L'enquête du quotidien israélien Haaretz révèle que l'armée israélienne exploite systématiquement les civils palestiniens en les forçant à servir de boucliers humains au fil de ses opérations d’invasion de Gaza assiégée.
Selon l'enquête, cette pratique se déroule avec l'assentiment des hauts responsables militaires, y compris le chef d'état-major de l'armée, Herzi Halevi.
Basée sur des témoignages de soldats et de commandants israéliens, l'enquête démontre que les civils palestiniens, souvent vêtus d'uniformes de l'armée israélienne, sont principalement de jeunes adultes âgés d’une vingtaine d’années.
"La plupart d'entre eux portent des baskets plutôt que des bottes militaires. Leurs mains sont menottées derrière leur dos, et leurs visages expriment une peur intense," rapporte le journal.
Haaretz révèle que "des Palestiniens pris au hasard ont été utilisés par les unités de l'armée israélienne à Gaza dans un seul but : servir de boucliers humains aux soldats" dans le cadre de la guerre génocidaire menée par Israël à Gaza.
"Nos vies valent plus que les leurs"
Le rapport décrit comment ces civils sont forcés de se positionner devant les soldats israéliens pour les protéger lors des opérations, les envoyant en première ligne pour inspecter des zones potentiellement dangereuses.
Les soldats impliqués se justifient par l'idée que "[nos] vies valent plus que les leurs", pour légitimer l'utilisation des Palestiniens comme boucliers humains afin de minimiser les pertes du côté israélien.
"Il y a une certaine fierté dans cette pratique", confient des soldats qui sélectionnent des Palestiniens pour les emmener auprès des brigades et bataillons.
Haaretz souligne que cette pratique viole le droit humanitaire international et les Conventions de Genève, qui interdisent l'utilisation de civils comme boucliers humains.
Cependant, la pratique semble être largement répandue et systématique au sein de l'invasion militaire israélienne de Gaza.
"L'armée feint l'innocence, malgré les images diffusées sur Al Jazeera il y a environ deux mois", rapporte le journal.
Dans ces images, "on peut voir des soldats israéliens habiller des détenus palestiniens avec des uniformes et des gilets pare-balles, leur attacher des caméras et les envoyer dans des maisons gravement endommagées ou à l'entrée de tunnels, les mains liées par des attaches en plastique", ajoute le rapport.
Un soldat ayant participé à ces pratiques a déclaré à Haaretz : "Quand j'ai vu le reportage d'Al Jazeera, j'ai pensé : 'Ah, oui, c'est vrai.'"
Il a également précisé que la réponse officielle de l'armée israélienne aux allégations du journal ne reflète pas la réalité, ajoutant que "cela se fait au moins avec la connaissance du commandant de brigade".
Responsables militaires informés
L'enquête révèle également que les hauts responsables militaires israéliens, dont le chef d'état-major Halevi et le général Yaron Finkelman, commandant du front sud, étaient au courant de ces pratiques.
Bien que cette méthode soit interdite par le droit humanitaire international et les précédentes décisions de la Cour suprême israélienne, elle semble se poursuivre avec l'approbation tacite des dirigeants militaires.
Haaretz note que l'utilisation de civils comme boucliers humains n'est pas un phénomène nouveau, des pratiques similaires ayant été signalées lors des assauts militaires précédents.
L'armée israélienne a été critiquée et a fait l'objet de poursuites judiciaires pour ces pratiques, mais l'enquête suggère que l'utilisation systématique de civils palestiniens comme boucliers humains est désormais courante dans les violences actuelles.
En réponse à l'enquête, le porte-parole militaire israélien, Daniel Hagari, a déclaré que la politique officielle de l'armée interdit l'utilisation de civils comme boucliers humains et que les allégations feront l'objet d'une enquête. Toutefois, le rapport indique que cette pratique dangereuse et illégale reste profondément enracinée dans les tactiques militaires employées à Gaza.
Mineurs et personnes âgées
Haaretz rapporte que des civils palestiniens, souvent des mineurs ou des personnes âgées, sont utilisés par l'armée israélienne dans diverses zones de Gaza.
Ils sont "contraints de réaliser des tâches dangereuses", telles que l'entrée dans des tunnels ou des bâtiments avant les soldats, avec une caméra fixée sur leur dos.
"Il y a eu des moments où des personnes très âgées ont été envoyées dans des maisons," témoigne un soldat.
On leur promettait la liberté, une fois la tâche achevée : "Accomplissez une mission dans un puits de tunnel, et vous serez libres", a rapporté un autre soldat.
"Bien que certains Palestiniens sont supposés rester avec une unité 'seulement' pendant 24 heures, d'autres finissent par y rester deux jours, voire une semaine," note le rapport.
Israël a réduit la majeure partie de Gaza en ruines, provoquant une grave pénurie de produits de première nécessité, y compris l'eau, la nourriture, les médicaments et l'électricité, ce qui a contribué à la propagation de maladies.
Tel Aviv a tué au moins 40 000 Palestiniens, principalement des femmes et des enfants, et en a blessé plus de 92 000 autres.
Des milliers de personnes ont péri sous les décombres de maisons bombardées, tandis qu'environ 10 000 Palestiniens ont été enlevés par les troupes israéliennes.
Mais environ 45 médecins, chirurgiens et infirmiers américains, qui se sont portés volontaires à Gaza depuis octobre dernier, estiment que le nombre de morts causés par la guerre génocidaire d'Israël est "déjà supérieur à 92 000".
Selon une étude publiée dans la revue Lancet, les effets cumulatifs de la guerre menée par Israël à Gaza pourraient porter le bilan réel à plus de 186 000 victimes.