Dans un rapport publié ce jeudi 16 juin 2022, la section française de l’Observatoire international des prisons (OIP) dresse un bilan sévère de l’état des conditions de détention en France.
Le rapport, élaboré avec Amnesty International, juge "inefficace les mesures prises par les pouvoirs publics".
Rappelant que le 30 mai 2020, l'État français était définitivement condamné par la Cour européenne des droits de l’homme pour l’indignité de ses prisons et sommé de prendre des mesures pour mettre un terme à la surpopulation carcérale, l’OIP et Amnesty International appellent à "la mise en place en urgence d’un plan national d’action pour atteindre cet objectif".
Selon les chiffres établis par l’OIP, en mai 2022, 71 038 personnes étaient détenues en France avec un taux d’occupation moyen en maison d’arrêt de 138,9%.
Le rapport intitulé "Dignité en prison. Quelle situation deux ans après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme ?" montre ainsi "les conséquences de cette surpopulation carcérale dans les maisons d’arrêt".
Selon le rapport, "la promiscuité, le manque d’intimité, la non-séparation des différentes catégories de détenus, l’augmentation des tensions et violences" sont les principaux problèmes.
De même, l’OIP fait "état de conditions de vie dégradées et indignes dans des établissements pénitentiaires dont une proportion importante est vétuste et insalubre."
Détérioration des conditions
Le rapport révèle aussi "la détérioration importante des conditions de prise en charge des personnes détenues, les carences en matière d’offre d’activité et de travail, de préparation à la sortie, de prise en charge sanitaire, et les conséquences sur l’insertion ou la réinsertion".
Toujours selon le rapport, cette situation s’aggrave à cause de "la surpopulation des prisons et deux ans de crise sanitaire" et juge que "les effets sont venus bouleverser le quotidien des personnes détenues et de leurs proches".
"Faute d’une politique volontariste, le nombre de prisonniers n’a cessé de croître dès la fin du premier confinement en juin 2020", observe l’OIP qui rappelle que même si "des réformes ont été engagées, elles passent largement à côté des facteurs à l’origine de l’inflation carcérale".
Jugeant les décisions politiques "coûteuses et inefficaces", l’OIP "déplore également l’impuissance des tribunaux à obtenir de l’administration qu’elle exécute les injonctions qui lui sont faites, alors que se multiplient les décisions de justice constatant l’indignité des conditions de détention et exigeant que soient prises en urgence des mesures pour y mettre un terme".
Respect des droits
Se voulant optimiste à cause de "la nouvelle séquence politique", le rapport note qu’il y a "urgence à ce que les pouvoirs exécutifs et législatifs assurent enfin le respect des droits fondamentaux en prison".
Appelant à "un plan national d’action contre la surpopulation des prisons incluant notamment la mise en place d’un mécanisme contraignant de régulation carcérale", l’OIP et Amnesty International "demandent une révision des priorités budgétaires et une réorientation des budgets alloués à l’accroissement du parc carcéral, qui devraient plutôt être affectés à l’amélioration des conditions de détention et au renforcement des alternatives à l’incarcération".
Pour rappel, à l’automne 2022, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe examinera à nouveau les mesures prises par la France en application de ses recommandations et de celles de la CEDH.