Législatives en France: l’échec du président Macron
Alors que Macron ressort très affaibli du premier tour des législatives et se prépare à une fin de quinquennat agitée, le Premier ministre Attal reconnaît lui que l’extrême droite est aux portes du pouvoir.
Le président français Macron vote au premier tour des élections législatives anticipées de 2024 / Photo: Reuters (Reuters)

Avec la percée du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN) qui peut désormais espérer une majorité relative, voire absolue, "c'est un pari raté", résume Adelaïde Zulfikarpasic, directrice générale de l'institut de sondages BVA. "Emmanuel Macron est en difficulté, alors qu'il s'était érigé en barrage (...) depuis 2017", face au Front national, devenu Rassemblement National en 2018, ajoute-t-elle.

La dissolution de l’Assemblée nationale (décidée le 9 juin après le faible score remporté aux élections européennes), "c'est un des gestes les plus inconsidérés de l'histoire de la Ve République, fondé sur les projections les plus absurdes", renchérit Vincent Martigny, politologue à l'université Nice Côte d'Azur et à l'Ecole polytechnique.

Le chef de l'Etat avait misé sur une gauche divisée et une arrivée de son camp en deuxième position derrière le Rassemblement national, qui engrange plus de 34% des voix, selon de premières estimations au soir du premier tour.

La gauche, montée en front uni, arrive finalement deuxième (28-29%), contraignant le camp présidentiel à de multiples désistements s'il veut faire barrage à l'extrême droite.

"Ca accélère vraiment la chute de Macron. Les conséquences pour lui vont être létales. Il perd tout", estime Vincent Martigny.

Sa majorité relative - 250 sur 577 dans l'Assemblée sortante - va fondre comme neige au soleil (60 sièges selon les projections les plus pessimistes) et se recomposer autour d'autres que lui, quelle que soit l'issue du second tour le 7 juillet.

Légitimité

Son ex-Premier ministre Edouard Philippe s'est déjà posé en recours, l'accusant d'avoir "tué la majorité présidentielle".

Le chef de l'Etat perd aussi l'autorité sur son camp, "entre l'exaspération et la haine" depuis sa décision intempestive de dissoudre le 9 juin, souligne Vincent Martigny. "On est très en colère", lâche un cadre de la majorité, amer.

C'est également la fin de l'hyperprésidence en place depuis 2017, comme un "septennat" qui s'achève, pointe un ancien ministre.

Qu'Emmanuel Macron entre en cohabitation avec le RN ou doive composer avec une majorité élargie ou un gouvernement technique, rien ne sera plus comme avant.

Exit le président à la fois chef du gouvernement, de la majorité et ministre, faisant toutes les annonces et arbitrant toutes les décisions. Le futur Premier ministre aura en outre sa légitimité propre.

"Si les citoyens votent pour une autre légitimité, la sienne, au niveau juridique, il ne l'a plus", estime Mathilde Philip-Gay, professeure de droit public à l'université Lyon 3.

"Il va connaître une période de faiblesse. La question, c'est jusqu'où il va en avoir conscience et savoir la gérer", prédit un soutien de la première heure.

Attal appelle au barrage contre l’extrême droite

"Pas une voix ne doit aller au Rassemblement national" et à son "projet funeste" au deuxième tour des législatives dimanche 7 juillet, a lancé le Premier ministre français sortant, qui reconnaît, en passant, que “l’extrême droite est aux portes du pouvoir”.

"Ce soir n'est pas un soir comme les autres. La leçon de ce soir, c'est que l'extrême droite est aux portes du pouvoir. Notre objectif est clair: empêcher le Rassemblement national (extrême droite) d'avoir une majorité absolue au second tour", a déclaré Gabriel Attal, qui a appelé au "désistement" des candidats de la majorité présidentielle, "dont le maintien en troisième position aurait fait élire un député Rassemblement national face à un autre candidat qui défend comme nous les valeurs de la République", dans le but d'empêcher le RN d'avoir une majorité absolue à l'Assemblée nationale.

Agences