"D'importantes décisions" sont attendues lors de ce sommet, a prévenu mardi la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao), qui a réaffirmé privilégier la voie diplomatique pour restaurer l'ordre constitutionnel au Niger, tout en maintenant sa menace d'un recours à la force.
La Cedeao, par la voix du Nigeria qui assure la présidence tournante de l'organisation, s'exprimait pour la première fois depuis l'expiration dimanche soir d'un ultimatum de sept jours lancé aux militaires pour rétablir le président Mohamed Bazoum dans ses fonctions.
La junte nigérienne a rencontré mercredi dans la capitale Niamey deux émissaires du président nigérian Bola Tinubu, qui occupe aussi la présidence de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a rapporté Reuters citant une source gouvernementale à Abuja.
Cette réunion laisse entrevoir l'espoir d'un dialogue entre les putschistes et la Cédéao, qui a menacé d'intervenir militairement pour rétablir l'ordre constitutionnel au Niger et doit se réunir jeudi en sommet. C'est donc un sommet crucial pour l'Afrique de l'Ouest.
S'envolant pour la capitale nigériane mercredi soir, le président de Guinée-Bissau Umaro Sissoco Embalo a affirmé que "le seul président" reconnu au Niger est le président Bazoum.
"Les coups d'Etat doivent être bannis", a-t-il ajouté, estimant que la Cedeao, dont son pays et le Niger font partie, jouait son existence après les putsch dans trois autres Etats membres (Mali, Guinée, Burkina Faso; suspendus de ses instances dirigeantes) depuis 2020.
De leur côté, le Mali et le Burkina Faso ont affiché leur solidarité avec les militaires du Niger. Ils ont affirmé que si le pays était attaqué par la Cedeao, ce serait "une déclaration de guerre" pour eux.
Mardi, ils ont adressé des lettres conjointes à l'ONU et à l'UA en appelant à leur "responsabilité" pour empêcher "toute intervention militaire contre le Niger dont l'ampleur des conséquences sécuritaires et humanitaires serait imprévisible".
Soutiens occidentaux
Dans ses efforts pour rétablir le président Bazoum, la Cedeao peut quant à elle compter sur le soutien des puissances occidentales, en premier lieu les Etats-Unis et la France qui avaient fait du Niger un pivot de leur dispositif antiterroriste au Sahel.
Les Etats-Unis ont exprimé mercredi leur inquiétude à propos des conditions de détention de M. Bazoum, détenu depuis le coup d'Etat du 26 juillet dans sa résidence présidentielle.
La numéro deux de la diplomatie américaine était venue lundi à Niamey pour rencontrer les auteurs du coup d'Etat, réunion à laquelle n'avait pas participé le général Tiani. Elle n'avait pas non plus rencontré M. Bazoum.
Les discussions "ont été extrêmement franches et par moment assez difficiles", avait-t-elle reconnu.
La France, ex-puissance coloniale régulièrement vilipendée lors de manifestations en Afrique de l'Ouest, a fait savoir mardi de source diplomatique qu'elle appuyait "les efforts des pays de la région pour restaurer la démocratie" au Niger.
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a lui aussi dit sa préoccupation, exigeant la libération de Mohamed Bazoum et dénonçant "les déplorables conditions dans lesquelles vivraient le président Bazoum et sa famille".
Depuis l'arrivée des militaires au pouvoir, la France a suspendu les accords de coopération militaire avec Niamey. Les militaires nigériens ont, eux, dénoncé la semaine dernière ces accords, ce que Paris a rejeté, au motif que ceux-ci avaient été signés par les autorités nigériennes légitimes.
Mercredi, les militaires ont accusé Paris d'avoir violé dans la matinée l'espace aérien nigérien, fermé depuis dimanche, avec un avion de l'armée française venu du Tchad, et d'avoir "libéré des terroristes". Des accusations aussitôt démenties par la France.
Guterres "préoccupé" par les conditions de détention de Bazoum
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres s'est déclaré mercredi "préoccupé" par les conditions de détention du président nigérien renversé Mohamed Bazoum, et a exigé sa libération.
M. Guterres a dénoncé "les déplorables conditions dans lesquelles vivaient le président Bazoum et sa famille", a indiqué l'ONU dans un communiqué.
Selon le média américain CNN, M. Bazoum est maintenu isolé par les militaires qui l'ont renversé du pouvoir, et n'a que des pâtes et du riz non-cuits pour se nourrir.
D'après la même source, il a affirmé dans une série de messages envoyés à un ami qu'il était privé de "tout contact humain depuis vendredi", sans que personne ne lui apporte de nourriture ni de médicaments.
Ainsi, Antonio Guterres "redit sa préoccupation quant à la santé et à la sécurité du président et de sa famille, et appelle une nouvelle fois à sa libération immédiate et sans condition, ainsi qu'à son rétablissement à la tête de l'Etat".