Christopher Nolan a signé un retour surprenant derrière les caméras en livrant un biopic inédit : "Oppenheimer". Dans cette œuvre cinématographique, le réalisateur revisite à sa manière la vie complexe de l'Américain à l'origine de la mise au point de la bombe atomique. Très attendu, ce film, sorti en salle mercredi, offre en trois heures une plongée dans les moments-clés de la vie de Robert Oppenheimer (1904-1967), surnommé “le père de la bombe atomique”, un physicien qui a marqué l'Histoire, en plongeant le monde dans l’ère nucléaire.
Le long-métrage se concentre principalement sur les événements entourant le "projet Manhattan" pendant la Seconde Guerre mondiale. À partir de 1942, un groupe de 5 000 individus, dont environ un millier de scientifiques et de chercheurs, se rassemble en toute discrétion dans un centre de recherche spécialement construit à Los Alamos, une région isolée du Nouveau-Mexique. C'est là que prendra forme et sera soumise à des essais la bombe atomique, qui sera larguée en août 1945 sur les villes d'Hiroshima et Nagasaki, entraînant la tragique disparition de 200 000 personnes. Cillian Murphy incarne le rôle de Robert Oppenheimer, le directeur scientifique éminent de cette entreprise.
Un précurseur malgré lui
On ne sait pas à vrai dire si, à l'époque, Robert Oppenheimer avait réellement mesuré l'étendue dévastatrice de son invention. Ce qui retient l’attention, c’est que durant sa carrière, le chercheur s'est opposé au développement de la bombe "H" (pour hydrogène), qui était 1000 fois plus puissante que la bombe "A" atomique.
Il a également plaidé en faveur d'une stricte réglementation internationale de la recherche nucléaire, avec un objectif axé sur la science civile. Cependant, cette approche réservée lui a valu des critiques par la suite.
Au cours des années 50, Robert Oppenheimer connaît une éclipse de sa renommée en raison de son opposition à la Bombe "H" et de ses liaisons avec des personnalités affiliées au communisme. Dans le climat tendu du Maccarthysme, les agences américaines se posent des questions quant à sa loyauté envers son pays. En conséquence, en 1954, Robert Oppenheimer est démis de ses fonctions au sein du commissariat à l'énergie atomique américain.
La culpabilité d’un homme qui a changé le monde
Il faut patienter jusqu'en 1963, sous la présidence de Kennedy, pour que le physicien soit réhabilité politiquement lors de la cérémonie de remise du prestigieux prix Enrico-Fermi, qui rend hommage aux scientifiques pour leurs contributions à l'étude de l'énergie.
Tourmenté par la culpabilité et effrayé par les potentielles conséquences de son invention sur le monde, Oppenheimer achève sa carrière à l'Institute for Advanced Study, un laboratoire de recherche parmi les plus prestigieux au monde. Jusqu'à son décès en 1967 des suites d'un cancer de la gorge, il milite inlassablement en faveur d'un système de contrôle international de l'énergie nucléaire et de la limitation des armements.
Peu après le largage des bombes sur le Japon, le chercheur se livrera devant le président américain Harry S. Truman : "J’ai l’impression d’avoir du sang sur les mains". Pourtant, durant toute sa carrière, le physicien n’a jamais ouvertement exprimé de remords.
Une seule fois, dans les années 60, Oppenheimer laissera percer des regrets à l’antenne de la BBC : "Hiroshima a été bien plus coûteux en vies et en souffrance inhumaine que ce que nous voulions pour arrêter la guerre. Mais c’est plus facile à dire, après coup…".