Gérald Darmanin, actuel locataire de la place Beauvau, aurait donné à l’époque où il occupait le poste de ministre des Comptes publics, des conseils financiers au Paris Saint-Germain (club de la capitale parisienne), contre la jurisprudence de l’administration dont il avait la tutelle.
Selon l’enquête de Mediapart, basée sur des documents inédits issus des ‘’Football Leaks’’, obtenus par Der Spiegel et partagés avec le réseau de médias European Investigative Collaborations (EIC), ainsi que des documents judiciaires dévoilés par ‘’Libération’’ et ‘’L’Équipe’’, le PSG a évité de payer, grâce à cette aide du ministre, une facture de plusieurs centaines de millions d’euros (jusqu’à 224 millions selon les avocats fiscalistes du club) de taxes sur le transfert de Neymar.
Mediapart ajoute que cette affaire impliquait à l’époque, outre Darmanin, le directeur général du PSG, Jean-Claude Blanc, le directeur de la communication du club Jean-Martial Ribes, le directeur de cabinet de Gérald Darmanin Jérôme Fournel, ainsi que le député macroniste et vice-président de l’Assemblée nationale Hugues Renson. La même source indique que Hugues Renson rendait régulièrement des services au PSG et bénéficiait de places gratuites au carré VIP du Parc des Princes.
La justice s’est penchée sur le transfert de Neymar dans le cadre de l’affaire des ‘’barbouzeries du PSG’’, qui porte sur des enquêtes présumées illicites (via la consultation de fichiers de police) et des opérations de déstabilisation menées notamment au sein du club, ainsi que sur l’armée numérique pilotée par le directeur de la communication du club, Jean-Martial Ribes, avance Mediapart.
Jean-Martial Ribes a été mis en examen le 1er décembre 2023 dans cette affaire pour sept délits, dont entre autres la corruption et le trafic d’influence dans le volet concernant le transfert de Neymar.
L’affaire débute en juillet 2017 lorsque la direction du PSG, voulait s'attribuer les services de la star brésilienne du FC Barcelone. Étant donné que le club catalan refusait de le vendre, la seule solution était de payer 222 millions d’euros, le montant de sa clause libératoire.
Mais ce transfert posait un problème fiscal puisque le contrat de Neymar prévoit que c’est au joueur de payer cette somme au club catalan pour se libérer.
Autrement dit, le PSG devait d’abord verser, pour ce faire, les 222 millions à l’attaquant brésilien, avec ‘’le risque que ce paiement soit assujetti en France à l’impôt sur le revenu, mais surtout aux cotisations sociales qui financent la Sécu, comme n’importe quelle rémunération’’, explique Mediapart.
Hugues Renson aurait servi d'intermédiaire à l'entrée en piste de Darmanin dans cette affaire.
Pour débloquer le problème, le cabinet de Darmanin, représenté par son directeur Jérôme Fournel aurait proposé des pistes au PSG, contre la jurisprudence de la caisse centrale de l’Urssaf (Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales), - dont son ministre a la cotutelle (avec le ministre de la Santé) - pour échapper aux cotisations dans le cadre de cette transaction.
‘’Les Urssaf se sont récemment prononcées, dans des cas assez similaires, dans le sens de l’assujettissement dans le cadre de contrôles dans le secteur du rugby, a-t-il écrit le 24 juillet 2017 dans un mail adressé à Jean-Claude Blanc. […] Même avec la meilleure volonté, les Urssaf pourront difficilement opérer un virage à 180 degrés sur ce dossier. […] Il est donc indispensable que la solution présentée aux Urssaf – il faudrait y veiller en amont – soit suffisamment différente et éloignée des précédents récents pour leur laisser un espace d’interprétation’’, rapporte Mediapart.
Après avoir suivi les consignes du directeur de cabinet de Gérald Darmanin, le club parisien recevra le 27 juillet deux rescrits fiscaux, venant du fisc et de l’Urssaf, lui annonçant l’absence d’impôt et de cotisation sociale sur le paiement de ce transfert.
Le 3 août, quelques heures avant l’officialisation du transfert de Neymar, Gérald Darmanin s’en était félicité au micro de France Inter, en raison ‘’des impôts qu’il [Neymar] va pouvoir payer en France’’.
‘’Il vaut mieux que ce joueur de football paie ses impôts en France qu’il les paie ailleurs’’, avait-il expliqué, ajoutant que ‘’les intérêts du pays, et notamment ses intérêts financiers, seront bien observés’’. Gérald Darmanin avait passé sous silence la faveur fiscale qu’il avait accordée au PSG pour faciliter la venue de Neymar.