Les “chrétiens d’Orient” abandonnés
Si l’on peut tristement “comprendre”, les raisons politiques voire civilisationnelles de la démission de la communauté internationale vis-à-vis des massacres israéliens perpétrés contre les Palestiniens musulmans, le silence et la complicité de l’Occident quant aux exactions commises contre les Palestiniens chrétiens interrogent toujours autant.
Le terme même de “chrétiens d’Orient” pour lesquelles l’Occident ne ratait jamais l’occasion de s’ériger en protecteur, était devenu un terme générique pour établir un lien civilisationnel et confessionnel avec une minorité qui serait abandonnée à son propre sort en plein milieu de “méchants islamistes”, dans ce qu’on appelle le Moyen-Orient.
Ainsi, les politiques et journalistes occidentaux qui n'hésitaient pas à monter au créneau pour prendre la défense des chrétiens d’Orient dès que l’occasion se présentait, sont bien silencieux depuis le 7 octobre sur le sort des Palestiniens chrétiens.
Les colons israéliens visent un quartier arménien
Jeudi 26 décembre, un groupe d'une trentaine d'individus masqués et armés ont agressé des religieux et civils, dans le quartier arménien de Jérusalem.
Dans un communiqué, le Patriarcat arménien de Jérusalem a vivement condamné cette "agression physique d'envergure, coordonnée et massive", dirigée contre des évêques, prêtres, diacres, séminaristes et autres membres de la communauté arménienne à Jérusalem.
Cette attaque, qualifiée de "réponse criminelle" par le Patriarcat, est présentée comme une réaction à la plainte déposée dans le cadre d'un litige opposant l'Église arménienne à des investisseurs immobiliers.
L'origine du litige remonte au 1er novembre, date à laquelle les autorités arméniennes ont annoncé se retirer d'un bail de 99 ans octroyant un quart du quartier arménien à la société Xana Capital, engagée dans la construction d'une résidence de luxe.
Cette société immobilière bénéficie du soutien de l'organisation Ateret Cohanim, engagée dans la judaïsation de la partie est de Jérusalem.
Signé en 2021, le contrat avait suscité une vive réprobation au sein de la communauté arménienne, conduisant finalement le Patriarcat à le dénoncer pour vice de procédure.
Quelques jours après cette dénonciation, un convoi israélien avait investi le terrain litigieux, connu sous le nom de "jardin des Vaches", pour initier les travaux, bien que la police n'ait établi aucun lien direct avec l'attaque du 28 décembre.
Face à cette situation, le Patriarcat arménien exprime ses craintes d'une "destruction violente" imminente du quartier arménien, considérant désormais la menace existentielle comme une réalité physique.
En conclusion de son communiqué, les autorités arméniennes réclament l'ouverture d'une enquête contre les promoteurs immobiliers, les accusant d'organiser des "attaques criminelles continues" à l'encontre du Patriarcat arménien et de la communauté arménienne.
La mise en œuvre du contrat de bail et du projet immobilier pourrait entraîner une privation durable de 25% du quartier historique de la communauté arménienne, présente à cet endroit depuis le IVe siècle.
Deux chrétiennes tuées par un sniper israélien
Une mère et sa fille ont été abattues samedi 16 décembre par un soldat israélien dans le complexe abritant l'unique église catholique de la ville de Gaza.
"Vers midi aujourd'hui, un tireur d'élite de l'armée israélienne a tué deux chrétiennes dans la paroisse de la Sainte-Famille à Gaza, où la majorité des familles chrétiennes de Gaza ont trouvé refuge depuis le début de la guerre" entre Israël et le Hamas, a indiqué le Patriarcat latin de Jérusalem dans un communiqué.
"Nahida et sa fille Samar ont été tuées par balles alors qu'elles marchaient vers le Couvent des sœurs", ajoute le communiqué.
Selon l'agence de presse du Vatican, qui cite le cardinal Pierbattista Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, il s'agirait d'une "femme âgée" et de sa fille.
Sept autres personnes ont été blessées par balles alors qu'elles tentaient de se protéger des tirs dans la paroisse, selon la même source.
"On leur a tiré dessus de sang-froid", a encore accusé le Patriarcat, alors qu'"aucun belligérant ne se trouve dans les murs de la paroisse".
Le président français Emmanuel Macron n’avait timidement fait qu’ exprimer sa "préoccupation" face à "la situation dramatique" de la paroisse catholique de Gaza où deux paroissiennes ont été tuées, sans qu’aucune condamnation n'ait été faite.
La communauté catholique de la bande de Gaza compte 135 membres sur le millier de chrétiens, la plupart d'entre eux orthodoxes.
Le Patriarcat avait aussi indiqué qu’"un obus tiré par un char" israélien a visé le couvent des Sœurs de la charité de mère Teresa, situé dans le même complexe et qui abrite 54 malades.
Le générateur de la paroisse, seule source d'électricité, et les réserves de fioul ont été détruits dans la frappe qui a provoqué une explosion et un feu, endommageant le couvent. Deux autres frappes l'ont rendu inhabitable et les pensionnaires invalides sont désormais privés d'appareils respiratoires.
Selon l'agence vaticane, ces tirs ont fait trois blessés.
16 chrétiens meurent dans le bombardement d’une église
Le 19 octobre, les chrétiens de Gaza faisaient les premiers frais des bombardements israéliens.
16 chrétiens ont ainsi perdu la vie, lors d’un bombardement de l’église grecque-orthodoxe de Saint-Porphyre, d’après le ministère de l'Intérieur de Gaza.
Selon des témoins, le raid a endommagé une façade de l'église et fait s'écrouler un local la jouxtant.
Dans un communiqué, le Patriarcat orthodoxe de Jérusalem a condamné "avec la plus grande fermeté la frappe aérienne israélienne qui a touché l'enceinte de son église dans la ville de Gaza".
"Le Patriarcat souligne que cibler les églises et leurs institutions, ainsi que les abris qu'ils fournissent pour protéger les citoyens innocents, en particulier les enfants et les femmes qui ont perdu leurs maisons en raison des frappes aériennes israéliennes sur les zones résidentielles au cours des treize derniers jours, constitue un crime de guerre qui ne peut être ignoré", a-t-il ajouté.
Saint-Porphyre, la plus ancienne église encore active dans le territoire palestinien, se trouve dans le quartier historique du Vieux Gaza, où reposent, selon la tradition, les reliques de cet ermite et évêque de Gaza du Ve siècle.
Le nombre de chrétiens dans la bande de Gaza, pour la plupart des orthodoxes, est en baisse régulière.
Cracher sur les chrétiens, “un vieille tradition juive”
Depuis le 7 octobre, plusieurs vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux, où l’on voit des Israéliens cracher sur des fidèles chrétiens à Jérusalem, suscitant ainsi de vives réactions de la part des internautes.
Interrogé sur la question, le ministre israelien de la Sécurité nationale tente de légitimer cet acte en affirmant sans vergogne que cracher sur les chrétiens est une “vieille tradition juive”.
Palestiniens musulmans et chrétiens sont confrontés aux pires massacres et humiliations de l’histoire récente sous le silence complice de la communauté internationale, et partagent ainsi le même sort, celui d'être abandonnés à la prédation israélienne.