Dans les appartement partagés, fréquents dans les grandes villes et notamment à Londres vu le niveau astronomique des loyers, les relations sont compliquées par les différents modes de vie et niveaux de revenus et forcent les colocataires à des compromis.
"Cet hiver, nous nous attendons à ce que 7 millions de foyers au Royaume-Uni se retrouvent en précarité énergétique. Ce qui veut dire qu'ils n'auront plus assez d'argent pour garder leurs logements chauds à un niveau acceptable", explique à l'AFP Simon Francis, coordinateur pour la coalition End Fuel Poverty.
Au Royaume-Uni, les factures d'électricité ont doublé depuis le début de la guerre en Ukraine et l'inflation frôle 11%.
"Qu'importe combien vous gagnez, tout le monde va ressentir cette crise du coût de la vie, même si évidemment les gens qui ont le moins de revenus souffrent le plus. (...) Cela peut clairement créer des tensions entre les colocataires", ajoute Simon Francis.
Les températures, après être restées douces une grande partie de l'automne, ont brusquement plongé sous zéro mi-décembre, avant de remonter un peu.
Les radiateurs ont carburé et les douloureuses factures hivernales commencent à arriver. Le gouvernement britannique a mis en place un bouclier tarifaire à 2.500 livres pour un foyer moyen par an, mais à ce niveau les factures restent malgré tout doublées sur un an.
Des millions de familles tombent dans l'extrême précarité et doivent choisir entre se chauffer, se nourrir ou se vêtir.
Dans les appartements en colocation, peu d'habitants ont échappé à "la discussion" du moment ("the talk") sur la manière dont ils comptent procéder pour limiter les factures.
Passifs agressifs
Chez Joe, un instituteur de 33 ans qui vit à l'est de Londres, ses cinq colocataires et lui ont décidé d'éteindre le chauffage dans les chambres.
Ils le gardent dans le salon, où télétravaillent deux d'entre eux. Ces derniers allument désormais un radiateur électrique la journée plutôt que de chauffer toute la pièce.
Chez Julie, journaliste, les colocataires ont décidé de ne plus chauffer la journée, sauf quand il fait vraiment trop froid, comme juste avant Noël.
Des frictions émergent, comme avec celles et ceux qui ramènent fréquemment leur amoureux ou amoureuse mais qui ne paient pas plus, ou ceux qui ont plus de revenus et ne font pas très attention.
"Il y a eu quelques messages un peu passifs-agressifs d'une de mes colocataires qui nous demandait de ne pas oublier de fermer les lumières en partant", raconte Joe.
"Le problème pour ceux qui vivent en colocation, ce n'est pas seulement les divergences de revenus" mais les loyers avec charges incluses, remarque Simon Francis. De ce fait, ceux qui font des efforts d'économies n'en reçoivent pas forcément les bénéfices.
Les propriétaires augmentent aussi parfois les loyers brusquement, pour répercuter la hausse des charges d'énergie... et les locataires ne peuvent plus suivre, forcés de déménager alors que trouver un appartement sur le marché immobilier post-confinements est devenu très difficile.
Lors de la quête d'un nouveau logement, l'efficacité énergétique est désormais un critère primordial, alors que peu s'en souciaient auparavant.
Simon Knoplioch, un Français de 29 ans qui travaille dans la finance à Londres, explique qu'il a récemment déménagé et a cherché avec ses amis un immeuble moderne. "On demandait à voir le certificat d'énergie du bâtiment. Celui dans lequel nous sommes est un immeuble neuf".
"Avant, nous vivions dans une passoire énergétique. En ce moment les loyers sont tellement élevés" et la concurrence pour les appartements, particulièrement forte, ce qui fait "que les propriétaires n'ont aucun intérêt à faire les travaux" d'isolation, déplore-t-il.
Ailleurs en Europe les efforts d'économie d'énergie vont également bon train: dans l'Union européenne, la consommation de gaz a chuté de 20% d'août à novembre, par rapport aux cinq années précédentes, selon Eurostat.