Soutien à la CPI
Dans le cadre de célébrations pour le 76e anniversaire d'Israël et les 75 ans des relations franco-israéliennes, le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, était invité, mardi, à une soirée organisée par l'ambassade d'Israël à Paris, avec notamment la présence de son homologue israélien, Israël Katz.
Mais cette soirée, prévue pour se dérouler dans une atmosphère cordiale et diplomatique, avait été planifiée avant la demande, lundi, par le procureur de la CPI d’un mandat d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, et son ministre de la Défense, Yoav Galant.
Immédiatement, la France avait affirmé soutenir la décision de la Cour, “son indépendance, et la lutte contre l'impunité dans toutes les situations”. Ce qui a provoqué l’ire du ministre israélien, le soir même.
Après l’introduction de l'ambassadeur israélien à Paris, Joshua Zarka, accueilli avec calme par l'assistance, l’atmosphère change rapidement lorsque Stéphane Séjourné monte à la tribune pour prendre la parole.
"Manière peu diplomatique”
Dès le début de son discours, un vacarme de mécontentement se fait entendre et Stéphane Séjourné sent rapidement la montée de l'hostilité dans la salle à son égard, perturbant ainsi son allocution.
Selon des journalistes de l’Express, deux femmes présentes se retournent et écoutent le discours du ministre français dos à la tribune, en signe de protestation.
Malgré ses tentatives de rassurer l'assemblée en réaffirmant le soutien de la France à Israël, Séjourné s'arrête quand il perçoit un brouhaha de plus en plus croissant et demande : "Vous ne m'entendez pas ?”.
Des rires accompagnés de railleries envahissent la salle, quand plusieurs personnes lui lancent : "Si, et c'est bien ça le problème…”
Après un discours bref et perturbé, Séjourné a cédé la tribune à Israël Katz. Le ministre israélien a immédiatement attaqué la décision de la CPI, qualifiant la demande de mandats d'arrêt de "scandaleuse" et “d’attaque frontale effrénée contre les victimes du 7 octobre”.
Katz s’est ensuite tourné vers son homologue français et l’a exhorté d’une “manière peu diplomatique”, précise l’Express, à dénoncer publiquement cette décision, recevant des applaudissements acharnés de l'audience.
"Je me tourne ici vers mon ami le ministre français des Affaires étrangères. Face à cette proposition honteuse et scandaleuse du procureur général, votre soutien et celui du gouvernement français sont essentiels. Il est important que vous énonciez haut et fort que la proposition du procureur général est honteuse et scandaleuse, et donc inacceptable pour vous et pour le gouvernement français", a-t-il martelé.
"On comprend pourquoi Macron s'est envolé pour la Nouvelle-Calédonie ce soir, il a eu peur en voyant le ministre israélien arriver à Paris", aurait ensuite raillé un élu de l’opposition présent dans la salle.
Après les discours des deux ministres, Stéphane Séjourné a été publiquement interpellé par Alexandra Barouche, une élue Les Républicains, critiquant les condoléances de la France à l'Iran après la mort du président Raïssi et le soutien de Paris à la Cour pénale internationale.
Grand écart diplomatique
La France ne cesse de multiplier des positionnements contradictoires quant à sa politique extérieure depuis le 7 octobre.
Mardi, le député LFI Thomas Portes a critiqué sur X, une "poignée de main de la honte" entre le ministre français et son homologue israélien.
Alors que la France a soutenu la CPI après la demande de mandat d'arrêt contre Netanyahu, elle a estimé, après la reconnaissance de l’Etat de Palestine par des pays européens, pour sa part, que “les conditions ne sont pas réunies” et que ce n’est pas le “bon moment”.
D’autre part, la France a à plusieurs fois appelé à un cessez-le-feu à Gaza et évoqué la possibilité d’imposer des sanctions contre Israël, tout en poursuivant ses livraisons d’armes.
Tandis que le président Macron affirmait en novembre dernier que "de facto, aujourd'hui, des civils sont bombardés. Ces bébés, ces femmes, ces personnes âgées sont bombardés et tués. Il n'y a aucune justification et aucune légitimité à cela. [Nous] exhortons donc Israël à arrêter", le Premier ministre Gabriel Attal considérait pour sa part que l’armée israélienne n’avait “pas de leçon de morale à recevoir.”
On peut se demander si cette ultime humiliation de la France par Israël n’est pas une conséquence de sa politique de grand écart sur le plan diplomatique.
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