Une école de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) a été bombardée dans la nuit du 5 au 6 juin par l’armée israélienne à Gaza. L’école servait de refuge à 6000 civils déplacés par les combats. On dénombre une trentaine de morts.
Jonathan Fowler, responsable communication pour l’UNRWA déplore qu’une nouvelle fois une école sous le drapeau de l’ONU soit ciblée. “Depuis le début de la guerre, nos écoles sont transformées en abri d’urgence mais à maintes reprises, ces écoles sont bombardées. Les attaques ont visé 170 écoles ou bâtiments de l’UNRWA, certains plusieurs fois, et près de 450 personnes ont été tuées parmi les personnes abritées, 1404 ont été blessées. C'est grave parce que ce sont des lieux qui doivent offrir une protection sous le drapeau du Nations unies. Le fait que ces lieux ont été touchés, c'est un signe très, très inquiétant.”
Au cours de ces neufs mois de guerre à Gaza, de nombreux bâtiments de l’UNRWA ont été détruits, des écoles, des cliniques, des bureaux, pourtant souligne l’agence onusienne, les autorités israéliennes ont les coordonnées exactes des bâtiments de l’ONU. L’UNRWA dénombre 192 employés tués en neuf mois. C’est le chiffre le plus élevé jamais enregistré pour des agents de l’ONU lors d’un conflit depuis la création des Nations unies.
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Israël multiplie les attaques contre l’UNRWA
Courant mai, des manifestations ont eu lieu devant les bureaux de l’agence à Jérusalem-Est. Après des jets de pierre, des intimidations contre le personne qui venait travailler, deux incendies ont été allumés par de jeunes manifestants sous les yeux de la police. Puis fin mai, l’UNRWA apprenait par les médias qu’Israël l'expulserait de ses locaux de Jérusalem-Est sous 30 jours, au motif que l’agence des Nations Unies n'avait pas signé de bail en bonne et due forme.
Le responsable communication demande : “payer le loyer à qui ? Nous sommes dans nos locaux de Jérusalem Est depuis le début des années 50 et nous avons signé un bail de longue durée avec les autorités jordaniennes (qui administrait cette région à l’époque)." Les locaux de l’UNRWA sont en effet situés en Cisjordanie occupée, et non en Israël, l’agence compte donc rester dans ses locaux.
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Une campagne tous azimuts est orchestrée contre l’UNRWA par Israël qui veut la fermeture de l’agence comme si elle était le symbole d’un problème palestinien qu’elle veut voir disparaitre.
Jonathan Fowler répond tout simplement, “cette agence a été créée par l’Assemblée générale des Nations unies en 1949 pour gérer la crise des réfugiés palestiniens, et nous sommes toujours là parce que la crise des réfugiés continue 75 ans après.”
Le personnel de l’UNRWA harcelé
Pour l’UNRWA, cela se traduit aussi par des harcèlements incessants envers les employés de l’agence. On leur refuse parfois le passage d’un check-point, ils sont menacés ou interdits de déplacement, en totale contradiction avec les usages diplomatiques. “Par exemple, un professeur qui vit à Ramallah et travaille à Bethléem, avant cela prenait 20 mn, aujourd’hui ça peut prendre 3 à 4 heures donc on ne sait jamais si le personnel peut venir travailler. On a aussi connu des incursions de l’armée israélienne dans les écoles. Les habitants sont régulièrement appelés à rester chez eux par les forces de sécurité. On doit s’adapter en permanence.”
Les violences se sont multipliées en Cisjordanie occupée, 523 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre par les forces de sécurité israéliennes ou les colons. L’armée investit régulièrement les camps de réfugiés, détruisant au passage maisons et infrastructures et tirant sur les personnes qui protestent.
Mardi dernier, le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, a accusé Israël de provoquer une “effusion de sang sans précédent”. Selon lui, les forces de sécurité israéliennes ont souvent eu recours "à la force létale comme première option contre les manifestants palestiniens (...) dans des cas où les personnes abattues ne représentaient clairement pas une menace imminente pour la vie.”
A Gaza, la situation est d’autant plus compliquée qu’Israël refuse de travailler avec l’UNRWA. L’agence confirme qu’elle n’arrive à faire passer que très peu d’aide humanitaire.
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Ce bras de fer avec l’agence culmine après le 7 octobre, Tel-Aviv accuse alors l’agence d’être infiltrée par le Hamas, 19 personnes sont soupçonnées d’avoir collaboré avec le Hamas, voire d’avoir participé aux attaques du 7 octobre mais les enquêtes n’ont pour l’instant rien montré en ce sens. Jonathan Fowler glisse un petit calcul, “l’UNRWA comptait 13 000 salariés à Gaza, si 12 personnes ont réellement des liens avec le Hamas, cela voudrait dire qu’à 99, 9% nous sommes neutres.” Israël accuse, elle, l’agence d’être totalement infiltrée par le Hamas sans aucune preuve à ce jour.
Malgré tout, les accusations de Tel Aviv ont suffi pour que plusieurs pays, comme la France ou les Etats-Unis, suspendent leurs financements de l’agence. .
La situation s’est tellement dégradée que l’UNRWA a failli interrompre ses activités en février dernier. Aujourd'hui, elle peut continuer à fonctionner jusqu’en juillet prochain grâce à l’arrivée de nouveaux pays donateurs et à la reprise des versements par certains anciens bailleurs, d’autres ont même augmenté leur contribution comme la Norvège.
A ce jour, seuls le Royaume-Uni et les Etats-Unis n’ont pas repris leurs financements, pire Washington a suspendu tout versement jusqu'en mars 2025.
L’UNRWA gère en temps de paix 600 écoles, 140 cliniques, 45 000 élèves dans 58 camps de réfugiés palestiniens en Cisjordanie occupée, à Gaza, en Jordanie, Liban, et Syrie.