Woerth, ancien ministre et député de l'Oise, aurait supervisé la circulation de fonds en espèces non déclarés, soulevant des interrogations sur l'origine et l'utilisation de ces sommes.
“Conservé dans un coffre”
Selon les enquêteurs, près de 250 000 euros en grosses coupures auraient circulé au sein de l'équipe de campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.
Cet argent aurait été employé pour régler divers frais, dont des salaires et des primes. Interrogé à la barre, Éric Woerth a contesté toute irrégularité et assuré que ces fonds provenaient de dons anonymes et non d'un financement occulte.
"Nous avons respecté les plafonds de la campagne, je le dis et je l'affirme", a-t-il déclaré. Il précise que ces sommes correspondaient à "une dizaine de dons anonymes, envoyés ou déposés", d'un montant total de 35 000 euros, reçus entre janvier et avril 2007.
Cependant, cette justification laisse perplexe la présidente du tribunal, qui rappelle que de tels dons en espèces sont strictement interdits par la loi sur le financement des campagnes électorales.
De plus, l'absence de tout registre ou trace comptable suscite de nombreuses interrogations.
Woerth a toutefois précisé que cet argent n'avait pas été utilisé pour la campagne mais avait été conservé dans un coffre dans son bureau.
"Cet argent était disponible, mais il n'a pas été utilisé pendant la campagne", a-t-il affirmé.
Un argument qui peine à convaincre, d'autant que la présidente du tribunal s'interroge sur la finalité: ces fonds devaient-ils être utilisés après la campagne, à d'autres fins ?
“Hypothèse”
Face à ces accusations, Éric Woerth et son avocat, maître Jean-Yves Le Borgne, ont adopté une stratégie de contestation des conclusions de l'enquête menée en 2017 par l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF). L'avocat a qualifié les constatations des enquêteurs de simples hypothèses dépourvues de preuves concrètes.
"Je pense que vous avez perçu que les anomalies dans les dépenses dans la campagne de 2007 ne sont pas des constats objectifs, mais des hypothèses, des conclusions liées à des travaux de reconstruction, à des comparaisons avec ce qu'a pu coûter un meeting en 2012", a-t-il expliqué devant le tribunal.
Maître Le Borgne va plus loin en affirmant que ces soupçons de circulation massive d'espèces pourraient être une manœuvre pour étayer une autre hypothèse plus large, celle d'un financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy.
"Des espèces auraient été utilisées, reste à prouver que ces hypothèses ne sont pas seulement une tentative de justifier une autre hypothèse, celle du financement libyen", a-t-il déclaré.
Un autre point de désaccord avec l'accusation concerne l'emploi du terme "reliquat" pour désigner les sommes en liquide. La présidente du tribunal a relevé que cette terminologie sous-entendait l'existence d'une réserve d'argent importante liée à la campagne.
Or, pour Éric Woerth, cette somme en espèces était insignifiante par rapport au budget global de la campagne.
"Je n'étais pas obnubilé par ça, c'est une part minime des dépenses, on allait dépenser 20 millions d'euros", a-t-il déclaré.
Ce procès intervient dans un climat judiciaire déjà lourd pour les anciens cadres de l'UMP. La question du financement illégal des campagnes présidentielles de Nicolas Sarkozy est au centre de plusieurs enquêtes, notamment celle sur un possible financement libyen.
Le procès en cours devrait se poursuivre jusqu'au 10 avril. Éric Woerth sera entendu une seconde fois par le tribunal lundi prochain.