Un gouvernement Bayrou dans la main du RN
Le gouvernement Bayrou a été annoncé hier soir à 18h30 heure de Paris. La mise à l’écart de Xavier Bertrand, le président républicain des Hauts-de-France laisse dire que cet exécutif est sous la coupe du Rassemblement National.
Bruno Retailleau retrouve son ministère de l'Intérieur, il aura comme ministre de la Justice, Gérald Darmanin/ Photo: AFP (AFP)

Xavier Bertrand n’a pas eu des mots assez durs pour expliquer son absence de ce gouvernement et pour gâcher un peu l’annonce de la composition du nouvel exécutif, il a publié son communiqué quelques minutes avant 18h30. Le président républicain de la région Hauts-de-France explique qu’on lui a proposé la justice et que ce lundi matin, on lui a proposé un autre ministère parce que le Rassemblement national ne veut pas de lui à la Justice. “En dépit de ses nouvelles propositions, je refuse de participer à un gouvernement de la France formé avec l'aval de Marine Le Pen. Accepter à ces conditions aurait été le reniement de mes valeurs, de mon engagement et de mes combats.”

“La seule ambition exposée par Bayrou était de ne plus dépendre du RN. Faute d’avoir accepté d’entendre les propositions de la gauche, voilà ce qu’il en reste. Rien”, écrit de son côté le sénateur communiste, Ian Brossat.

De nombreux commentateurs semblent vouloir voir dans cette reculade de François Bayrou le moyen de d’obtenir une non-censure du Rassemblement national. Rien n’a été déclaré officiellement mais ce serait un juste retour d’ascenseur.

Mais ce lundi soir, les commentaires des élus du RN ne sont guère enthousiastes; Jordan Bardella, le président du RN écrit même: "Heureusement que le ridicule ne tue pas !", il moque ainsi des nominations de personnes qui ont souvent fait l'unanimité contre elles, il parle de "coalition de l'échec."

Un gouvernement sous influence du RN?

Un retour d’ascenseur d’autant plus nécessaire que François Bayrou n’a pas réussi l’ouverture politique promise. Il souhaitait un gouvernement qui intègre la gauche et qui ne soit pas à la merci du RN.

Mais il a réuni autour de lui une équipe de droite, voire très à droite avec Bruno Retailleau, qui reste à l’Intérieur et Gérald Darmanin qui devient Garde des sceaux.

Ceux qui ont eu une coloration à gauche, ne l’ont plus depuis longtemps. L’ouverture à gauche est en ce sens râtée, il n’y a que des ex-socialistes, plus considérés comme des traîtres ou des élus passés à droite. François Rebsamen, maire de Dijon, hérite de l’Aménagement du territoire, mais il n'est plus au parti socialiste et il a soutenu Emmanuel Macron dès 2017. Elisabeth Borne arrive à l’Education nationale mais elle a été Madame 49.3, personne ne se souvient de son passage au parti socialiste, la dame est associée aux réformes contestées de Macron, la réforme des retraites et la réforme de l’assurance chômage.

Même causes, mêmes effets ?

Enfin Manuel Valls, ancien maire d’Evry, devient ministre de l’Outre-mer, il est considéré plus à droite que la droite et est même plutôt un irritant pour la gauche. Comment dans ce contexte éviter une censure de la gauche ?

Olivier Faure, premier secrétaire du parti socialiste n’est en tout cas pas emballé, il écrit juste après la présentation du gouvernement sur son compte X: “Ce n’est pas un gouvernement, c’est une provocation.”

Mathilde Panot, la présidente du groupe LFI à l’Assemblée a tweeté un peu dans le même style: “ce gouvernement n’a qu’un seul avenir, la censure.” Conclusion, le nouvel exécutif est à droite, il est même RN-compatible, est-ce que c’est la stratégie pensée par le centriste François Bayrou ? Les négociations pour faire voter le budget 2025 donneront un éclairage sur la possible entente avec le RN. Ou peut-être que François Bayrou parie sur le fait que le RN ne jouera pas deux fois la censure.

TRT Francais