France: le bras droit de Macron inculpé pour prise illégale d'intérêts
Le bras droit du président français Emmanuel Macron, le secrétaire général de la présidence Alexis Kohler, a été inculpé pour prise illégale d'intérêts dans l'enquête sur ses liens avec l'armateur MSC, a indiqué lundi le procureur.
France: le bras droit de Macron inculpé pour prise illégale d'intérêts (Reuters)

Alexis Kohler, reste à son poste auprès du président Emmanuel Macron après son inculpation le 23 septembre, a-t-on appris lundi à la présidence.

Il a également été placé sous le statut de témoin assisté pour trafic d'influence dans cette affaire visant ses liens familiaux et professionnels avec l'armateur italo-suisse, fondé et dirigé par les cousins de sa mère, la famille Aponte, selon le procureur national financier Jean-François Bohnert, confirmant une information de France info.

Le numéro deux de l'Elysée "conteste avec force avoir commis tout délit", a déclaré de son côté son avocat dans un communiqué.

"Sans que soient pris en considération à ce stade les nombreux éléments objectifs à décharge, Alexis Kohler a été placé sous le statut de mis en examen (ndlr : inculpé) pour prise illégale d’intérêt pour des faits pouvant remonter à plus de dix ans", a expliqué son avocat, Me Dezeuze.

"La suite de la procédure, à laquelle il a désormais accès" va "lui permettre de démontrer son innocence", a-t-il assuré.

L'affaire était née après la publication en 2018 de plusieurs articles du site Mediapart. Le parquet national financier (PNF) avait ouvert une enquête préliminaire, qu'il avait classée sans suite en août 2019, indiquant que l'analyse des éléments recueillis "ne (permettait) pas de caractériser les infractions initialement suspectées".

Mais l'association anticorruption Anticor a obtenu la relance des investigations en juin 2020 grâce à une plainte avec constitution de partie civile, qui permet la plupart du temps la désignation d'un juge d'instruction.

MSC est un important client de l'entreprise STX France (aujourd'hui renommée Chantiers de l'Atlantique) qui gère les chantiers navals de Saint-Nazaire (ouest).

Au cours de l'enquête préliminaire, une douzaine de personnes ont notamment été entendues par la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE), dont Alexis Kohler.

Ces investigations avaient donné lieu à la rédaction de deux rapports de police successifs contradictoires, selon des éléments de l'enquête dont avait eu connaissance l'AFP.

Dans un premier - qualifié d'intermédiaire par le PNF -, daté du 7 juin 2019 et faisant 34 pages, un enquêteur écrit par exemple que M. Kohler "ne prend aucune mesure pour organiser un déport formalisé", à savoir ne pas intervenir sur les questions liées à MSC lorsqu'il travaille pour le ministre Pierre Moscovici ou qu'il "ne met en place aucun déport" quand il est ensuite directeur de cabinet d'Emmanuel Macron.

Les conclusions du second rapport, plus court de 11 pages et daté du 18 juillet 2019, sont moins sévères: le même enquêteur détaille ainsi que des déports d'Alexis Kohler ont bien été organisés quand il a travaillé à Bercy.

Emmanuel Macron avait lui-même pris la plume via une "note personnelle" en juillet 2019 en faveur de M. Kohler et envoyée au PNF par son avocat, assurant que son collaborateur n'était jamais intervenu, au moment où il était son directeur de cabinet à Bercy, dans des dossiers liés à l'armateur italo-suisse MSC.

"Dans la mesure où le plus haut fonctionnaire de l'Etat est mis en examen pour prise illégale d'intérêts, la question qui se pose maintenant est celle de sa démission", a estimé auprès de l'AFP l'avocat d'Anticor Jean-Baptistes Soufron, évoquant un "énorme travail, sérieux et approfondi" des juges instructeurs.

Alexis Kohler, bras droit et fidèle du président, discret, se tient loin des médias.

Ce haut fonctionnaire de 49 ans occupe le poste stratégique de secrétaire général de l'Elysée depuis le début du premier quinquennat.

Installé dans un bureau voisin du président, il gère au quotidien les situations d'urgence, les gros dossiers économiques et sociaux, mais aussi politiques.

AFP