Législatives anticipées en Allemagne/ Photo: AFP (AFP)

Scruté dans le monde entier, le scrutin intervient alors que la première puissance européenne voit son modèle de prospérité bouleversé.

Récession économique et menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du "parapluie" américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le "destin" de l'Allemagne qui est en jeu, a dit le chef de file des conservateurs Friedrich Merz, samedi.

Plus de 59 millions d'électeurs ont jusqu'à 18H00 (17H00 GMT) pour élire leurs députés. Les premiers sondages de sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Friedrich Merz semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. Les derniers sondages le créditent d'environ 30% des intentions de vote.

- Attentats -

L'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut, elle, espérer au moins 20%, deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé pendant des semaines de l'entourage de Donald Trump.

Son conseiller Elon Musk, homme le plus riche du monde, n'a pas ménagé ses efforts pour promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

"AfD!" a encore posté Musk dans la nuit de samedi à dimanche, dans un message assorti de drapeaux allemands.

Christian, ingénieur de 49 ans qui préfère ne pas donner son nom et qui participait samedi à un meeting de l'AfD, a dit d'Alice Weidel qu'elle était "une femme avec du cran" qui "parle des sujets ignorés par les autres partis".

Les législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, vécue comme un choc en Allemagne. Le conflit a mis fin à son approvisionnement en gaz russe et le pays a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens.

Outre la perspective d'une paix réglée "dans le dos" de Kiev et des Européens, l'Allemagne redoute l'impact pour son économie de la hausse des droits de douane annoncée par Donald Trump.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture souhaiter "bonne chance" à l'allié historique des Etats-Unis, qui ont leurs "propres problèmes".

Le discours à Munich de son vice-président JD Vance, exhortant les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

"Même sans les Américains, notre place reste au centre de l'Europe", a estimé, vendredi, Friedrich Merz. Un "mandat fort des électeurs" permettra que l'Allemagne puisse "assumer un rôle de leader" en Europe, a-t-il promis.

- Incertitude -

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait se passer des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne voie le jour.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU, qui exclut une alliance avec l'AfD malgré un "flirt" parlementaire durant la campagne autour de l'immigration, pourrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD).

Les sondages donnent à ce dernier 15% des voix et en font le premier partenaire possible.

Ce score serait son pire résultat de l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais avant, le chancelier devra assurer la transition.

"J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques", soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz, optimiste.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de chercher un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5% des suffrages pour entrer au Bundestag.

Dans une marche "antifasciste", Michael Lenz, 39 ans, a dit craindre de nouvelles élections si les autres partis n'arrivent pas "à se mettre d'accord". Cette perspective pourrait selon lui "renforcer l'AfD" car "la confiance dans les institutions" en serait "encore plus affaiblie".

Agences