Des affrontements violents, ressemblant à des scènes de bataille, se sont déroulés à Arequipa, deuxième ville du pays.
Les manifestants ont lancé des pierres et ont allumé des feux autour du pont Anashuayco, pour tenter de progresser vers l'aéroport, pour l'heure toujours fermé.
Les forces de l'ordre -- police et armée -- ont répondu avec des tirs de grenades lacrymogène, selon un photographe de l'AFP.
Des heurts ont aussi eu lieu dans la région de Puno (sud), où les protestataires ont incendié un poste de police de Zepita (après le départ des policiers) et un poste de douane à Desaguadero, à la frontière avec la Bolivie, a rapporté la télévision locale.
Des heurts ont également eu lieu dans le département de La Libertad dans le nord du pays.
Jeudi soir, les autorités avaient étendu l'Etat d'urgence déjà en vigueur à Lima, Cuzco, Callao et Puno, à l'Amazonie (est), Tacna (sud) et La Libertad (nord).
A Lima, des milliers de manifestants ont défilé avec des slogans similaires à la veille: "Dina assassine !", "Cette démocratie n'est pas une démocratie, Dina, le peuple te répudie !"
Vêtue d'un chapeau blanc en paille et d'une jupe rose, Olga Mamani, 50 ans, assure: "Nous voulons la démission de Dina. Si elle ne démissionne pas, le peuple ne sera pas en paix". Elle porte sur les épaules le drapeau de Yunguyo (sud-est), petite ville sur le lac Titicaca et la frontière bolivienne.
Paysan cultivant pommes de terre et tubercules, Antonio Huaman, 45 ans, visage buriné, venu de Andahuaylas, épicentre des manifestations en décembre, jure qu'il ne renoncera pas: "On veut la démission de Dina et la dissolution du congrès"
"On restera ici jusqu'aux ultimes conséquences. Nous sommes des guerriers chancas (ethnie de l'Apurimac)", dit-il en mâchant des feuilles de coca qu'il transporte dans un petit sac en plastique: "La feuille nous donne de la force pour poursuivre la lutte".
Le gros des manifestants s'est dispersé vers 20h.
Des échauffourées -- jets de pierre et tirs de gaz lacrymogène -- se sont produits en fin d'après-midi et en soirée.
Si les violences ont été de moindre ampleur que la veille, des groupes continuaient toutefois à en découdre, brûlant des poubelles et lançant des projectiles dans le centre ville vers 21h.
Plusieurs personnes ont été arrêtées, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Les manifestations organisées jeudi à Lima par des habitants des Andes ont fait 38 blessés, dont des policiers, selon le ministère de l'Intérieur.
"La lutte va se poursuivre dans toutes les régions jusqu'à la démission de Boluarte et jusqu'à la satisfaction des autres revendications: des élections cette année et un référendum pour une Assemblée constituante", a déclaré à l'AFP Geronimo Lopez, secrétaire général de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP).
Les troubles au Pérou ont fait 45 morts depuis le 7 décembre. Ils ont éclaté après la destitution et l'arrestation du président de gauche Pedro Castillo, accusé d'avoir tenté un coup d'Etat en voulant dissoudre le Parlement qui s'apprêtait à le chasser du pouvoir.
Jeudi soir la présidente Dina Boluarte a une nouvelle fois appelé au calme à la télévision.
"Au peuple péruvien, à ceux qui veulent travailler en paix (...) et à ceux qui protestent : je ne me lasserai pas de les appeler au bon dialogue, de leur dire que le pays a besoin de solutions pour l'eau, la santé, l'éducation, l'agriculture, l'élevage, plus de ponts, plus de routes..."
Mais elle a aussi menacé ceux "qui génèrent les actes de violence", promettant de la "fermeté".
L'aéroport de Cuzco, capitale touristique du pays, a rouvert ses portes à la mi-journée mais le train vers le célèbre site du Machu Picchu est toujours suspendu.
Au moins 300 touristes étrangers et locaux sont bloqués dans la zone, le train étant l'unique moyen de se rendre dans le joyau inca. En décembre, des touristes avaient également été bloqués sur le site avant d'être évacués.
"Nous ne savons pas si un train viendra nous chercher. Tous les touristes ici font la queue pour s'inscrire" pour nous évacuer, a déclaré à l'AFP le touriste chilien Alem Lopez.
La crise est aussi le reflet de l'énorme fossé entre la capitale et les provinces pauvres qui soutenaient le président Castillo, d'origine amérindienne, et voyaient son élection comme une revanche sur ce qu'ils voient comme le mépris de Lima.
Elue sur le même ticket présidentiel en 2021, Mme Boluarte, vice-présidente de M. Castillo, lui a succédé conformément à la Constitution. Les manifestants voient en elle une "traîtresse".