Human Rights Watch et Médecins sans frontières ont ajouté jeudi leurs voix aux accusations imputant un génocide ou des actes de nature génocidaire à Israël pour sa conduite de la guerre à Gaza, des "mensonges" pour la diplomatie israélienne. / Photo: AA (AA)

"Le bombardement par l'occupation israélienne des écoles Al-Karama et Shaban, dans l'est de la ville de Gaza, a fait au moins 13 martyrs, dont des enfants et des femmes", a déclaré le porte-parole de la Défense civile Mahmoud Bassal, précisant qu'une trentaine de personnes avaient aussi été blessées.

La Défense civile a indiqué que 13 autres personnes avaient été tuées dans une frappe aérienne distincte d'Israël "sur un groupe de personnes essayant de se ravitailler en eau dans le camp de réfugiés Al-Shati à l'ouest de la ville de Gaza", située dans le nord du territoire palestinien.

Selon cette même source, six autres personnes ont été tuées dans les bombardements israéliens de deux maisons dans l'est et le sud de la ville.

L'armée israélienne ne s'est pas exprimée, dans l'immédiat, au sujet de ces trois frappes.

L'ONU interpelle la CIJ

L'Assemblée générale des Nations unies a approuvé jeudi une résolution demandant à la Cour internationale de justice (CIJ) de se prononcer sur les obligations humanitaires d'Israël envers les Palestiniens, alors que le gouvernement israélien est accusé d'entraver l'accès de l'aide à Gaza.

La résolution, soumise par la Norvège, a été adoptée à une large majorité: 137 pays ont voté pour, 12 contre, et 22 se sont abstenus.

Elle demande à la CIJ de clarifier ce qu'Israël est tenu de faire pour "garantir et faciliter l'acheminement sans entrave de l'approvisionnement indispensable à la survie de la population civile palestinienne".

Bien que les décisions de la CIJ, plus haute juridiction de l'ONU basée à La Haye, soient juridiquement contraignantes, la cour ne dispose d'aucun moyen concret pour les faire respecter.

Mais elles accentuent la pression diplomatique sur Israël. En juillet, la CIJ avait rendu, dans une affaire distincte, un avis consultatif selon lequel l'occupation israélienne du territoire palestinien était "illégale" et devait cesser dès que possible.

Israël contrôle strictement toutes les entrées de l'aide internationale, indispensable pour les 2,4 millions de Palestiniens dans la bande de Gaza frappés par un désastre humanitaire.

"C'est une catastrophe que la communauté internationale n'ait pas été en mesure de répondre de manière adéquate", a déclaré à Andreas Kravik, le vice-ministre norvégien des affaires étrangères.

"Ce n'est pas un manque de volonté de la communauté internationale de fournir une aide humanitaire, mais nous n'avons pas accès (à Gaza) et nous n'obtenons pas la collaboration dont nous avons besoin", a-t-il regretté.

L'initiative de la Norvège a été déclenchée par l'adoption en octobre par le Parlement israélien d'une loi interdisant, à partir de fin janvier, à l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) d'opérer sur le sol israélien et de se coordonner avec les autorités israéliennes.

"Je ne sais pas ce qui va se passer si la loi entre en vigueur", a avoué jeudi Stephane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU.

"Soyons clairs: l'Unicef ne peut pas remplacer les quelque 2000 enseignants qui travaillent pour l'Unrwa dans les écoles de Cisjordanie. L'OMS (Organisation mondiale de la santé) ne peut pas remplacer les centaines, voire plus, de professionnels de la santé palestiniens qui travaillent dans les cliniques de l'Unrwa. C'est tout simplement impossible", a-t-il dit.

HRW et MSF ajoutent leurs voix

Human Rights Watch et Médecins sans frontières ont ajouté jeudi leurs voix aux accusations imputant un génocide ou des actes de nature génocidaire à Israël pour sa conduite de la guerre à Gaza, des "mensonges" pour la diplomatie israélienne.

"Les autorités israéliennes ont délibérément créé des conditions de vie visant à causer la destruction d'une partie de la population de Gaza, en privant intentionnellement les civils palestiniens de l'enclave d'un accès adéquat à l'eau, ce qui a probablement causé des milliers de morts", écrit Human Rights Watch (HRW) dans un communiqué accompagnant son enquête de plus de 200 pages.

"Ce faisant, les autorités israéliennes sont responsables du crime contre l'humanité d'extermination et d'actes de génocide", ajoute l'organisation internationale.

Les Etats-Unis, premier allié d'Israël, ont exprimé leur "désaccord avec les conclusions" de HRW.

"Ce que nos équipes ont vu sur le terrain correspond à ce qu'un nombre croissant d'experts juridiques et d'organisations disent, à savoir que ce qui est en train de se passer à Gaza correspond à un génocide", a déclaré Christopher Lockyear, secrétaire général de Médecins sans frontières (MSF).

M. Lockyear s'exprimait à l'occasion de la publication d'un rapport d'une trentaine de pages sur Gaza notant que "les signes de nettoyage ethnique et la destruction en cours -incluant les massacres, les blessures physiques et psychologiques graves, les déplacements forcés et les conditions de vie impossibles pour les Palestiniens assiégés et bombardés- sont indéniables".

Le rapport documente notamment 41 attaques contre le personnel de MSF, incluant des frappes aériennes sur des établissements de santé et des tirs directs sur des convois humanitaires.

"Pas de nourriture, pas d'eau"

Dans son rapport, HRW juge qu'Israël a intentionnellement limité l'accès à l'eau des habitants de Gaza, et affirme que cela dénote une volonté d'"extermination". L'ONG accuse Israël "d'actes de génocide" et non de génocide, une accusation qui nécessiterait de faire la preuve d'une intention génocidaire.

"La ligne de conduite présentée dans ce rapport, ainsi que des déclarations laissant penser que certains responsables israéliens visaient à anéantir les Palestiniens de Gaza, pourraient signaler une telle volonté", avance toutefois le rapport.

HRW rappelle que Yoav Gallant, alors ministre de la Défense d'Israël, avait ordonné un "siège complet" du territoire palestinien dès le 9 octobre 2023. "Il n'y aura pas d'électricité, pas de nourriture, pas d'eau, pas de carburant", avait-il déclaré.

M. Gallant et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sont visés par des mandats d'arrêts de la Cour pénale internationale (CPI) émis fin novembre pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre à Gaza.

Plus de 45.000 Palestiniens ont été tués dans la campagne militaire israélienne dans le territoire palestinien, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé de Gaza, jugées fiables par l'ONU.

TRT Français et agences