Le froid tant redouté a débuté dans la région d’Al Haouz, meurtrie par le séisme survenu le 8 septembre et ayant coûté la vie à plus de 2.960 personnes. Aujourd'hui logés dans des tentes, les rescapés du séisme peuvent encore compter sur l’appui des autorités locales et des associations actives dans la région.
L’association “Atlas initiative pour le développement et l’environnement” poursuit son travail dans la région de Chichaoua, autre province touchée par le séisme. Son président Karim Lachgar, nous explique qu’à ce jour l’association maintient des contacts avec les victimes. “Nous avons reçu des appels à l’aide depuis deux villages touchés ces derniers jours par des inondations et où les débris n’ont pas encore été enlevés”, se lamente Karim Lachgar.
L’association a pu collecter quelque 150 couvertures et une centaine de paniers alimentaires, mais lance dans ce sens un appel aux dons pour distribuer des matelas, des couvertures ou encore des denrées alimentaires qui permettraient à ces familles de survivre durant les prochains mois, nous explique le président de l'association locale.
Mais les victimes doivent faire face à un nouveau défi, celui de la reconstruction. Une aide qui va de 80.000 à 140.000 dirhams (quelque 8.000 à 14.000 dollars américains) a été accordée par l'État aux victimes dont les logements se sont partiellement ou totalement effondrés, dans les cinq provinces touchées.
Matériaux d’hier, matériaux d’avenir
Au lendemain même du séisme, le ministère de l’Habitat a mandaté plusieurs experts et spécialistes afin d’établir un cahier des charges impératif pour la reconstruction. L’architecte Khalil Morad El Ghilali, à travers l'association Labina dont il est l’un des membres, a travaillé sur cet effort national.
L’association s’est surtout intéressée aux logements construits en matériaux locaux et qui ont tenu le choc face aux secousses. “Nos bénévoles se sont rendus dans dix-huit douars pour y recenser et étudier plus de 100 logements”, explique l’architecte, pour qui le constat est clair: “l'utilisation de matériaux locaux et ancestraux n’a nullement un rapport direct avec son effondrement”.
En effet, selon l’expert “nous avons tendance à confondre la qualité de mise en œuvre et l’utilisation de matériaux locaux, car ce que nous avons remarqué c’est que les bâtiments touchés n’étaient pas toujours ceux en terre, certains ont tenu tandis que d’autres en béton se sont effondrés”.
De plus, “l’aide gracieuse de 140.000 DH ne suffira pas si l’on veut reconstruire en béton car il faudra penser à faire un renforcement sismique, en plus du coût de l’acheminement des matériaux qui est extrêmement élevé”, souligne notre interlocuteur.
La formule secrète du patrimoine
En plus de la complexité du choix des matériaux, il faudra sans doute déloger certains villages qui se trouvent dans des zones à risques, nous confie l’expert, notant qu’une carte d’aléa sismique est en cours d’élaboration. Mais si la zone ne présente pas tellement de risque alors les constructions se feront in situ, c’est le cas notamment à Chichaoua où la reconstruction va démarrer bientôt.
“L’essentiel est de ne pas réduire tout ce travail à un aspect uniquement esthétique comme le voudraient certains ou de faire cela dans la précipitation. Ces logements constituent un patrimoine humain synonyme de résilience. Abandonner ces techniques de construction ancestrales serait une erreur, car elles constituent également un vecteur de renouveau pour ce Maroc qui se veut en pleine transition énergétique, alors que nous savons que 40% des émissions de CO2 émanent du domaine du BTP”, conclut Khalil Morad.