Hanovre, Limbourg, Paris
La tension monte dans plusieurs villes européennes alors que des partisans du PKK multiplient les actions violentes visant la communauté turque.
En Allemagne, le consulat général de Turquie à Hanovre a été la cible d'une attaque menée par des affidés du PKK.
Bien que l'attaque n'ait pas fait de victimes, elle a mis en évidence la nécessité pour les autorités allemandes de prendre des mesures fermes pour assurer la sécurité des missions diplomatiques et des citoyens turcs dans le pays.
Le ministère turc des Affaires étrangères a exhorté les autorités allemandes à traduire rapidement les coupables en justice et à empêcher toute provocation ultérieure contre la communauté turque en Europe.
Pendant ce temps, en Belgique, des équipes de police ont été dépêchées dans la province du Limbourg pour contenir une altercation provoquée par des sympathisants du PKK.
Les provocations ont dégénéré en affrontements avec la communauté turque locale, entraînant des véhicules incendiés et nécessitant l'intervention des forces de l'ordre, qui ont dû faire usage de canons à eau pour rétablir l'ordre.
Yasin Gul, maire adjoint de Heusden-Zolder, a exprimé son choc face à cette escalade de violence dans une municipalité où un quart de la population est d'origine turque.
"Nous vivons ici en tant que Turcs d'Europe occidentale depuis 60 ans. Nous n'avons jamais eu un tel incident dans notre municipalité auparavant", s’est-il indigné.
En France, l'aéroport Charles de Gaulle à Paris a été le théâtre d'une autre attaque perpétrée par des sympathisants du PKK. Les membres du personnel de Turkish Airlines ont été pris pour cible et plusieurs agents de sécurité ont été blessés lors de l'incident.
Cette attaque est survenue dans le contexte de la tentative d'extradition d'un membre du PKK vers la Turquie.Plusieurs élus français ont également participé au rassemblement.
Marianne Margaté, sénatrice de Seine-et-Marne du groupe CRCE (Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste), Pierre Barros, sénateur du Val d’Oise du groupe CRCE, Raphaëlle Primet, co-présidente du groupe communiste au Conseil de Paris, et Annie Gafforelli, adjointe à la mairie du 20e arrondissement de Paris, figuraient parmis les élus présents lors des violences commises par les partisans du PKK au sein de l'aéroport.
Face à ces incidents, le ministère turc des Affaires Étrangères a appelé les pays concernés “à empêcher les actions des partisans de l'organisation terroriste et à traduire en justice les personnes coupables de violences le plus rapidement possible”.
Les violences du PKK à Paris
Mais ce n’est pas la première fois que le PKK se livre à des violences en France.
Fin 2022, des sympathisants du PKK ont commis des actes de vandalisme et d’agressions inouïs au cœur même de Paris, prétextant une fusillade commise par un homme de 69 ans contre des partisans de l’organisation terroriste dans un centre associatif du 10e arrondissement de Paris, faisant trois morts et trois blessés.
Des centaines de membres de groupuscules proches du groupe terroriste ont alors investi les rues de Paris et brûlé des poubelles, établi des barricades, détruit les vitrines, les trottoirs de la ville et lancé des projectiles sur les forces de l'ordre alors que plusieurs d'entre eux, munis de bâtons et autres armes manuelles, ont violemment attaqué les policiers.
Six policiers avaient été blessés, à la suite de ces violents affrontements.
Disparitions de deux jeunes femmes
Même si rares sont les mesures, en avril 2023, la justice française avait tout de même jugé 11 cadres du PKK pour “financement du terrrorisme”.
Les enquêteurs estimaient que la France, comme l'Allemagne ou les Pays-Bas, sont bien des "bases arrières" où des "cellules clandestines" très hiérarchisées s'emploient à "mobiliser" la communauté kurde (120 à 150.000 personnes en France, 100.000 aux Pays-Bas, 1 million en Allemagne).
L'enquête avait débuté en 2020 avec deux signalements pour "disparitions inquiétantes" dans le sud-est de la France et, à quelques mois d'écart, de deux femmes âgées de 18 et 19 ans.
La piste d'un "recrutement" du PKK pour rejoindre des "camps de formation" en Europe s'est rapidement dessinée. Elle a permis aux enquêteurs d'identifier un réseau actif dans la région, à travers une association à Marseille (sud-est), chargée notamment de collecter l'impôt révolutionnaire, la "kampanya", principale source de financement du PKK.
La contribution, collectée une fois par an, est fixée arbitrairement par les "collecteurs" en fonction des revenus estimés de chacun. Au fil des ans, la justice s'est régulièrement intéressée à eux.
Pour lui échapper, ils prennent désormais des précautions: les mots "kampanya" ou "PKK" ne sont pas prononcés au téléphone, on prévient plutôt qu'on passe "boire un café".
Si certains paient l'impôt par conviction idéologique et "adhésion totale" au PKK, note l'enquête, "beaucoup" le vivent "comme une obligation" et n'osent s'y soustraire "par peur" de la réprobation de la communauté mais aussi de représailles en cas de non-paiement -un témoin a rapporté qu'on avait menacé de lui "casser les jambes".
Pour la "zone sud-est" de la France, le montant annuel collecté a été estimé à deux millions d'euros. Les enquêteurs se sont aussi intéressés aux techniques de "recrutement" de jeunes personnes, parfois "brutalement extraits de leur famille", dans des conditions "proches de l'enlèvement et de la séquestration".
Ces recruteurs "quadrillent" le territoire français pour tenter de convaincre de jeunes personnes de rejoindre d'abord un camp de "formation idéologique" en Europe.
Ceux qui persévèrent sont ensuite envoyés dans des camps d'entraînement, militaires cette fois, souvent en Irak, avant d'être intégrés au groupe terroriste.
“Une menace pour la France”
Dans une interview exclusive à TRT, Charles Saint-Prot, expert en relations internationales, a accusé le gouvernement français de complicité dans les activités du PKK.
"Il faut savoir ce que l’on veut ; s’il on veut combattre le PKK, si l’on veut mettre fin au trafic, aux activités, il faut prendre des mesures. Or le gouvernement français ne prend aucune mesure, parce qu'il est complice", a affirmé M. Saint Prot.
Il a ajouté que le PKK bénéficie de sympathie en Europe depuis l’assassinat d’Olof Palme, et a pointé du doigt l’aveuglement de certains Européens concernant ce groupe terroriste, reconnu comme tel par l’Union européenne et les États-Unis.
"Il faut que les Européens comprennent que le PKK ne représente pas les Kurdes. En réalité, les Kurdes sont des Turcs comme les autres, ils veulent vivre en paix et dans la tranquillité", a-t-il expliqué.
M. Saint Prot a également critiqué la position du gouvernement français vis-à-vis du terrorisme en Turquie, affirmant qu’il encourage indirectement le PKK en ne prenant pas de mesures fermes contre ses activités sur son sol, qui représentent également une menace pour la France.
“Le PKK représente une menace pour la France. Et je pense que le gouvernement français est blâmable dans cette affaire. C’est bien beau de prétendre combattre le terrorisme alors qu’on l’encourage en Turquie” a-t-il dénoncé.
L’expert en relations internationales a, ensuite, conclu son analyse en qualifiant le séparatisme de "fléau des temps modernes" et en appelant à sa lutte. En dernier ressort, il a, cependant, exprimé des doutes quant à l'action du président français Emmanuel Macron dans ce domaine, l'accusant également de complicité.