Tunisie: un activiste d'aide aux migrants en garde à vue au pôle antiterroriste
Un militant tunisien actif dans l’assistance aux migrants a été interpellé et transféré au pôle antiterroriste, suscitant des craintes auprès des activistes défendant les droits des migrants.
Abdallah Said, fondateur d'”Enfants de la Lune de Médenine”/ Photo :  Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES) (Others)

Le dirigeant d'une association d'aide aux migrants, connu pour son action dans le sud de la Tunisie, a été interpellé puis transféré au pôle antiterroriste cette semaine, a indiqué, samedi, à l'AFP, le porte-parole du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES).

Selon Romdhane Ben Amor, le transfert de l'enquête au pôle antiterroriste est "un signal dangereux car c'est la première fois que les autorités utilisent ce pôle pour des associations spécialisées dans la question migratoire".

Abdallah Said, un Tunisien d'origine tchadienne fondateur d'«Enfants de la Lune de Médenine», a été interpellé le 12 novembre avec la secrétaire générale de cette association et la trésorière, a ajouté M. Ben Amor dont l'ONG est spécialisée notamment dans les questions migratoires. Deux agents d'une banque qui hébergeaient les comptes de l'association sont également en garde à vue.

Le journal La Presse, proche du pouvoir, a indiqué, samedi, que "cinq activistes opérant pour le compte d'une association à Médenine ont été placés en garde à vue afin d'être déférés devant le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme".

"Entre 2019 et 2023, cette association aurait reçu des fonds de l'étranger pour aider des migrants subsahariens à entrer illégalement sur le sol tunisien", a assuré le quotidien.

Un "comité de suivi pour lutter contre la criminalisation des politiques de solidarité", composé de plusieurs ONG dont le FTDES, a lancé un appel à soutenir Abdallah Said, estimant que "son seul crime était d'être solidaire avec les enfants migrants et réfugiés dans la région de Médenine".

M. Ben Amor a dénoncé "une nouvelle vague de répression plus dure" des militants d'aide aux migrants, après une première série d'arrestations en mai ayant visé au moins trois organisations : l'association Mmemty de la militante anti-raciste Saadia Mosbah ainsi que Terre d'Asile et le Conseil tunisien pour les réfugiés.

Un message aux activistes

C'«est un message à tous les acteurs qui travaillent dans la solidarité avec les migrants», a-t-il estimé.

La Tunisie, dont les côtes sont situées à certains endroits à moins de 150 km de l'Italie, est l'un des principaux points de départ en Afrique du Nord pour les migrants subsahariens, qui tentent chaque année la périlleuse traversée de la Méditerranée.

Selon M. Ben Amor, le motif de l'enquête, des "subventions et partenaires étrangers (de l'association, ndlr) dans le but d'une installation des migrants en Tunisie" est à relier au "récit politique" des autorités.

En février 2023, le président Kais Saied avait dénoncé dans un discours l'arrivée dans le pays de "hordes de migrants clandestins d'Afrique subsaharienne" dans le cadre d'un "plan criminel pour changer la composition démographique" du pays.

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TRT Français et agences