Les Palestiniens retournent au camp de réfugiés de Yarmouk
Les réfugiés palestiniens de Syrie –une population d’environ 450 000 personnes– sont pleins d’espoir et impatients de voir quelle sera leur situation dans cette nouvelle ère post Al Assad.
Une vue du camp de réfugiés de Yarmouk à Damas, qui a subi de lourdes destructions lors des attaques du régime Assad et de ses alliés entre 2015 et 2018 à Damas, en Syrie, le 10 décembre 2024. / Photo: AA (AA)

Le camp de réfugiés de Yarmouk, près de Damas, était considéré comme la capitale de la diaspora palestinienne avant que la guerre en Syrie ne le réduise à des rangées de bâtiments détruits. Il y avait autrefois des stands de falafels, des pharmacies et des mosquées.

Bombardé par les avions du régime syrien, le camp a été pratiquement abandonné depuis 2018. Les bâtiments qui n’ont pas été détruits par les bombes ont été démolis par le régime ou dépouillés par des voleurs. Ceux qui voulaient revenir pour reconstruire leurs maisons ont été bloqués par des exigences bureaucratiques et de sécurité kafkaïennes.

Mais petit à petit, les anciens occupants du camp sont revenus au compte-gouttes. Après la chute d’Al Assad en Syrie le 8 décembre lors d’une offensive éclair des forces de l’opposition, beaucoup d’autres espèrent qu’ils seront en mesure de le faire.

Les réfugiés palestiniens de Syrie –une population d’environ 450 000 personnes– sont pleins d’espoir mais impatients de voir quelle sera leur situation dans cette nouvelle ère.

Quelques jours après l’effondrement du régime d’Al Assad, les femmes marchaient en groupe dans les rues de Yarmouk tandis que les enfants jouaient sur les décombres. Des motos, des vélos et parfois des voitures passaient entre les bâtiments bombardés. Dans l’une des zones les moins touchées, un marché de fruits et légumes faisait de bonnes affaires.

Certaines personnes revenaient pour la première fois depuis des années pour vérifier l’état de leurs maisons. D’autres, déjà rentrées, envisageaient seulement maintenant de reconstruire et de s’y réinstaller de façon permanente.

Ahmad al-Hussein a quitté le camp en 2011, peu après le début du soulèvement anti-régime qui s’est transformé en guerre civile. Il y a quelques mois, poussé par la hausse des loyers ailleurs, il est revenu vivre avec des proches dans une partie du camp qui était relativement épargnée.

“La Palestine est ici“

Il espère maintenant reconstruire sa maison dans un bâtiment réduit à l’état de coquille évidée et voué à la démolition.

Sous le régime d’Al Assad, obtenir l’autorisation des agences de sécurité pour entrer dans le camp “n’a pas été facile”, a déclaré al-Hussein. “Vous deviez vous asseoir à une table et répondre à la question de savoir qui est votre mère, qui est votre père, qui dans votre famille a été arrêté (…). Vingt mille questions pour obtenir l’approbation”.

Il a ajouté que des personnes qui étaient réticentes veulent maintenant rentrer. Parmi elles, son fils qui avait fui en Allemagne.

Taghrid Halawi est venue, jeudi, avec deux autres femmes pour vérifier leurs maisons. Elles évoquent, avec nostalgie, l’époque où les rues du camp bourdonnaient de vie jusqu’à 3 ou 4 heures du matin.

“Vous sentez vraiment que votre Palestine est ici, même si vous êtes loin de la Palestine”, a raconté Halawi. “Même avec toute cette destruction, j’ai l’impression que c’est comme le paradis. J’espère que tout le monde reviendra, tous ceux qui ont quitté le pays ou qui vivent dans d’autres régions”.

Yarmouk a été construit en 1957 en tant que camp de réfugiés palestiniens, mais est devenu une banlieue dynamique où de nombreux Syriens de la classe ouvrière se sont installés. Avant la guerre, quelque 1,2 million de personnes vivaient à Yarmouk, dont 160 000 Palestiniens, selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, l’UNRWA. Aujourd’hui, il abrite quelque 8 160 réfugiés palestiniens qui sont restés ou qui sont revenus.

Les réfugiés palestiniens en Syrie n’obtiennent pas la citoyenneté, officiellement pour préserver leur droit de retourner dans les maisons qu’ils ont été forcés de quitter, suite à la création d’Israël en 1948 et où il leur est actuellement interdit de retourner.

Mahmoud Dakhnous, enseignant à la retraite qui est retourné à Yarmouk pour vérifier l’état de sa maison démolie, a déclaré qu’il était fréquemment convoqué pour être interrogé par les services de renseignement syriens.

“Besoin de plus de temps pour juger”

Ces dernières années, le régime syrien a commencé à faire reculer le droit des Palestiniens à posséder et à hériter de biens.

Alors qu’un gouvernement de transition s’installe en Syrie, les Palestiniens nourrissent un nouvel espoir.

“Les signes jusqu’à présent cette semaine, les positions et les propositions qui sont avancées par le nouveau gouvernement sont bons pour le peuple et les citoyens”, a relevé M. Dahknous.

Les factions palestiniennes de Yarmouk ont tenté de rester neutres lorsque la guerre civile en Syrie a éclaté, mais à la fin de 2012, le camp a été entraîné dans le conflit et différentes factions ont pris parti pour s’opposer.

Depuis la chute d’Al Assad, les factions s’efforcent de consolider leurs relations avec le nouveau gouvernement de transition. Un groupe de factions palestiniennes a déclaré, mercredi, dans un communiqué, qu’elles avaient formé un organe, dirigé par l’ambassadeur palestinien, pour gérer les relations avec les nouvelles autorités syriennes.

La nouvelle direction n’a pas officiellement commenté le statut des réfugiés palestiniens.

Cependant, le gouvernement intérimaire syrien a envoyé, vendredi, une plainte au Conseil de sécurité de l’ONU dénonçant l’incursion de l’armée israélienne sur le territoire syrien et ses bombardements de plusieurs zones en Syrie.

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TRT Français et agences