètes françaises musulmanes ne sont pas autorisées à porter un couvre-chef dans le village olympique ou pendant les compétitions. Pourquoi ? Parce que la France a échoué dans son projet colonial.
Si seulement la France était un pays humble, elle regarderait le reste du monde et écouterait, regarderait et apprendrait. Mais alors que le monde se présente à sa porte, la France va rester repliée sur elle-même et risque de rater l'événement dans son intégralité.
Pour ajouter l'insulte à l'injure, Israël a été autorisé à porter fièrement son drapeau au milieu d'un génocide qu'il est en train de perpétrer, tandis que les athlètes russes et biélorusses concourront, à juste titre, sous des bannières neutres parce que leurs dirigeants ont enfreint le droit international.
Ces hypocrisies ne sont ni nouvelles ni choquantes. Depuis des siècles, les puissances coloniales exercent leur soi-disant pouvoir politique là où elles l'entendent, utilisant les médias comme un outil stratégique à leur service. La réalité n'est pas différente en France, aujourd'hui abreuvée de chaînes d'information en continu qui, selon les experts, ne délivrent que 13% de l'information réelle. Des commentateurs triés sur le volet donnent frénétiquement leur avis dans des studios aux listes d'invités déséquilibrées, crachant des idées racistes et offensantes. C8, l'une des chaînes du groupe Bolloré, a récemment été condamnée à une amende de 7,6 millions d'euros à cause d'un animateur trop zélé.
“La menace de l'islam”
Pourquoi les commentateurs s'affolent-ils autant, se demande-t-on ? Au centre de toutes les cibles médiatiques se trouve l'islam, une religion que la République a jugée incompatible avec ses valeurs. La France insiste sur le fait que l'islam est une religion étrangère qui constitue une menace pour la nation, qu'elle est sur le point d'attaquer la société française et que la présence de ses adeptes constitue une atteinte à la République.
Une grande partie de l'appareil médiatique français, sous la houlette de ces chaînes d'information privées, a dénigré l'islam et les musulmans distillant un venin constant. L'islamophobie sans bornes a été la norme dans les médias français, et il n'est donc pas surprenant qu'elle se soit répandue dans la société.
Le voile a été interdit dans les écoles publiques en 2004. Plus récemment, en 2023, l'abaya -une longue robe pudique- a également été interdite dans les écoles publiques. Les tenues de piscine pudiques, souvent appelées "burkinis", ont également été interdites. Une loi a été proposée pour interdire aux mères qui portent des hijabs de participer aux voyages scolaires avec leurs enfants. Les fédérations sportives françaises de football et de basket-ball ont interdit aux athlètes féminines de participer si elles portent le hijab. Haïfi Tlili, sociologue, chercheur et cofondateur de l'association Basket pour toutes, a déclaré à propos des femmes musulmanes françaises pratiquant l'athlétisme : "Elles sont invisibilisées et déshumanisées".
Au nom d'une interprétation extrême de la laïcité, la société française est devenue très douée pour la stigmatisation. L'objectif est double : d'une part, la population musulmane devient le paratonnerre utilisé par les politiciens pour promouvoir leur nouvel esprit nationaliste républicain. D'autre part, c'est un moyen pour les laissés-pour-compte de se sentir à leur place dans le projet français. "Si les Arabes et leur islam sont si mal lotis, je ne dois pas être au fond du trou. En plus, je peux toujours les détester".
De vraies couleurs
La réalité, c'est que la France est en pleine crise politique. Après que le président Emmanuel Macron et son gouvernement ont perdu les élections européennes face au parti d'extrême droite du Rassemblement national, Macron a dissous l'Assemblée nationale, ce qui a déclenché une élection législative immédiate.
Lors de ces élections, le parti du Rassemblement national a remporté le premier tour avec 33,21% des voix. Le week-end suivant, pas moins de 25 sondages donnaient le parti du Rassemblement national vainqueur de cette élection avec la majorité absolue. La semaine suivante, les masques sont tombés et la France a révélé son répugnant visage raciste. Des bigots décomplexés et sûrs d'eux ont laissé libre cours à leur langue dans les médias et dans la rue avec un racisme inouï en tout genre.
L'islamophobie sans bornes a été la norme dans les médias français, et il n'est donc pas surprenant qu'elle se soit répandue dans la société.
La victoire d'un parti fondé par des collaborateurs de la Seconde Guerre mondiale et des sympathisants nazis convergeait vers les dirigeants français. Certains Français d'origine non blanche ont été agressés physiquement, tandis que d'autres ont craint pour leur avenir dans le pays. La rhétorique était plus que toxique. On pourrait dire que le racisme en France a pris sa forme définitive.
Dans un retournement de situation dramatique, déguisé en manœuvre électorale, la gauche et le centre ont réussi à bloquer le vote d'extrême droite en retirant respectivement leur troisième candidat dans les circonscriptions où les élections se déroulaient à trois voix. La coalition de gauche composée des Verts, des communistes, des socialistes et de "La France insoumise" rebaptisée "Le Nouveau Front Populaire (NFP)" a remporté le plus grand nombre de sièges au second tour et a empêché le parti d'extrême droite de l'emporter.
Bien que la droite n'ait finalement pas réussi à s'imposer lors des élections, M. Macron a montré, par son pari, qu'il était prêt à compromettre le bien-être de la population au profit de ses propres ambitions.
La France, en tant que nation, est depuis longtemps fière de sa mission au service de son peuple. Du moins, c'était le cas auparavant. Avec Emmanuel Macron à la barre du navire, il est clair que tous les progrès réalisés par la France pour s'établir en tant que démocratie se sont effondrés.
Changement d'objectif
Récemment, l'utilisation de la troisième section de l'article 49 de la Constitution française a suscité des critiques, des protestations et même des émeutes devant la porte de Macron et ce, à juste titre. Cet article permet au gouvernement de contourner le parlement et de forcer l'adoption d'une loi, sans qu'un vote soit nécessaire.
En recourant à des mesures controversées comme celles-ci (pour faire passer une loi sur le report de l'âge de la retraite), Macron nous donne un aperçu effrayant de la psyché interne du gouvernement qu'il a mis en place : un régime qui privilégie l'opportunisme politique et la mise en œuvre rapide de réformes impopulaires plutôt que les processus démocratiques et le consensus public.
Après la défaite du parti de M. Macron lors d'une élection parlementaire européenne mineure, il n'a pas eu besoin de dissoudre l'Assemblée nationale. Certains affirment que cette décision a été prise pour détourner l'attention de cette défaite évidente ; une dissolution spectaculaire aurait empêché les médias d'analyser cette déconfiture. Pourtant, après cette dissolution, il a subi un autre fiasco avec la victoire de la coalition de gauche.
Ce désir de toujours gagner pousse Macron à déplacer le poteau de but chaque fois qu'il en a l'occasion afin de ne pas perdre. Le problème, c'est qu'on ne joue pas avec la volonté du peuple. Son propre parti a ainsi perdu 84 sièges. Néanmoins, il a pivoté, affirmant que la gauche avait besoin d'une majorité absolue pour former un gouvernement. Une majorité absolue que son propre parti centriste n'avait pas en 2022 lorsqu'il a nommé un nouveau premier ministre.
C'est un jeu dangereux dans un pays où l'arbitraire avait conduit à une révolution sanglante. Le peuple se révolte lorsque l'État, dans son arrogance, choisit de réprimer ceux qui luttent pour la justice. Nous l'avons constaté de manière constante lors des interdictions des rassemblements et des manifestations en faveur de la Palestine dans la capitale française.
Le voile colonial se lève ; le peuple ne sera plus réduit au silence ni manipulé par l'élite dirigeante. Les Jeux olympiques en témoignent, avec des athlètes et des supporters portant des drapeaux palestiniens en guise d'actes de résistance, notamment les nageuses olympiques Valerie Tarazi et Yazan al-Bawwab.
Ces jeunes gens sont ceux qui honorent encore le credo de cette nation : Liberté, Égalité, Fraternité. Tous les fils et filles contre lesquels l'élite dirigeante française se bat -ceux qui sont privés de leurs droits, marginalisés et ciblés- sont en fait les mieux armés pour affronter ce nouveau monde. Puissent-ils prospérer et réussir.