Michel Barnier a parlé pendant près d'une heure et demie. Le ton est monocorde. Il ne réagit pas aux huées du Nouveau Front populaire qui dénonce un hold-up politique, ou quand dans son camp, les applaudissements se font rares.
Alors, le nouveau Premier ministre joue la prudence, essaie de ménager la chèvre et le chou.
Il se dit prêt à négocier avec les partenaires sociaux pour modifier la réforme des retraites, annonce la revalorisation du smic de 2 % au 1er novembre, et reporte les élections régionales à 2025 en Nouvelle-Calédonie. C'est le paquet “ouverture à gauche”.
Peu d’annonces et des appels au compromis
Pour satisfaire sa base de droite, il promet de construire des places de prison et d’allonger la durée de détention administrative pour les étrangers en situation irrégulière et de “conditionner davantage” la délivrance de visa à l’obtention de laissez-passer consulaires pour les personnes en situation irrégulière que la France veut expulser.
Il y aura des hausses d’impôts malgré l’opposition des Macronistes au départ mais elles seront exceptionnelles et limitées aux hauts revenus. Le Premier ministre promet des efforts sur les dépenses, il y aura des coupes claires sur les budgets des ministères, mais il faudra attendre les discussions sur le budget pour le savoir.
Soutien mou et critiques acerbes
Le patron des députés PS, Boris Vallaud a lancé au Premier ministre: “Vous êtes la continuation du macronisme dans sa part la plus à droite” et lui promet une motion de censure.
François Hollande, ancien Président et désormais député de Corrèze s’est moqué ce matin sur BFMTV: “Il a pris beaucoup de temps pour en dire peu et pour faire presque rien”.
Mais à droite, le ton n’est pas plus positif. La raillerie semble même de mise. "Je suis toujours très très sceptique sur les hausses d'impôts. Je pense que ça va endommager le pays", confie une députée Ensemble pour la République ce mardi à l’assemblée. Un autre tacle même Michel Barnier: "On aurait dit du Attal en moins bien dit, avec moins de leadership et avec des hausses d'impôts". Le camp du Premier ministre est donc loin d’être sous le charme et cela n’a pas échappé à l’extrême droite qui se retrouve en faiseur de majorité à l’Assemblée.
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Un Premier ministre en équilibre
Le Rassemblement national fait la fine bouche après le discours de Michel Barnier et demande plus de fermeté sur l’immigration. Marine Le Pen déclare qu’elle veut une nouvelle loi sur l’immigration en 2025. Et ce matin sur France Inter, le ton est à la moquerie. Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national a résumé ainsi le discours du Premier ministre: “C'était le grand méchant flou”. “Michel Barnier a cherché à nous endormir, à zigzaguer, à gagner du temps, ça se voyait”, a-t-il expliqué.
C’est donc un chef de gouvernement en sursis politique qui s’est exprimé. Il joue à l’équilibriste avec une majorité relative de 230 députés et des partis de droite qui jouent la surenchère. Combien de temps le Premier ministre de 73 ans pourra-t-il réussir ce grand écart permanent ? La prochaine épreuve sera sans aucun doute la présentation du budget 2025.