Quatre ans après l’explosion du port de Beyrouth, l’enquête figée
Quatre ans après l’explosion qui a ravagé le port de Beyrouth, l'enquête semble au point mort, la reconstruction aussi. Aucun responsable de la catastrophe n’a été désigné. Les pressions politiques entravent la manifestation de la vérité...
Le port de Beyrouth, quatre ans après sa destruction, attend toujours la reconstruction... / Photo: AA (AA)

Cela fait exactement quatre ans que deux explosions ont soufflé le port de Beyrouth au Liban, avant de défigurer plusieurs quartiers de la ville, alors que 200 victimes et 6 500 blessés ont été recensés.

L’entrepôt 12 stockant des centaines de tonnes d’engrais à base de nitrate d'ammoniac avait accidentellement pris feu, provoquant une véritable catastrophe, selon la version des autorités libanaises.

Quatre ans après, l’impression de statu quo demeure au grand dam de la population libanaise qui cherche toujours à comprendre. La justice pour retrouver les coupables et les travaux de reconstruction sont encore au point mort.

“L’absence totale d’obligation de rendre des comptes pour une telle catastrophe d’origine humaine est stupéfiante“, a déploré, samedi, la coordinatrice spéciale des Nations unies pour le Liban, Jeanine Hennis-Plasschaert, dans un communiqué.

“On s'attendait à ce que les autorités concernées travaillent sans relâche pour lever tous les obstacles... mais c’est le contraire qui se produit“, a-t-elle déclaré, appelant à “une enquête impartiale, approfondie et transparente pour apporter la vérité, la justice et l’obligation de rendre des comptes”.

Beaucoup d’entraves à l'enquête

En décembre 2020, l’enquêteur principal, Fadi Sawan, a inculpé l’ancien Premier ministre, Hassan Diab, et trois anciens ministres de négligence, mais en raison de la pression politique croissante, il a été écarté de l’affaire.

Son successeur, Tarek Bitar, a demandé en vain aux législateurs de lever l’immunité parlementaire des députés qui étaient auparavant ministres. En décembre 2021, Bitar a suspendu son enquête après une série de poursuites judiciaires.

Mais en janvier de l’année dernière, il a repris les enquêtes, inculpant huit nouveaux suspects, dont de hauts responsables de la sécurité et le procureur général du Liban, qui, à son tour, a accusé Bitar d'«usurpation de pouvoir» et a ordonné la libération des détenus dans l’affaire.

Depuis, le processus est à nouveau au point mort.

Un responsable judiciaire, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a déclaré que Bitar “reprendrait ses procédures, à partir de la semaine prochaine” et qu’il avait l’intention de terminer “l’enquête et de rendre sa décision d’inculpation... d’ici la fin de l’année”.

Bitar fixera des dates pour l’interrogatoire des accusés qui n’ont pas encore comparu devant lui, selon le responsable.

Si le bureau du procureur ou d’autres responsables judiciaires compétents ne coopèrent pas, Bitar “délivrera des mandats d’arrêt par contumace” contre les accusés, a ajouté le responsable.

Les militants ont appelé à une mission d’enquête de l’ONU sur l’explosion, mais les responsables libanais ont rejeté à plusieurs reprises cette demande.

Toutefois, les investigations sont longues et complexes. Le dossier a de nombreuses ramifications internationales allant de la Russie à la Syrie en passant par le Mozambique, Chypre ou le Royaume-Uni. La cargaison de nitrate d’ammonium du port de Beyrouth implique des sociétés-écrans, des prête-noms et des destinataires fantômes.

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TRT Français et agences