Pris au piège d'une guerre sans fin qui dure depuis maintenant 7 ans, le Yémen subit l'une des pires crises humanitaires au monde. Or c’est ce que l'on appelle « une guerre oubliée », une guerre qui a vu des milliers de morts, des millions de déplacés et la pire épidémie de choléra depuis 2011.
Lors de son discours du 16 mars, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a déclaré que plus de 10.000 enfants sont morts dans la violence et les souffrances du conflit en cours au Yémen, alors que les promesses d'aide internationale ont une fois de plus manquées de plusieurs milliards.
« Le Yémen a peut-être disparu des gros titres, mais la souffrance humaine n'a pas cessé. Depuis sept ans et plus, le peuple yéménite est confronté à la mort, à la destruction, au déplacement, à la famine, à la terreur, à la division et à la misère à grande échelle », a-t-il déclaré au siège de l'ONU à New York.
« Des millions de personnes sont confrontées à la faim extrême, et le Programme alimentaire mondial (PAM) a dû réduire de moitié les rations en raison du manque de fonds. De nouvelles réductions se profilent. C'est une tragédie », a-t-il ajouté.
Au Yémen, 2,2 millions d'enfants souffrent de malnutrition aiguë. Et environ 80% des 30 millions d'habitants du Yémen dépendent désormais de l'aide humanitaire.
Une guerre par procuration
Au cours des dernières années, les Houthis, qui ont pris le contrôle de la capitale Sanaa et d'autres parties du pays, ont lancé des attaques répétées de drones sur les installations pétrolières saoudiennes, dont celle de septembre 2019 qui a perturbé la moitié de l'approvisionnement en pétrole du royaume.
De l’autre côté, les frappes aériennes saoudiennes au Yémen suscitent des critiques internationales. Plus de 100.000 personnes ont été tuées depuis l'entrée de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite dans le conflit au Yémen en 2015.
« L'Arabie saoudite, premier pays exportateur de pétrole brut au monde, cherche à exploiter la guerre en Ukraine pour faire pression sur les Occidentaux en vue de régler le conflit interminable et dévastateur au Yémen, où elle combat les rebelles houthis, selon des experts », explique L'Orient-Le Jour, premier quotidien francophone au Liban.
Industrie de l’armement
Comment se fait-il alors que l’Occident ferme les yeux sur un drame d’une telle ampleur ? Cela s’explique avant tout par la fourniture d’armes et de munitions à hauteur de milliards de dollars par des puissances occidentales telles que les États-Unis, le Royaume-Uni et la France.
« De nouvelles estimations publiées par l'organisation caritative pour enfants War Child révèlent que depuis que la coalition dirigée par l'Arabie saoudite a commencé son intervention au Yémen, les sociétés d'armement britanniques, y compris BAE Systems et Raytheon, ont réalisé des revenus dépassant les 8 milliards de dollars grâce aux transactions avec l'Arabie saoudite, générant des bénéfices estimés à près de 775 millions de dollars », précise le site d’information qatari Al-Jazeera dans un article publié le 19 septembre 2017.
La vente d'armes françaises à l'Arabie saoudite et leur utilisation dans la guerre au Yémen suscitent aussi des polémiques en France. En 2019, le site d’informations Mediapart a réalisé une enquête exclusive sur le sujet en s’appuyant sur des documents classés 'secret défense' qui ont fuité et qui révèlent « l’usage massif d’armes françaises dans la guerre au Yémen ».
Un rapport de l'ONU publié en septembre 2019 avait même évoqué la responsabilité des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France dans une « multitude de crimes de guerre » commis depuis le début du conflit.