Cet appel - d'un montant similaire à celui demandé l'an dernier - a été lancé mardi à Genève devant les pays donateurs par le commissaire général de l'Unrwa, Philippe Lazzarini.
"Nous aurions pu demander le double. Mais nous avons constaté qu'il y eu une stagnation des ressources au cours des 10 dernières années. Il y a une sorte de plafond de verre", a-t-il dit lors d'un entretien avec l'AFP.
"Nous sommes entrés dans une zone dangereuse. (...) A un moment donné, nous pourrions atteindre un point de rupture qui conduirait très probablement à la suspension des activités", a-t-il ajouté.
M. Lazzarini attribue le manque de générosité des donateurs à la multiplication des crises et besoins humanitaires dans le monde, mais également à de "nouvelles dynamiques politiques régionales".
"Il n'est pas très populaire, politiquement, dans les pays donateurs d'augmenter substantiellement le soutien à l'Unrwa", a-t-il dit, déplorant que l'organisation fasse l'objet de "considérations politiques".
L'an dernier, l'Unrwa, auprès de qui sont enregistrés 5,9 millions de Palestiniens, a levé près de 1,2 milliard de dollars, et "pour la quatrième année consécutive, nous terminons avec un important déficit de plus de 70 millions de dollars", selon son commissaire général.
Sur le montant demandé pour 2023, 848 millions de dollars sont destinés à soutenir les services de base (un chiffre en hausse de 4% sur un an), tels que les besoins en santé et éducation, tandis que 781,6 millions visent à financer les opérations d'urgence à Gaza, en Cisjordanie, en Jordanie, en Syrie et au Liban.
L'appel d'urgence demande 311,4 millions de dollars pour Gaza, 32,9 millions pour la Cisjordanie, 247,2 millions pour la Syrie, 160 millions pour le Liban et 28,8 millions pour la Jordanie.
"Survivre"
Selon l'Unrwa, les défis qui se sont accumulés courant 2022 - "le sous-financement, les crises mondiales concurrentes, l'inflation, les perturbations dans les chaînes d'approvisionnement, la dynamique géopolitique et l'augmentation vertigineuse des niveaux de pauvreté et de chômage parmi les réfugiés palestiniens" - ont mis l'agence à rude épreuve.
M. Lazzarini a appelé en particulier les pays arabes à traduire leur "solidarité" politique envers les Palestiniens en "ressources tangibles et substantielles". En 2018, la contribution des pays arabes représentaient 25% du budget de l'Unrwa, contre 3% en 2021 et 4% l'an dernier, a-t-il expliqué.
"Les réfugiés palestiniens - l'une des communautés les plus défavorisées de la région - sont confrontés à des défis sans précédent et dépendent de plus en plus de l'Unrwa pour les services de base et, dans certains cas, pour survivre", a souligné M. Lazzarini.
Selon l'Unrwa, mise en place en 1949 un an après la création d'Israël, la plupart des réfugiés palestiniens vivent désormais sous le seuil de pauvreté, et beaucoup dépendent de l'aide humanitaire de l'agence onusienne.
"Je reviens tout juste de Syrie où j'ai été le témoin direct d'une souffrance et d'un désespoir indescriptibles. La situation des réfugiés palestiniens dans ce pays se reflète malheureusement ailleurs comme au Liban et à Gaza, où les réfugiés palestiniens touchent le fond", a commenté M. Lazzarini. "Beaucoup m'ont dit que tout ce qu'ils demandaient était de pouvoir mener une vie digne. Ce n'est pas beaucoup demander".
La crise économique au Liban depuis 2019 - une des pires de l'époque moderne - a porté un coup dur aux communautés vulnérables, dont les réfugiés palestiniens. Selon l'Unrwa, le taux de pauvreté de ces derniers au Liban, qui s'élevait à près de 70% début 2022, atteint désormais 93%.
Un grand nombre de réfugiés palestiniens se trouvaient parmi une centaine de personnes tuées lors du naufrage d'une embarcation au large de la Syrie en septembre.