Entre les "restrictions excessives" au droit de manifester ou l'introduction de surveillance algorithmique, la situation des droits humains en France a continué en 2023 son "érosion", dénonce mercredi Amnesty International dans son rapport annuel mondial.
"La situation des droits humains et du respect des droits humains en France se dégrade et la société civile doit être vigilante. Il y a de plus en plus de discours de haine décomplexée", de "plus en plus de remise en cause du droit international (....) et c'est vraiment un signe mauvais pour l'avenir de notre pays", a résumé mardi à l'AFP Jean-Claude Samouiller, président d'Amnesty International France, en marge d'une conférence de presse à Paris.
La loi autorisant l'introduction de surveillance associée à l'intelligence artificielle, que les autorités présentent comme "expérimentale" et gage de sécurité lors des Jeux olympiques et paralympiques 2024, risque notamment d'étendre "de manière excessive les pouvoirs de police en élargissant l'arsenal des équipements de surveillance de façon permanente", redoute Amnesty.
L'ONG basée à Londres s'inquiète en outre des coups portés selon elle à la liberté de manifester. Lors de rassemblements pour contester la réforme des retraites ou le projet de mégabassine (réservoirs d'eau) ou en soutien aux Palestiniens - quand ils ont été autorisés -, les autorités ont recouru de façon "abusive à la force dans le maintien de l'ordre", déplore Amnesty dans son rapport, citant "des dispersions violentes et des matraquages aveugles".
Sur ce chapitre, plusieurs instances internationales ont rappelé la France à l'ordre.
Or, "il y a un déni qui reste très fort sur la question des discriminations systémiques par les forces de l'ordre", estime auprès de l'AFP Nathalie Godard, directrice de l'Action d'Amnesty International France, ainsi, selon elle, qu'un "déni qui reste très fort aussi sur l'impact des discours racistes et stigmatisants qui concernent les personnes musulmanes en France".
Sur la question de la liberté d'expression, "on demande depuis des années le fait que ces délits d'apologie du terrorisme soient abrogés dans les lois", dit-elle.
"Il faut limiter la liberté d'expression sur les questions d'appel à la haine, mais l'apologie du terrorisme, c'est une infraction qui est définie de manière extrêmement vague et subjective, et qui donc représente en soi un risque d'atteinte à la liberté d'expression", ajoute Mme Godard.
Cette question est de nouveau au coeur de débats politiques après l'annonce de la convocation de la cheffe de file des députés LFI (gauche radicale) Mathilde Panot par la police dans le cadre d'une enquête pour "apologie du terrorisme" ouverte après un communiqué du groupe parlementaire publié le 7 octobre, jour de l'attaque sans précédent menée par le Hamas contre Israël.