Une toute petite ligne rouge vient d’être franchie dans l’attitude européenne à l’égard du conflit territorial entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. À peine perceptible, mais à valeur symbolique forte.
L’Union européenne a officiellement approuvé, lundi, une aide militaire “non létale” de 10 millions d’euros (11 millions de dollars) à l’Arménie. Celà augure-t-il d’un revirement dans la question du Caucase du Sud ?
Une partie de la réponse est à chercher ailleurs, dans un autre conflit. La guerre en Ukraine semble avoir secoué les récalcitrants et contribué à basculer l’ensemble des pays de l’Union européenne, bon gré mal gré, vers une lutte ouverte avec la Russie. Cela impliquerait, entre autres, l’arrimage au bloc européen des derniers pays issus de l’éclatement de l’Union soviétique qui ont tenté de sauvegarder un semblant d’équilibre dans leurs relations avec l’Occident et la Fédération de Russie.
La dimension géostratégique aurait pris le dessus sur les dernières velléités pacifistes au sein de l’Union. “La sécurité est un élément de plus en plus important de nos relations bilatérales avec l’Arménie”, a déclaré le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell.
“Erronée et dangereuse”
Le ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères a qualifié la décision de l’UE de “partiale et unilatérale”. Un porte-parole du ministère déplore en termes clairs “une mesure erronée et dangereuse qui ne fait qu’exacerber les tensions dans la région”.
La décision a été prise à l’unanimité des pays membres, lors d’une session de l’organe suprême de l’Union, le Conseil européen. Elle marque l’aboutissement de mois de forcing, au cours desquelles la Hongrie exigeait qu’un tel effort devrait être élargi vers l’Azerbaïdjan aussi pour préserver la paix âprement acquise.
L’énoncé de la décision précise que l’aide devrait servir au déploiement d’un hôpital de campagne et d’installations auxiliaires pour une unité de l’armée arménienne de la taille d’un bataillon. Mais la déclaration de l’instance de décision de l’Union cache mal l’intention : "Elle vise également à renforcer la résilience de l’Arménie et à accélérer l’interopérabilité de ses forces armées en cas de participation future du pays à des missions et opérations militaires internationales, y compris celles déployées par l’UE”.
L’arrimage est amorcé
L’Arménie, par la voix de ses ministres des Affaires étrangères et de la Défense a remercié l’Union européenne pour sa “première aide militaire” à Erevan et célébré cette “étape très importante dans le partenariat entre l’Arménie et l’UE”.
Un fait marquant, aussi, c’est que la décision intervient dans la foulée de mesures allant dans le même sens. Les chefs de la diplomatie des pays de l’UE ont entériné, dans la même journée, une décision ultérieure, mandatant les instances dirigeantes d'entamer des discussions en vue de lever l’obligation de visa pour les Arméniens.
Si la déclaration, publiée lundi, fait toujours référence à l’accord signé en 2017 comme base au renforcement des rapports entre l’UE et l’Arménie, le gouvernement de Nikol Pashinian ne cache plus qu’il est engagé désormais dans une dynamique de ralliement du bloc européen.