Lors d'un discours ce lundi soir, il s 'est attardé sur le problème des ressources en eau et a répété le besoin d'un cessez-le-feu à Gaza. La fête du trône se poursuit jusque mercredi prochain.  Photo : Reuters (Others)

C’est sans doute le fleuron dans le bilan du Roi. En 25 ans, le Maroc a développé son économie de manière impressionnante. La croissance du PIB pour cette année 2023-2024 devrait être de 3,3%.

Une économie libéralisée, et plus industrialisée

Les chiffres confirment un développement important. Le PIB est passé de 46,27 milliards $ en 1999 à 130,91 milliards $ en 2022. Ainsi, le PIB par habitant a plus que doublé sur la période, passant de 1.627 dollars à 3.442 dollars en 2022.

Dans un classement publié en octobre 2023 par l’African Center for Economic Transformation (ACET), le Maroc est considéré comme le pays africain qui a le mieux réussi à transformer son économie entre 2000 et 2020. Et les perspectives sont au beau fixe. Selon la Banque mondiale, la croissance du PIB réel devrait atteindre 3,3% en 2025 et 3,5% en 2026.

Le Roi Mohammed VI a créé un climat d’affaires en lançant plusieurs chantiers. Des transformations légales ont facilité les investissements comme en 2000 la loi sur la liberté des prix et de la concurrence qui a favorisé la libre concurrence et interdit les pratiques anticoncurrentielles.

Le pays a, ensuite, privatisé certaines entreprises publiques comme la compagnie de télécommunications, Maroc Telecom. Selon les données du gouvernement marocain, 48 sociétés et 26 établissements hôteliers ont été transférés au secteur privé.

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Sont ensuite venus les investissements étrangers. Le climat politique a séduit les entreprises étrangères qui ont investi 40 millions de dollars entre 2007 et 2023. En 2007, l’inauguration de l’usine Renault à Tanger marque le début d’une diversification de l’industrie marocaine.

Pour parfaire le tout, le Maroc a lancé de grands projets d'infrastructures en développant ses autoroutes, en électrifiant quasi totalement le pays.Les réalisations emblématiques d’un pays en plein développement comme le TGV, le premier en Afrique, ont suivi. Il faut également mentionner le port Tanger Med qui, en quelques années, s’est hissé parmi les 20 ports les plus performants. Il est classé 19e et est considéré comme la porte d’entrée de l’Afrique. Ses performances dépassent celles de ports comme Hanovre. En 2023, ses volumes traités ont augmenté de 13%

Ce développement économique s’accompagne d’une amélioration du niveau de vie. Le taux de pauvreté n’était plus que de 5% de la population en 2013. La quasi-totalité de la population a, désormais, accès à l’électricité. Seule ombre au tableau, les inégalités sociales qui sont plus fortes et le royaume a lancé plusieurs aides sociales, à partir de 2020, pour essayer d’amoindrir les effets de sa politique économique libérale.

Le Maroc s’est tourné vers l’Afrique

Le Maroc est revenu au sein de l’Union africaine en 2017, trente ans après l’avoir quittée. Le souverain en personne avait marqué ce retour dans l’organisation et avait déclaré : “Je rentre enfin chez moi et vous retrouve avec bonheur”.

Mohamed Tozy, professeur de sciences politiques à l’université Hassan II et professeur à l’école de sciences politiques d’Aix-en-Provence insiste auprès de TRT Français : “le Maroc a réinventé sa politique en direction de l’Afrique, en mettant la question du Sahara occidental de côté, en développant une diplomatie religieuse et une vraie politique d’investissements. Rabat renoue avec une tradition d’influence du Maroc en Afrique qui existait déjà au XIXème siècle”.

Cette nouvelle diplomatie se traduit par une explosion des exportations du Maroc vers l’Afrique, elles ont augmenté de 900% en 25 ans pour atteindre près de 33 milliards de dirhams en 2023 selon l’Office marocain des changes.

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Le Maroc est ainsi devenu le 2e investisseur en Afrique, et le premier en Afrique de l’Ouest. En 2021, le royaume investissait 800 millions de dollars en Afrique. Récemment, Marsa Maroc s’est vu confier la gestion de deux terminaux dans le port de Cotonou au Bénin.

L’influence marocaine passe également par des mégas-projets comme le gazoduc Nigeria-Maroc. Long de 6.000 kilomètres et d'un coût de 25 milliards de dollars, ce méga-projet traversera 11 pays africains. Il est porté, notamment, par le fonds souverain marocain Ithmar Capital et l’Office national des hydrocarbures (ONHYM) et des mines marocain. Son financement devrait être bouclé d’ici la fin de l’année.

Dans le même temps, le Maroc a signé plus de mille accords bilatéraux dans différents domaines avec des pays africains.

Le Maroc concentre ses efforts sur la région sub-saharienne. Le royaume a un poste d’observateur depuis 2005 à la Cedeao (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest). L’annonce en novembre 2023 de l’Afrique Atlantique vient concrétiser une politique d’intégration avec l’Afrique subsaharienne. L’initiative Afrique Atlantique doit donner aux pays enclavés du Sahel un accès plus facile à la mer en utilisant la façade atlantique du Maroc pour leurs échanges commerciaux. Idée audacieuse qui a séduit mais la mise en œuvre sera compliquée d’autant que la stabilité n’est pas toujours au rendez-vous dans les pays de la zone.

Le Maroc, une voix en diplomatie

Ce poids économique s’accompagne d’un nouveau poids politique. La soft power du royaume est réelle et l’image du Maroc est positive en Afrique.

Le Roi Mohammed VI a voulu donner une voix au Maroc, un pays qui a sa propre diplomatie. Si le défunt Roi Hassan II était volubile, le ton a changé avec Mohammed VI.

Le souverain actuel donne peu de grands discours. En 25 ans, il a donné une dizaine d’entretiens majeurs, la différence avec son père est simple, le Maroc s’est doté d’une doctrine diplomatique.

Il a ouvert des représentations supplémentaires, recruté des profils extérieurs et surtout il revendique le statut d'État indépendant. Le ton monte parfois avec les anciennes puissances coloniales comme la France ou l’Espagne. Ainsi lorsqu’un tremblement de terre dévaste la région de Marrakech en 2023, le royaume refuse poliment l’aide française.

Pour faire avancer le dossier du Sahara occidental, Rabat n’hésite pas à se tourner vers les États-Unis. En 2020, il signe les accords d’Abraham qui normalisent ses relations avec Israël. En contrepartie, Washington reconnaît la souveraineté du royaume sur le Sahara occidental.

Un pied de nez à la diplomatie de Paris qui a longtemps été très prudente sur la question de la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Petit cadeau de Paris à Rabat pour ces 25 ans de règne, Emmanuel Macron a dans une lettre au Roi indiqué considérer que “le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine”.

Un Roi au style inclusif

Le visage du Maroc a donc changé en 25 ans, avec un Roi qui a aussi changé la manière de régner. Le Roi Mohammed VI s’est éloigné d’un pouvoir très centralisé pour préfèrer la consultation. Le souverain consulte beaucoup, même parmi ses détracteurs et son opposition.

Pendant son règne, ont été lancées la commission de réforme du statut personnel, la commission pour la réforme de la justice, la commission pour la réforme de la constitution… À l’arrivée, la constitution de 2011 rééquilibre les pouvoirs en donnant plus de prérogatives au Premier ministre et l’assemblée élue, tout en préservant les pouvoirs du Roi en matière religieuse et politique. De nombreux observateurs estiment que c’est ce qui a permis au Maroc d’éviter un “Printemps arabe” violent.

Mohamed Tozi souligne auprès de TRT Français que “la popularité du Roi n’a pas baissé en 25 ans. C’est un fait assez rare.” Selon lui, les Marocains sont de moins en moins complexés d’avoir une monarchie. “Ils trouvent une fonction positive à l’institution monarchique”.

TRT Français et agences