L'Allemagne fait face lundi à des accusations portées par le Nicaragua devant la plus haute juridiction de l'ONU, selon lesquelles Berlin "facilite la commission d'un génocide" contre les Palestiniens avec son soutien militaire et politique à Israël.
Managua a intenté une action en justice contre l'Allemagne devant la Cour internationale de Justice (CIJ), demandant aux juges d'imposer des mesures d'urgence pour empêcher Berlin de fournir des armes et d'autres aides à Israël.
"Nous rejetons les allégations du Nicaragua", a déclaré en amont des audiences Sebastian Fischer, porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères.
"L'Allemagne n'a violé ni la Convention sur le génocide ni le droit international humanitaire et nous le démontrerons pleinement devant la Cour internationale de Justice", a-t-il assuré devant les journalistes.
Le Nicaragua présentera ses arguments lundi, l'Allemagne devant répondre le lendemain.
Dans un document de 43 pages adressé à la cour, Managua affirme que Berlin viole la Convention des Nations Unies sur le génocide de 1948, établie à la suite de l'Holocauste.
"En envoyant du matériel militaire et en supprimant désormais le financement de l'Unrwa" (agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens), "l'Allemagne facilite la commission d'un génocide", est-il écrit.
"La défaillance de l'Allemagne est d'autant plus répréhensible à l'égard d'Israël que l'Allemagne entretient avec ce pays une relation privilégiée autoproclamée, qui lui permettrait d'influencer utilement sa conduite", a ajouté le Nicaragua.
Managua a demandé à la CIJ de décider de "mesures provisoires", des ordonnances d'urgence imposées pendant que la cour examine l'affaire dans son ensemble.
Ceci est "impératif et urgent" étant donné que la vie de "centaines de milliers de personnes" est en jeu, selon le dossier nicaraguayen.
- Cinq mesures provisoires -
La CIJ a été créée pour trancher les différends entre nations et est devenue un acteur clé dans la guerre entre Israël et le Hamas.
Dans une autre procédure, l'Afrique du Sud avait accusé Israël de perpétrer un génocide dans la bande de Gaza, ce que le pays nie avec véhémence.
Dans cette affaire, la cour a appelé Israël à faire tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher tout acte de génocide et a récemment durci sa position, ordonnant des mesures supplémentaires de la part d’Israël pour accroître l'accès à l'aide humanitaire.
Les décisions de la CIJ sont contraignantes mais la cour ne dispose pas d'un mécanisme d'application. Elle a par exemple ordonné à la Russie de mettre fin à son invasion de l'Ukraine, en vain.
Le Nicaragua a demandé cinq mesures provisoires, stipulant notamment que l'Allemagne "suspende immédiatement son aide à Israël, en particulier son assistance militaire, y compris son équipement militaire".
Il demande également à la cour d'ordonner à Berlin de "revenir sur sa décision de suspendre le financement de l'Unrwa".
L'Allemagne a annoncé en janvier qu'elle suspendait ce financement en attendant une enquête sur des accusations israéliennes selon lesquelles plusieurs membres du personnel de l'Unrwa auraient participé à l'attaque du 7 octobre.
Le Nicaragua a déclaré qu'"il pourrait être compréhensible" que l'Allemagne soutienne une "réaction appropriée" de son allié israélien à l'attaque du Hamas, mais ajoute que cela ne peut pas être une excuse pour agir en violation du droit international".
La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock a déclaré vendredi qu'Israël n'avait "plus d'excuse" pour retarder l'arrivée de l'aide à Gaza.
La bande de Gaza est le théâtre d'une guerre dévastatrice menée par Israël.
Selon un dernier bilan publié dimanche par le ministère de la Santé à Gaza, 33.175 personnes, majoritairement des civils, y ont été tuées.