Cette annonce intervient à la veille d'une interruption de trois jours des livraisons de gaz russe à l'Europe avec la fermeture programmée pour maintenance, du 31 août au 2 septembre, du gazoduc Nord Stream 1, qui alimente l'Europe en gaz naturel russe en passant sous la mer Baltique.
Gazprom a déclaré dans un communiqué qu'Engie ne s'était pas acquitté de l'intégralité du paiement des livraisons de gaz effectuées en juillet.
"Gazprom Export a notifié Engie de la suspension totale des livraisons de gaz dès le 1er septembre 2022, jusqu'à ce qu'il reçoive l'intégralité des paiements dus pour les livraisons déjà effectuées", est-il indiqué.
Engie, qui détient une participation de 9% dans Nord Stream, s'est refusé à tout commentaire sur cette annonce. Plus tôt dans la journée, le groupe français avait annoncé avoir été informé par Gazprom d'une nouvelle réduction de ses livraisons de gaz à compter de ce mardi.
"Gazprom a informé le groupe Engie de la réduction de ses livraisons de gaz, à compter d'aujourd'hui (mardi-NDLR), en raison d'un désaccord entre les parties sur l'application de contrats", avait déclaré le groupe français dans un communiqué.
Engie avait toutefois rappelé que les livraisons du géant russe de l'énergie à son égard avaient déjà "considérablement diminué" depuis le début de la guerre en Ukraine il y a plus de six mois. L'approvisionnement mensuel récent s'élevait à environ 1,5 TWh, à rapporter à des approvisionnements totaux annuels d'Engie en Europe supérieurs à 400 TWh, a précisé le groupe.
Interrogée sur l'annonce de Gazprom, la Première ministre Elisabeth Borne a déclaré: "Je pense qu'il faut rassurer les clients d'Engie. Engie a d'autres sources d'approvisionnement que le gaz russe."
"De façon générale, on essaie de s'organiser et de se préparer en cas de coupure générale de l'approvisionnement en gaz par la Russie", a-t-elle ajouté lors d'un entretien sur TMC.
La ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a dénoncé l'utilisation du gaz "comme une arme de guerre" par la Russie mais assuré que la France s'était préparée à un tel scénario.
"Le remplissage des stocks de gaz atteindra son maximum dans environ deux semaines", a-t-elle assuré. "Nous avons diversifié nos importations pour n'être plus dépendants qu'à hauteur de 9% du gaz russe (contre 17% avant la guerre)".
Conseil de défense
Dans un contexte de forte hausse des prix de l'électricité et d'inquiétude autour d'une éventuelle interruption totale des livraisons de gaz russe, le gouvernement français accentue la pression en faveur d'une réduction plus rapide de la consommation.
Elisabeth Borne a appelé lundi les entreprises françaises à la sobriété énergétique face aux risques de pénurie de gaz cet hiver et un conseil de défense dédié à l'énergie est prévu vendredi matin à l'Elysée.
"L'approvisionnement en gaz et en électricité étant un intérêt vital pour le pays, le conseil de défense et de sécurité nationale aura pour objectif de faire le point sur la situation ainsi que sur les scénarios envisagés pour se préparer à tous les cas de figure cet automne et cet hiver", indique-t-on à l'Elysée.
"Ce que nous faisons aujourd'hui, c'est que nous nous organisons pour ne pas avoir de coupure cet hiver", a expliqué Agnès Pannier-Runacher sur France Inter.
Les stocks stratégiques de gaz de la France sont remplis à plus de 90%, ce qui représente "deux mois d'avance grosso modo", a-t-elle souligné.
"Sur un hiver normal, nous avons suffisamment de gaz en quantité", mais il faut se préparer pour d'éventuelles vagues de froid et les pics de consommation associés.
Moscou assure remplir ses obligations
Dans cette optique, la "sobriété choisie" constitue le premier levier d'action, avec une diminution de 10% de la consommation d'électricité et de gaz réclamée aux ménages et aux entreprises.
Mais face à d'éventuels pics de froid, en cas de tension sur le réseau, "nous pourrions rentrer dans un scénario de rationnement ponctuel" et passer à "une logique de délestage".
Pour l'électricité, les éventuelles coupures, lors des pics de consommation, s'effectueraient de manière tournante et pour une durée maximale de deux heures.
Pour le gaz, d'éventuelles interruptions ne concerneraient que les industries et pourraient durer un ou deux jours, notamment du fait de la complexité des manoeuvres, a expliqué la ministre.
Alors que les pays européens tentent de doper leurs stocks de gaz en prévision de l'hiver prochain, craignant une interruption complète des livraisons russes, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a démenti toute rétention volontaire de gaz par la Russie, jugeant que les seuls obstacles à l'exportation de gaz russe vers l'Europe étaient des problèmes techniques découlant des sanctions occidentales contre la Russie.
"A part les problèmes technologiques causés par les sanctions, rien n'entrave la fourniture de gaz", a-t-il déclaré lors d'un point de presse téléphonique.
Selon lui, les sanctions imposées par les pays européens, le Canada, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne "empêchent les opérations normales de maintenance et de réparation" en entravant par exemple le retour de certains composants.
"Il n'existe aucun autre obstacle pour que la Russie remplisse ses obligations contractuelles", a-t-il ajouté.