Emmanuel Macron annonce la dissolution de l'Assemblée nationale lors d'une allocution à Paris / Photo: AFP (AFP)

Trois semaines éclairs s'ouvrent avant le premier tour le 30 juin puis le second le 7 juillet, juste avant les Jeux Olympiques de Paris (26 juillet - 11 août).

Face à la "montée des nationalistes", le chef de l'Etat a expliqué vouloir "redonner" aux Français "le choix de notre avenir parlementaire par le vote" en prononçant la dissolution de l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement.

"J'ai confiance en la capacité du peuple français à faire le choix le plus juste pour lui-même et pour les générations futures. Ma seule ambition est d'être utile à notre pays que j'aime tant", a affirmé M. Macron, dans un message posté lundi sur le réseau social X.

C'est un "coup de tonnerre" autant qu'un "coup de poker", au moment où "il y a une très forte volonté de la part des Français de sanctionner le président de la République", souligne la sondeuse Céline Bracq, directrice générale de l'institut Odoxa.

Car le vote sanction vient d'atteindre des records. Emmenée par Jordan Bardella, la liste du Rassemblement national (RN, extrême droite) a triomphé avec 32% des voix, très loin devant la candidate macroniste Valérie Hayer (14,5%) et la liste du socialiste Raphaël Glucksmann (14%).

Avec la dissolution, Emmanuel Macron fait "un pari extrêmement risqué" même s'"il y aura certainement des comportements de vote très différents" entre législatives et européennes, estime l'historien Jean Garrigues. "Ces élections vont mettre les Français devant le fait accompli: est-ce qu'on veut un gouvernement RN?"

Le Rassemblement est "prêt à exercer le pouvoir", a affirmé dimanche Marine Le Pen, avant une réunion du bureau exécutif avec Jordan Bardella, sur un format mimant un conseil des ministres.

Emmanuel Macron a de son côté réuni le gouvernement dans la soirée. Le chef de l'Etat doit se rendre lundi à des cérémonies dans le centre du pays, mais il a aussi promis de s'exprimer cette semaine pour dire "l'orientation" qu'il croit "juste pour la nation".

"Le président a pris les devants de quelque chose qui paraissait à chacun inéluctable", veut croire un membre du gouvernement, à cause du score de près de "40%" pour "l'extrême droite", souligne-t-il, en additionnant RN et le parti Reconquête (5,3%).

"Coup de massue"

Stéphane Séjourné, ministre des Affaires étrangères et patron du parti Renaissance, a lancé un appel "à la mobilisation de toutes les forces républicaines". "Les députés sortants du champ républicain pourront ainsi bénéficier de notre investiture s'ils sont en accord avec le projet présenté", a-t-il annoncé.

"On ne veut plus de +en même temps+. On paye la facture du macronisme là-aussi quand même", a répliqué le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, à l'AFP.

Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a lui estimé qu'"un rapport de forces a évolué" entre les partis de gauche après les européennes avec la position décrochée par Raphaël Glucksmann devant la candidate de La France Insoumise (LFI, gauche radicale) Manon Aubry (9,1% à 10,1%).

Les prises de paroles seront particulièrement scrutées au sein de la gauche, qui en 2022 avait réussi un tour de force en faisant entrer 151 députés grâce à une alliance, la Nupes, qui a implosé à l'automne dernier.

Est-ce qu'une entente similaire peut être envisagée? L'équation sera délicate à résoudre tant la gauche française s'est abîmée dans ces européennes par des coups de boutoir entre socialistes et "insoumis", ces derniers ayant déjà lancé leur campagne dimanche par un rassemblement improvisé à Paris.

Certains chez LFI espèrent une entente à gauche pour reconduire a minima les députés sortants de la Nupes.

"Nous allons mener campagne pour aller à Matignon", a lancé le coordinateur de LFI Manuel Bompard, favorable à poursuivre la "démarche de rassemblement entamée" en 2022, même s'il accuse le Parti socialiste de lui avoir "tourné le dos".

D'autres prises de parole seront particulièrement attendues, notamment dans le camp présidentiel. La présidente sortante de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet est l'invitée d'une chaîne de télévision lundi matin, et l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, candidat potentiel pour 2027, n'a toujours pas réagi aux conséquences de ces élections.

En attendant le temps est suspendu à l'Assemblée nationale. "Tout le programme est annulé. C'est un peu le coup de massue. Personne n'avait vu le coup venir", glisse une source parlementaire

AFP