Créée en 2004, Frontex, l'agence européenne de garde-frontières et de gardes-côtes, aide les États de l'Union européenne et les pays associés à l'espace Schengen, dont la Suisse bien qu'elle ne fasse pas partie de l'UE, à protéger les frontières extérieures de cet espace de libre circulation.
Quatre ans après la crise migratoire de 2015 et suite au conflit syrien, le Parlement européen a approuvé un renforcement de Frontex afin de la doter d'un corps européen permanent de 10.000 gardes-frontières et gardes-côtes à l'horizon 2027: 3.000 employés de l'agence et 7.000 personnes mises à disposition par les États.
Actuellement, l'agence compte plus de 1.500 agents provenant de divers États membres.
Elle est régulièrement accusée, notamment par des ONG, de pratiques de refoulements illégaux de migrants et son patron français a démissionné fin avril suite à une enquête de l'Office européen de lutte antifraude.
La Suisse coopère elle depuis 2008 avec l'UE dans les domaines de la sécurité et de l'asile, et participe à Frontex depuis 2011, y compris aux vols communs que l'agence coordonne pour le renvoi de migrants.
Le gouvernement suisse et le Parlement souhaitent que la Suisse participe aux travaux de renforcement de Frontex.
Le référendum
Il est prévu que la Suisse fournisse plus de personnel - environ 40 postes maximum contre près de 6 actuellement - et porte sa contribution financière annuelle à 61 millions de francs suisses (58 millions d'euros) contre 24 millions en 2021.
Mais le comité "No Frontex" regroupant diverses ONG et des partis écologistes et de gauche a réuni suffisamment de signatures pour demander un référendum contre le projet de réforme suisse.
Ils font valoir que Frontex "participe aux violations des droits humains" des réfugiés et des migrants, et estiment que la Suisse n'a pas à y participer.
"Les activités de Frontex s'inscrivent dans le narratif raciste de la migration en tant que menace", dénonce ainsi le comité référendaire.
Les partis de droite soutiennent dans leur ensemble la participation suisse au développement de Frontex, y compris l'UDC (Union démocratique du centre) dans le camp de la droite extrême, qui est en principe contre la signature de tout accord entre la Suisse et l'UE.
Toutefois, les avis sont partagés au sein de l'UDC, où certains représentants ont appelé à voter "non" le 15 mai afin que la Suisse sorte de Frontex et retrouve un "contrôle autonome" de ses frontières.
Exclusion automatique ?
Car si la participation suisse à la réforme est rejetée dans les urnes, la coopération de la Confédération avec les États Schengen et Dublin prendra fin automatiquement, a averti le Conseil fédéral (gouvernement), "à moins que les États de l'UE et la Commission européenne ne se montrent conciliants".
Pour que la Suisse ne soit pas renvoyée, il faudrait qu'un comité comprenant des représentants de la Suisse, de la Commission européenne et de tous les États membres de l'UE, en décide autrement dans un délai de 90 jours. Toutefois, cette décision doit être prise à l'unanimité.
A Bruxelles, une porte-parole de la Commission européenne a indiqué à l'AFP qu'"il est trop tôt pour spéculer sur le résultat du vote".
Selon le Conseil fédéral, les conséquences d'une cessation de la coopération avec les États Schengen et Dublin "seraient perceptibles par tous au quotidien – notamment par des restrictions de la liberté de voyager – et entraîneraient des coûts élevés pour l'ensemble de l'économie".
Cette "coopération est nécessaire, elle est au profit de la Suisse. S'il y a une coopération avec l'Europe qui fonctionne vraiment bien et qu'il ne faut pas détruire, c'est celle-là", a souligné la Conseillère fédérale en charge du Département fédéral de justice et police, Karin Keller-Sutter, en conférence de presse.