Des chiffres qui tombent à point nommé, alors que le président Emmanuel Macron entame son second mandat. Quelque 19 % des Français âgés entre 18 et 49 ans déclarent avoir subi “des traitements inégalitaires ou des discriminations” en 2019-2020, contre 14 % en 2008-2009.
D’après le rapport de l’enquête "Trajectoires et Origines" de l'Institut national de la statistique (Insee) et l'Institut national d'études démographiques (Ined), menée auprès de 27 200 personnes de juillet 2019 à novembre 2020, le sentiment de discrimination augmente en France, surtout chez les femmes.
Selon le rapport, en 10 ans, le pourcentage des personnes ayant déclaré avoir subi une discrimination a augmenté de 5 points. A la question: “Au cours des cinq dernières années, pensez-vous avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations?”, 14 % de la population de 18 à 49 ans en 2008-2009 avait répondu “souvent” ou “parfois”. Dix ans plus tard, en 2019-2020, cette proportion est passée à 19 %.
Aux origines de la ségrégation
Parmi les hommes disant avoir été victime d'un traitement inégalitaire en 2019-2020 58% disent l’avoir été en raison de l’origine, de leur nationalité ou de leur couleur de peau, devant l’âge (11%) et le lieu de résidence (10%).
En dix ans, l’augmentation du sentiment de discrimination est davantage marquée pour les femmes que pour les hommes. Chez les femmes, elles sont 21% à rapporter des discriminations, contre 14% dix ans plus tôt quant aux hommes, cette part est passée de 13% à 16%.
Le sexisme, thème qui a pris beaucoup d’ampleur ces dernières années, représente la première source des discriminations déclarées par les femmes. Parmi les femmes disant avoir été victime d'un traitement inégalitaire en 2019-2020, 46% disent l'avoir été en raison de sexe contre 28% en 2008-2009. L’origine, la nationalité et la couleur de peau viennent en deuxième place avec 32% suivi par l’âge qui représente 15%.
Les immigrés particulièrement touchés
La part des immigrés et de leurs descendants déclarant avoir subi des discriminations est de 27% soit près de deux fois plus importante que chez les personnes sans ascendance migratoire qui est de 15%.
En 2019-2020, 22 % des immigrés et 20 % des descendants d’immigrés estiment avoir été victime de discrimination en raison de leur origine.
Dans le détail, c'est parmi les populations originaires d'Afrique subsaharienne que les taux sont les plus élevés avec 41%. Suivent les enfants d'immigrés maghrébins avec 37% et les descendants d'immigrés venus de Turquie et du Moyen-Orient avec 33%.
La part des descendants d’immigrés venus de Turquie et du Moyen-Orient qui déclarent une discrimination a augmenté à 33% contre 28% en 2008-2009.
Islamophobie et discrimination
Bien que la religion soit un motif de discrimination relativement peu cité dans l’ensemble de la population (2%), un tier des musulmans ayant déclaré des discriminations ont mis en avant le motif de religion contre un sur dix en 2008-2009. Les musulmans ont un risque multiplié par 1,4 de déclarer des traitements inégalitaires par rapport à ceux se déclarant sans religion.
Le rapport défend aussi que la situation dans l’emploi est déterminante face aux discriminations. Les chômeurs ont un risque accru de déclarer environ 2 fois plus de discrimination comparée aux personnes en emploi.
D’après le rapport, la hausse du sentiment de discrimination peut refléter l’augmentation des actes discriminatoires mais aussi une plus grande sensibilité à la question des discriminations. Autrement dit, pour un même traitement subi, les personnes sont peut-être plus promptes à déclarer des discriminations aujourd’hui qu’elles ne l’étaient il y a dix ans.
Bien que le nombre de personne qui déclare avoir été victime de discrimination augmente, les recours, dépôts de plainte ou démarches auprès d’associations ou de syndicats restent relativement rares en 2019-2020, comme en 2008-2009. Seules 7 % des personnes ont entrepris une démarche auprès d’une association, d’un syndicat ou du Défenseur des droits, et 2 % portent plainte. 38% des personnes se contentent de s’indigner ou contester.