Les premières incursions d'Israël dans la bande de Gaza ont eu lieu près de Beit Hanoun, au nord, et de Bureij, au centre de la bande. Selon des analystes cités par le Financial Times, cette approche suggère qu'Israël pourrait tenter d'encercler progressivement la ville de Gaza, que les responsables israéliens croient être la base d'une grande partie de l'infrastructure militaire du Hamas.
Le Hamas, très confiant, a annoncé que ses combattants attendaient l'armée israélienne de pied ferme et qu'ils “étaient prêts à se battre contre les envahisseurs”.
Amos Harel, correspondant militaire et auteur d'un livre sur le conflit israélo-palestinien, a déclaré dans un entretien au Financial Times, que les forces israéliennes s'étaient déplacées de 3 à 4 km à l'intérieur de Gaza, mais qu'elles n'étaient pas encore engagées dans des combats urbains.
"La logique semble être d'exercer une pression, de forcer les combattants du Hamas à sortir [de leurs tunnels] et de les frapper ensuite", explique-t-il.
Selon lui, la résistance rencontrée par Israël n'était pas "majeure" et qu'on ne savait pas pourquoi le Hamas n'avait pas tiré plus de missiles antichars sur les véhicules blindés de l'armée israélienne lorsqu'ils entraient dans la bande de Gaza.
Mais il serait erroné de faire une interprétation excessive de la réaction du Hamas à ce stade précoce, d'autant plus que les services de renseignement israéliens ont spectaculairement mal évalué les capacités et les intentions du groupe au début du mois, souligne la publication britannique.
"Tout ce qui s'est passé depuis le 7 octobre a été une énorme surprise. Je serais donc très prudent dans mes évaluations de ce que le Hamas peut ou ne peut pas faire", affirme pour sa part Eyal Hulata, qui était à la tête du Conseil national de sécurité d'Israël jusqu'au début de l'année.
Les forces terrestres israéliennes seront contraintes d'engager des affrontements directs avec les combattants du Hamas au cœur d'un environnement urbain que ces derniers maîtrisent parfaitement. Les civils se retrouveront constamment exposés au danger, et ce type de conflit asymétrique provoquera d'importantes destructions, ajoute l’ancienne responsable.
"La seule chose qui soit pire que le combat en terrain urbain est le combat dans les décombres du terrain urbain. Il y a tellement d'endroits où ils peuvent se cacher et tendre des embuscades", s'inquiète Hulata.
Des responsables israéliens affirment que la portée limitée de l'incursion initiale d'Israël reflétait un ensemble complexe de facteurs. Mais avant tout, Israël veut minimiser ses propres pertes, tout en essayant d'éviter d'entraîner d'autres adversaires dans la guerre.
"Nous ne prenons aucun risque. Lorsque nos soldats manœuvrent, nous le faisons avec une artillerie massive, avec 50 avions au-dessus de nos têtes qui détruisent tout ce qui bouge", affirme Amir Avivi, ancien commandant adjoint de la division de Gaza de l'armée israélienne.
Les responsables affirment en outre que les combats à Gaza seront intenses: le Hamas s'est entraîné au combat urbain et a construit un vaste réseau de tunnels, surnommé le "métro de Gaza", qui permet de déplacer les combattants et les armes sans être repéré. Il dispose également d'un arsenal d'armes antichars et d'engins explosifs improvisés.
"Détruire le Hamas paraît un objectif irréaliste. Israël continue de penser que supprimer les stratèges du Hamas suffit pour en arrêter le fonctionnement; mais le Hamas ne s'est jamais effondré lorsqu'on a frappé son commandement", rappelle dans un entretien à l'Écho, Samuel Longuet, chercheur au Groupe de recherche et d'information sur la paix et la sécurité.
"Donc, la destruction du Hamas en tant que force politique et militaire, je n'y crois pas", explique-t-il.
Les forces de défense israéliennes sont restées très discrètes sur les déploiements précis de l'une des opérations les plus importantes qu'elles aient menées depuis des décennies. Mais certains responsables israéliens affirment que le renforcement progressif des forces vise à réduire la probabilité que le Hezbollah, qui a mené une guerre d'un mois contre Israël en 2006, se joigne au conflit.
D'autres observateurs pensent que l'ampleur limitée de l'incursion initiale est un signe qu'Israël vise quelque chose de moins ambitieux que le renversement du Hamas.
"Il semble que leur objectif ne soit pas d'éliminer complètement le Hamas de Gaza. Il semble plutôt qu'ils veuillent dégrader l'infrastructure militaire et tuer les dirigeants. Mais la réponse honnête est qu'ils n'ont toujours pas précisé l'objectif final, peut-être parce qu'ils ne l'ont pas vraiment défini", explique au Financial Times un diplomate occidental qui a voulu garder l'anonymat.
L'ancien premier ministre Ehud Olmert, qui a supervisé les principales opérations terrestres à Gaza et au Liban, pense pour sa part qu'Israël dispose probablement de moins de temps que ne le pense le cabinet de guerre pour atteindre ses objectifs, compte tenu des images de destruction généralisée émanant de Gaza.
"Le temps est plus court que ne le pense [le cabinet de guerre]. Jusqu'à présent, [les États-Unis] nous ont fait des cadeaux. À l'avenir, ils pourraient nous donner des ordres", explique-t-il.
Les frappes israéliennes ont tué plus de 8500 personnes à Gaza et en ont blessé plus de 20 000, selon des responsables palestiniens. Les Nations unies ont prévenu que la décision d'Israël de restreindre sévèrement l'approvisionnement en électricité, en carburant, en eau et en marchandises de la bande de Gaza l'avait conduite au bord de l'effondrement humanitaire.