La France est confrontée cet été à une sécheresse historique. Il n’est tombé que 9,7 millimètres de pluie en juillet, un déficit de précipitations d’environ 84 % par rapport aux normales de la période 1991-2020, selon Météo-France.
La part du gâteau se réduit, les conflits augmentent
Depuis la mise en place des restrictions, plusieurs vols et pillages ont été signalés dans l’Hexagone, reflétant les tensions qui règnent autour de la gestion de l’eau.
Mi-juillet, 400 m³ d’eau destinée à la lutte contre les incendies étaient volés dans un bassin de rétention en Ardèche, département en "vigilance renforcée" sécheresse. Un club de moto-cross a avoué avoir pompé l’eau trois semaines plus tard pour assurer la sécurité d’un festival.
Les bâches de deux réserves d’eau agricoles, destinées à l’irrigation, ont été déchirées dans la nuit du lundi 8 au mardi 9 août en Vendée. Plusieurs collectifs et associations de défense de l’environnement accusent les bâches de pomper l’eau des nappes phréatiques et de privatiser un bien commun. Le préfet de Vendée a demandé un renfort des patrouilles autour des réserves.
Alors que d’après l’ONG France Nature Environnement, certains agriculteurs en Charente-Maritime irriguent leurs cultures malgré les limitations imposées, les jacuzzis de cinq habitations ont été éventrés dans les Vosges avec un message "l’eau, c’est fait pour boire".
Conséquence de la sécheresse dans les assiettes
L’agriculture n’échappe pas aux effets néfastes de la sécheresse qui fait peser la menace d'un renforcement de l'inflation alimentaire.
Alex Didier, un agriculteur franc-comtois, a perdu entre 30 % à 40 % de sa production de tournesol qui a "grillé au soleil", ainsi qu'un quart de son colza et de son blé. Il fait état de "la pire année" pour sa récolte en "45 ans de carrière" dans un reportage à l’Agence Anadolu.
Didier indique également que ses pâturages, qui permettent de nourrir ses vaches laitières, ont été perdus dans leur quasi-totalité.
En effet, selon l’Agreste, l’organisme statistique du ministère de l’Agriculture, la production d’herbe a été déficitaire en juillet (-21 % par rapport à la normale), menaçant directement l’alimentation des animaux. Les agriculteurs étant dans l’obligation de piocher dans les réserves hivernales, les spécialistes prévoient une augmentation de prix dans tous les produits laitiers et dans la production de viande.
Certains légumes gourmands en eau soulève également des inquiétudes comme la pomme de terre. "On a eu peu d’eau sur l’ensemble de la France, donc certainement on aura une moindre récolte de pommes de terre et automatiquement on aura certainement des prix un peu à la hausse" a expliqué Yannick Fialip, président de la commission économique de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles.
Quatre niveau d’alerte
Pour faire face à ce phénomène inédit de sécheresse, le gouvernement a mis en place des niveaux d’alerte dans tous les départements métropolitains pour réduire la consommation d’eau. Vigilance, alerte, alerte renforcée, crise : il existe quatre niveaux des limitations de l’usage de l’eau.
Pour le premier niveau d’alerte "vigilance", aucune restriction n’est appliquée, il s’agit seulement de sensibiliser les habitants à économiser de l’eau.
Lorsqu’un territoire est placé sous "alerte" et "alerte renforcée", les activités comme l’arrosage des jardins ou le lavage de voiture sont interdites, les mesures d’activité nautique et des prélèvements à des fins agricoles inférieures sont réduites.
Au niveau maximum, dans les zones en "crise", des restrictions plus lourdes sont mises en place comme l’arrêt total des prélèvements non-prioritaires y compris des prélèvements à des fins agricoles. Seuls les prélèvements permettant d’assurer l’exercice des usages prioritaires sont autorisés comme la santé, la sécurité civile ou la salubrité.
Selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, 93 départements sont concernés par une restriction au-delà de la vigilance, sur au moins une partie du territoire : 3 en alerte, 21 en alerte renforcée et 69 en crise.
Privation d’eau potable
Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a annoncé que plus de 100 communes étaient privées d’eau potable et approvisionnées par des camions en qualifiant la situation d’"historique". "Il y a des approvisionnements qui se font avec des camions d’eau potable qu’on achemine […] puisqu’il n’y a plus rien dans les canalisations. Tout l’enjeu c’est de durcir un certain nombre de restrictions pour éviter d’en arriver là" a précisé le ministre.
La semaine dernière, la Première ministre Élisabeth Borne a activé la cellule interministérielle de crise face à la "situation historique que traversent de nombreux territoires".