Selon le président de l'Ordre régional des avocats de Tunis, Laâroussi Zguir, 100% des avoccats tunisiens seraient en grève ce lundi 13 mai. Ils protestent contre l’arrestation de l’avocate Sonia Dahmani samedi dernier. La jeune femme comparaît ce matin devant un juge d'instruction selon le média Mosaïque FM. Ses défenseurs demandent qu'elle soit remise en liberté.
Les médias tunisiens commentent cette arrestation. Certains n’hésitent pas à parler de bras de fer entre le pouvoir et l’opposition. "Ben Ali n’avait pas osé, Kaïs Saïed, le président tunisien, l’a fait", s’indigne le site Businessnews.
L’arrestation a également fait le tour des réseaux sociaux. Elle a eu lieu samedi en direct sur la chaîne France 24 qui était présente pour interviewer l’avocate. Sonia Dahmani était en effet convoquée par un juge mais ne s’était pas rendue au rendez-vous, aucune raison n’ayant été mentionnée dans la convocation.
À l’origine de cette arrestation, des propos prononcés le 7 mai lors d’un show télé sur la chaîne Carthage+. L’avocate s’est moquée d’un chroniqueur qui affirmait que les migrants subsahariens voulaient “coloniser” la Tunisie. Elle a lancé ce sarcasme: “de quel pays extraordinaire on parle ? celui que la moitié des jeunes veut quitter ?"
60 personnes arrêtées en 18 mois
Dahmani est accusée de diffusion de “fausses informations dans le but de porter atteinte à la sûreté publique” et “incitation à un discours de la haine”, des délits prévus par le décret-loi 54, promulgué en septembre 2022 par le président Kaïs Saïed. Il permet de poursuivre toute personne qui critique la Tunisie et prévoit une peine de cinq ans de prison et 50 000 dinars d’amende (environ 14 900 euros) contre tout contrevenant.
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Les deux chroniqueurs de l’émission de télévision sur Carthage+ ont été également arrêtés ce week-end et placés en détention pour “diffusion de fausses informations”. En 18 mois, 60 personnes, dont des journalistes, des avocats et des militants, ont été arrêtées sur la base de ce texte.
Bras de fer entre le gouvernement tunisien et ses opposants
Selon l’équipe de l‘avocate tunisienne, le lieu de son incarcération est inconnu. Sonia Dahmani soutient qu’elle n’a commis aucun acte contraire à la loi.
Le président tunisien accuse de complot contre l’État contre les associations civiles, les organisations des droits de l’homme et les médias.
La Tunisie vit actuellement une crise migratoire, des migrants sub-sahariens sont renvoyés dans leurs pays, accusés de vouloir “envahir” la Tunisie. Le président Saïed a admis le week-end dernier que 400 personnes avaient été reconduites à la frontière.
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