En attaquant Rafah, Israël risque d’engendrer une catastrophe humanitaire sans précédent et de mettre en péril un traité de paix de 45 ans avec l’Égypte.
Après la ville de Gaza, puis Khan Yunis, Rafah est désormais la cible de raids de l’armée israélienne qui ont fait dans la nuit de vendredi à samedi plus de 25 morts, selon des sources locales.
Le premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a même donné des instructions à son armée pour se préparer à évacuer la population se trouvant à Rafah, en prévision d’une offensive élargie.
Située à la frontière, fermée, avec l’Égypte, cette ville abrite 1,3 million de Palestiniens, dont la grande majorité sont des personnes déplacées par la guerre qui sévit depuis octobre dernier.
"Ces bombardements sont la preuve que Rafah n'est pas un lieu sûr", lance Oum Hassan, 48 ans, dont la maison a été endommagée par la frappe.
Vendredi, le haut diplomate européen Josep Borrell a écrit dans un message sur les réseaux sociaux : “Les rapports faisant état d'une offensive militaire israélienne sur Rafah sont alarmants. Cela aurait des conséquences catastrophiques, aggravant la situation humanitaire déjà désastreuse et le bilan civil insupportable”.
Plus tôt dans la semaine, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, avait également mis en garde contre un “cauchemar humanitaire” dans la ville. Son porte-parole, Stéphane Dujarric, a ajouté plus tard : “Nous sommes extrêmement inquiets du sort des civils à Rafah... Je pense que ce qui est clair, c'est que les gens doivent être protégés, mais nous ne voulons pas non plus assister à des déplacements forcés, massifs, de personnes”.Par ailleurs, le chef de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, l'UNRWA, a déclaré qu'il y avait “un sentiment d'anxiété et de panique grandissant à Rafah”."Les gens ne savent absolument pas où aller après Rafah", a dit Philippe Lazzarini aux journalistes à Jérusalem."Toute opération militaire à grande échelle parmi cette population ne peut que conduire à une tragédie supplémentaire sans fin.", a-t-il ajouté.
Le forcing de Netanyahu
Netanyahu semble faire la sourde oreille pour le moment, si l’on se réfère à son attitude va-t-en-guerre.
Lors d’une intervention télévisée plus tôt dans la semaine, Netanyahu a confirmé avoir donné l’ordre à son armée de préparer une opération à Rafah, sur fond de craintes internationales, avant de demander vendredi soir à ses militaires de mettre en place des plans pour des évacuations massives de la ville.
Une attaque sur Rafah, mettent en garde les défenseurs des droits humains, pourrait déboucher sur “une catastrophe humanitaire”. L'OCHA (Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU), dans son rapport du 2 février, a indiqué que la situation à Rafah avait atteint un "point de basculement", soulignant l'urgence d'une intervention humanitaire.
La population de Rafah, qui s'élevait à environ 280 000 personnes avant ces attaques, a considérablement augmenté, dépassant 1,3 million d’habitants. La majorité vit dans des conditions précaires, dans de vastes camps de fortune à ciel ouvert.
Le traité de paix avec l'Égypte
L’Égypte voit d’un mauvais œil une éventuelle arrivée massive de réfugiés sur son territoire.
Le Caire a averti que toute opération terrestre ou tout déplacement massif à travers la frontière porterait atteinte au traité de paix signé il y a quatre décennies avec Israël.
Les 1,3 million de déplacés palestiniens se trouvent désormais dans une situation d’impasse ne sachant plus où fuir pour être à l’abri des bombardements israéliens.