Mandat d'arrêt contre Netanyahu: la France soutient la CPI
Le Quai d’Orsay a affirmé lundi soutenir la Cour pénale internationale (CPI), “son indépendance, et la lutte contre l'impunité dans toutes les situations”, après l'émission d'un mandat d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.
Mandat d'arrêt contre Netanyahu: la France “soutient la CPI dans toutes les situations” / Photo: Reuters Archive (Reuters Archive)

La déclaration de la diplomatie française intervient quelques heures après que le procureur de la CPI, Karim Khan, a demandé la délivrance de mandats d’arrêt visant le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, et son ministre de la Défense, Yoav Gallant, ainsi que trois dirigeants du Hamas, pour des faits qualifiés “de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité”.

Le Quai d’Orsay souligne qu’il appartient désormais “à la chambre préliminaire de la Cour de se prononcer sur la délivrance de ces mandats, après avoir examiné les éléments de preuve avancés par le Procureur pour étayer ses accusations, en tenant compte du principe de complémentarité et de l’action possible des juridictions israéliennes”.

Le Quai d’Orsay rappelle, par ailleurs, avoir alerté “depuis de nombreux mois sur l’impératif de respect strict du droit international humanitaire et notamment sur le caractère inacceptable des pertes civiles dans la bande de Gaza et d’un accès humanitaire insuffisant”.

Le communiqué de la diplomatie française mentionne également que la France “est engagée pour la recherche d’une solution politique durable dans la région, la seule qui permette de rétablir un horizon de paix et de mettre fin aux souffrances des Israéliens comme des Palestiniens”.

Biden… C’est “scandaleux”

De son côté, le président américain Joe Biden a fustigé dans un communiqué cette démarche qu'il a qualifiée de "scandaleuse", tandis que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, l’a caractérisée de "honte".

"Je vais être clair : quoi qu'insinue le procureur, il n'y a pas d'équivalence entre Israël et le Hamas, il n'y en a aucune. Nous nous tiendrons toujours aux côtés d'Israël contre les menaces à sa sécurité", a asséné le président américain.

Quant à Antony Blinken, il a jugé que la demande du procureur "pourrait compromettre" les pourparlers sur le cessez-le-feu dans la bande de Gaza et rappelé que la CPI n'a "pas de juridiction" sur Israël, qui n'est pas membre de ce tribunal, comme du reste, les Etats-Unis.

"En tant que Premier ministre d'Israël, je rejette avec dégoût la comparaison du procureur de La Haye entre Israël", un pays "démocratique", et "les meurtriers de masse du Hamas", a, de son côté, commenté M. Netanyahu.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Israël Katz, a très vite dénoncé une "décision scandaleuse", "un déshonneur historique" pour la CPI, qui a son siège à La Haye.

Le mouvement de résistance palestinien, Hamas, a, pour sa part, dit "condamner fermement" la décision du procureur de la Cour et dénoncé ses "tentatives" d'"assimiler la victime au bourreau".

L'Allemagne a regretté la "demande simultanée" du procureur qui donne, selon Berlin, "l'impression d'une fausse équivalence" entre les dirigeants israéliens et ceux du Hamas.

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a, pour sa part, dit "prendre note" de la demande du procureur, soulignant que "tous les Etats qui ont ratifié les statuts de la CPI sont tenus d'exécuter" ses décisions.

"Crimes contre l'humanité"

Si les juges de la CPI décident d'émettre le mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahu, cela signifie qu'en théorie, n'importe lequel des 124 Etats membres de ce tribunal serait obligé de l'arrêter s'il se rendait sur leur territoire.

Mais même si le mandat compliquait certains déplacements de M. Netanyahu, la CPI ne dispose d'aucune force de police pour faire appliquer ses mandats et s'appuie sur la volonté de ses Etats membres de coopérer.

Le procureur Karim Khan a déclaré dans un communiqué qu'il demandait des mandats d'arrêt contre M. Netanyahu et le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, pour des crimes tels que "le fait d'affamer délibérément des civils", "homicide intentionnel" et "extermination et/ou meurtre".

"Nous affirmons que les crimes contre l'humanité visés dans les requêtes s'inscrivaient dans le prolongement d'une attaque généralisée et systématique dirigée contre la population civile palestinienne dans la poursuite de la politique d'une organisation. D'après nos constatations, certains de ces crimes continuent d'être commis", a affirmé Khan, évoquant Netanyahu et Gallant.

La CPI avait ouvert une enquête en 2021 sur Israël mais aussi sur le Hamas et d'autres groupes armés palestiniens, pour de possibles crimes de guerre dans les Territoires palestiniens.

Elle l'a ensuite étendue "à l'escalade des hostilités et de la violence depuis les attaques du 7 octobre 2023" perpétrées par le Hamas sur le sol israélien.

M. Khan a appelé à plusieurs reprises à la libération de tous les otages de Gaza et mis en garde contre une opération militaire israélienne à Rafah.

A la mi-novembre, cinq pays ont demandé une enquête de la CPI sur la guerre à Gaza, M. Khan affirmant que son équipe avait rassemblé un "volume important" de preuves sur des "incidents pertinents".

La CPI a fait la une des journaux en mars 2023 lorsqu'elle a émis un mandat d'arrêt contre le président russe, Vladimir Poutine, accusé du crime de guerre de déportation illégale d'enfants ukrainiens.

Agences