Keffiehs, drapeaux palestiniens, slogans… ils sont nombreux à avoir répondu à l’appel à dénoncer le “massacre à gaza" et appeler à un cessez-le-feu. La place est noire de monde et les forces de l’ordre bloquent en bouche chaque entrée.
L’appel avait été lancé dans la journée de lundi par de nombreuses organisations et syndicats en réaction à la frappe israélienne qui a tué, dans la nuit, au moins 45 personnes dans un camp de déplacés à Rafah, au sud de la bande de Gaza.
De fait, le cortège qui s’était élancé de la place Saint-Augustin pour marcher vers l’ambassade israélienne à Paris est stoppé après quelques dizaines de mètres seulement.
Un drapeau et une pancarte dans la main, Sarah se tient droite devant la ligne de CRS. “C'est le minimum qu'on peut faire”, dit-elle, en évoquant le sort des Palestiniens déplacés qui ont été bombardés à Rafah. “Pendant que les enfants dorment dans des tentes, Israël se permet de bombarder les gens, qui meurent, brûlés chez eux”.
Dans la foule, beaucoup de jeunes, mais aussi des personnes plus âgées, des familles avec leurs enfants. Devant une autre artère bouchée, Myriam crie sa colère et interpelle les forces de l’ordre, droit dans les yeux. “Ça ne vous dérange pas qu'on ait tué des mamans et des bébés ?” “Vous avez une âme, vous avez un cœur, je suis sûr que vous êtes des papas et des mamans, j'en suis sûre. Qu'est-ce qu'on leur laisse à nos enfants ? Venez marcher avec nous !”, enjoint-elle aux CRS casqués derrière leur bouclier.
“On est en train de montrer des bébés incendiés, des enfants. On leur dit : vous êtes en zone sûre et en fait, on les bombarde”, déclare-t-elle à TRT français. “Ça suffit, tout le monde est réveillé aujourd’hui. Et on ne peut pas laisser l'oppression comme ça, ce n'est pas possible”, ajoute Myriam. Elle appelle le gouvernement français à être “solidaire” et à reconnaître “l’Etat palestinien” comme l’ont fait l’Espagne, l’Irlande et la Norvège.
Elle se réjouit, d’ailleurs, de la présence d’élus dans la manifestation. Clémentine Autain (député LFI) est aperçue dans la manifestation. “Il y a des élus qui lui disent stop. J'ai encore un peu d'espoir malgré tout”, reconnaît ainsi Myriam. “Quand on voit tout ce monde-là, je crois qu'il n'y a jamais eu autant de monde. En tout cas, dans ce quartier, on n'a jamais vu autant de monde”. Selon certains organisateurs, 10.000 personnes se seraient mobilisées pour la Palestine.
Dominique Cochain, avocate au barreau de Paris voudrait que “la France convoque l'ambassadeur d'Israël, voire même l’expulse, purement et simplement. “Mais bien évidemment, notre gouvernement n'aura pas le courage d'une telle action qui pourtant s'imposerait normalement”, note-t-elle.
Le rassemblement, longtemps statique, s’est élancé vers la gare Saint-Lazare. Sur le trajet, le long de la rue Pépinière, les manifestants ont ciblé notamment les magasins Carrefour, Optical Center et Starbucks, accusés de soutenir l’occupation israélienne. Des clameurs résonnent aussi longuement quand quelques manifestants parviennent à brandir le drapeau palestinien sur le toit d’un immeuble haussmannien.
Rima Hassan, juriste franco-palestinienne et sur la liste de LFI aux élections européennes rejoint alors le cortège, accompagnée de députés LFI, dont Louis Boyard. Aussitôt reconnue, elle est adulée par les manifestants qui l’acclament “Rima, Rima, on est tous avec toi’ et veulent faire des selfies avec elle. Ce à quoi elle se prête volontiers, avec le sourire. L’enthousiasme est tel que le cortège la suit dans les petites rues qu’elle emprunte autour de la gare Saint-Lazare, avant que les membres de la sécurité n’enjoignent aux manifestants de cesser de la suivre. Ceux-ci marchent encore dans le quartier avant que les forces de l’ordre ne tentent de les disperser avec des bombes lacrymogènes.
A 22:00, la foule se disperse. Et un message est lancé à travers un mégaphone. “Rendez-vous place de la République pour continuer la mobilisation !”.
Malgré des condamnations internationales et une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité de l’ONU, Israël poursuit ce mardi ses frappes sur Rafah.