En s’inspirant d’autres pays, comme la France et l’Espagne, où des régulations similaires ont déjà été mises en place, le Maroc cherche à concilier l’essor de la micro-mobilité avec les impératifs de sécurité publique / Photo: AFP (AFP)

L'irruption massive des trottinettes électriques dans les grandes villes du royaume soulève une question pressante : comment les autorités comptent-elles encadrer ce nouveau mode de transport, encore dépourvu de cadre juridique solide ?

Selon une source du secteur des assurances, les autorités publiques marocaines travaillent sur un dispositif pour réglementer leur usage. Un texte de loi existant, le dahir n° 1-84-177 du 2 octobre 1984, encadrant l’indemnisation des victimes d’accidents causés par des véhicules terrestres à moteur, pourrait servir de base juridique pour réguler cette nouvelle forme de mobilité. Ce cadre, conçu pour les véhicules motorisés classiques, pourrait être étendu aux trottinettes électriques, moyennant certains ajustements. En attendant, les utilisateurs peuvent opter pour une responsabilité civile afin de se protéger.

Mobilité douce

Alternative de plus en plus prisée aux moyens de transport traditionnels, la trottinette électrique se fait une place dans les grandes villes marocaines, en dépit du vide juridique qui entoure encore ce mode de déplacement.

Dans les rues animées de Casablanca, Khalid, jeune cadre, glisse rapidement entre les voitures grâce à sa trottinette flambant neuve. “C'est pratique, je mets moins de 10 minutes pour rejoindre mon bureau depuis la gare. Avant, je prenais un taxi et ça me prenait beaucoup plus de temps”, explique-t-il. Pour lui, l’économie de temps et d’argent est un atout majeur, d’autant plus qu’elle évite les embouteillages quotidiens.

Comme Khalid, nombreux sont les citadins qui voient dans la trottinette électrique une solution efficace pour leurs déplacements quotidiens. Initialement perçu comme un jouet pour enfants, cet engin a progressivement conquis un public adulte en quête de mobilité douce et pratique. “Avant, je prenais le tramway pour un trajet de 45 minutes, mais avec ma trottinette, j’ai divisé le temps de trajet par trois, en plus d’être entièrement autonome”, raconte un usager rencontré à Casablanca, visiblement satisfait de sa récente acquisition.

Les modèles se diversifient pour s'adapter aux usages : certains, légers et pliables, sont facilement transportables dans les transports en commun, tandis que d'autres, plus robustes, sont conçus pour les longues distances. À cela s'ajoutent des solutions comme les gyropodes, qui offrent une alternative intéressante pour les trajets urbains.

Défis sécuritaires

Cependant, l’usage des trottinettes électriques ne va pas sans critiques. Souvent associées à des comportements inciviques, elles perturbent parfois l'ordre public en raison du manque de règles strictes. “Les trottinettes et les motos créent un vrai problème de sécurité. Elles envahissent les trottoirs et roulent à toute allure sans respecter les piétons”, déplore un automobiliste à Casablanca. Les accrochages entre piétons, automobilistes et utilisateurs de trottinettes sont fréquents, notamment dans les zones urbaines denses.

Dans ce contexte de flou législatif, le marché des trottinettes électriques reconditionnées connaît un essor important. Ces modèles, souvent remis à neuf et débridés, peuvent atteindre des vitesses impressionnantes, parfois jusqu’à 120 km/h, ce qui soulève des questions de sécurité, notamment concernant l’équipement obligatoire, comme le casque, qui n'est toujours pas imposé. Malgré ces défis, le marché de la mobilité électrique ne cesse de croître au Maroc, suivant une tendance mondiale vers une mobilité plus durable.

Transition énergétique

Dans cette optique, des discussions sont en cours pour encadrer ce mode de transport, avec des mesures telles que la régulation des vitesses et l'obligation d'équipements de sécurité. L'objectif est de rendre cet engouement pour la mobilité électrique compatible avec des exigences de sécurité croissantes, tout en préservant son rôle clé dans la transition vers des villes plus durables.

En s’inspirant d’autres pays, comme la France et l’Espagne, où des régulations similaires ont déjà été mises en place, le Maroc cherche à concilier l’essor de la micro-mobilité avec les impératifs de sécurité publique. En parallèle, l'urbanisation croissante du Royaume appelle au développement d'infrastructures adaptées, telles que des pistes cyclables ou des zones réservées à ces nouveaux modes de transport.

Par ailleurs, cette transition vers une mobilité plus durable s'inscrit dans la stratégie de décarbonation du Maroc, un enjeu majeur pour les décennies à venir. Le défi pour les décideurs sera de concilier cette transition écologique avec la nécessité de garantir une sécurité optimale aux usagers, tout en évitant les dérives liées à un usage non régulé.

TRT Francais