La France expulse un imam malgré une décision de la justice administrative
Le président de la mosquée de Pessac, a été interpellé, ce jeudi matin, dans le cadre d'une procédure d'expulsion, quelques jours après une décision de justice ouvrant pourtant la voie à sa régularisation.
Abdourahman Ridouane est le président de la mosquée de Pessac. Photo : AA (Others)

Le président de la mosquée de Pessac (Sud-Ouest de la France), Abdouramane Ridouane, a été perquisitionné et interpellé ce jeudi matin, a-t-on appris auprès de son avocat.

Le responsable religieux, qui a pourtant remporté, samedi, un recours intenté en référé devant la justice administrative en vue de l’obtention de son titre de séjour, est visé par un arrêté ministériel d’expulsion vers son pays d’origine, le Niger.

Au mois de juin, le tribunal judiciaire de Bordeaux avait émis un avis défavorable à cette expulsion.

Pour la commission chargée d’examiner la demande d’expulsion formulée par la préfecture "les publications Facebook de M. Ridouane -unique fondement utilisé par la préfecture- ne démontrent pas que ce dernier aurait un comportement de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat", relevait, alors, son avocat, maître Sefen Guez Guez.

"C'est une première victoire satisfaisante pour le président de la mosquée de Pessac, qui salue le travail minutieux effectué par la commission", commentait ce dernier qui estimait que "l’acharnement que subit la mosquée de Pessac, par la préfecture d'abord en 2022, dans une tentative ratée de faire fermer le lieu de culte, puis par l'extrême droite qui a encore vandalisé le lieu de culte le 26 mai dernier, doit cesser".

Dans son communiqué, le conseil considérait enfin que "les temps troubles" qui sont vécus dans le pays, nécessitent "un vrai apaisement auquel le président de la mosquée de Pessac veut croire".

Pour rappel, Abdouramane Ridouane est visé par une procédure d’expulsion depuis début mai et assigné à résidence depuis fin mai.

Cause palestinienne

Dans un entretien à Anadolu, son avocat soulignait récemment qu’il était ciblé par les autorités en raison de "son attachement à la défense de la cause palestinienne et sa critique de la politique internationale de la France, y compris au Niger, son pays d'origine".

Pour justifier son assignation à résidence, les services préfectoraux se sont notamment basés sur plusieurs éléments, dont le passage de la flamme olympique à Bordeaux, et les Jeux olympiques. Il lui est également reproché d’avoir publié en ligne une caricature dénonçant une forme de deux poids deux mesures dans le traitement réservé aux Palestiniens par rapport à celui réservé aux Ukrainiens.

Maître Guez Guez ne manque pas de rappeler que ce n’est pas la première fois que son client et la mosquée de Pessac s’opposent à l’administration puisqu’en 2022 déjà, le ministère de l’Intérieur avait tenté de faire fermer le lieu de culte, avant que la mesure ne soit rejetée par le tribunal administratif de Bordeaux puis par le Conseil d’Etat.

"Cet acharnement n'est qu'une illustration de plus de la volonté des pouvoirs publics de faire taire toute voix contestataire dans une logique d'affichage à l'approche des élections européennes", estimait à cet effet l’avocat niçois.

Pour rappel, fin 2022, Mediapart révélait que le ministère de l’Intérieur avait établi une liste de nombreux imams à expulser. Dans le même temps, le ministre Gérald Darmanin reconnaissait à l’antenne de BFMTV qu’un peu "moins d’une centaine de personnes" pourraient être ciblées.

Agences